(Toronto) Randi Zuckerberg dit croire que les créateurs devraient commencer à révéler s’ils ont utilisé l’intelligence artificielle pour produire des œuvres, car il est « de plus en plus difficile de dire ce qui est réel ».

La leader du secteur des technologies derrière Facebook Live, qui a quitté le géant des médias sociaux en 2011 et a depuis fondé une entreprise qui connecte les créateurs d’art numérique aux collectionneurs, a déclaré qu’elle aimerait voir les organisations médiatiques noter lorsqu’elles ont utilisé l’IA pour écrire des articles ou même créditer la technologie dans une signature.

Les universitaires pourraient offrir des niveaux de transparence similaires, ce qui pourrait favoriser une tendance à la divulgation dans plusieurs secteurs, a-t-elle souligné.

Si cette approche devient la norme, « les consommateurs pourront apprendre à être un peu plus avisés sur ce qui est réel et ce qui ne l’est pas », a fait valoir Mme Zuckerberg dans une entrevue en marge de la conférence DiscoveryX du Centre d’innovation de l’Ontario à Toronto, mercredi.

« Certes, je pense, c’est un problème qui empêche beaucoup d’entre nous de dormir la nuit », a-t-elle ajouté.

Le problème de la désinformation s’est accentué ces dernières années. Environ six Canadiens sur dix ont déclaré à Statistique Canada l’année dernière qu’ils étaient « très ou extrêmement préoccupés » par la désinformation en ligne, tandis que 43 % estimaient qu’il était de plus en plus difficile de déchiffrer la vérité en ligne de la fiction par rapport à trois ans plus tôt.

L’IA a amplifié le problème en permettant de tromper les gens plus rapidement, plus facilement et avec des ressources moindres en utilisant des images, des vidéos et des clips audio faux ou falsifiés. Rien qu’au cours de la dernière année, l’IA a été utilisée pour diffuser de fausses images explicites de la vedette pop Taylor Swift, représenter le pape portant un manteau bouffant et induire les gens en erreur en leur faisant croire que l’animatrice de télévision canadienne Mary Berg avait été arrêtée.

Les sociétés de médias sociaux comme Facebook, créée par le frère de Randi Zuckerberg, Mark Zuckerberg, se sont retrouvées en première ligne dans la lutte contre la désinformation.

Même si Mme Zuckerberg ne sait pas dans quelle mesure le monde des affaires serait réceptif à ces niveaux de divulgation, elle pense qu’il est important d’entamer la conversation.

Ceux qui adoptent cette approche pour créditer l’IA devront décider s’ils divulguent quels robots ou programmes d’IA ont été utilisés et même les requêtes qui ont été formulées pour produire leurs créations.

Il y a beaucoup de personnes plus intelligentes, expérimentées dans les domaines de l’IA, des lois et du droit d’auteur, qui réfléchissent à ces questions à un niveau plus profond. Mais j’imagine que nous verrons un monde dans lequel au moins certaines de ces choses devront être référencées dès maintenant.

Randi Zuckerberg

Même en cas de divulgation, a indiqué Mme Zuckerberg, les gens devront décider ce qu’ils pensent de « la valeur du contenu ».

« Écouteriez-vous un balado si vous saviez qu’il n’y a pas d’humains derrière ? a-t-elle relevé. Accrocheriez-vous à vos murs des œuvres d’art entièrement créées par l’IA et auxquelles aucun humain n’a jamais touché ? »

Mme Zuckerberg, qui a investi dans la production théâtrale à succès « Dear Evan Hansen », a déclaré qu’elle avait beaucoup réfléchi à ces questions et qu’elle avait décidé qu’elle serait à l’aise d’afficher des œuvres d’art générées par l’IA à ses murs.

« Si quelque chose est beau, est-ce important de savoir qui l’a créé ? », a-t-elle affirmé.

L’accès à des informations fiables

Alors que le monde est aux prises avec l’IA, certaines régions sont également confrontées à des difficultés d’accès à des informations fiables.

Au Canada, la récente promulgation du projet de loi C-18, connu sous le nom de Loi sur les nouvelles en ligne, a obligé Google, Facebook et Meta Platforms, propriétaire d’Instagram, à conclure des accords d’indemnisation des médias d’information pour le partage de leurs articles et reportages.

En réponse, Google, qui avait menacé de bloquer l’accès aux nouvelles canadiennes sur ses plateformes, a finalement accepté en novembre de verser aux médias d’information des paiements annuels totalisant collectivement 100 millions. Meta a adopté l’approche inverse, supprimant les nouvelles canadiennes de ses plateformes.

Questionnée sur les plateformes qui décident de ne plus afficher d’articles et de reportages de médias d’information, Mme Zuckerberg a déclaré : « une grande partie du monde s’est en quelque sorte tournée vers les algorithmes ».

« Mais l’aspect des nouvelles est délicat, car cela fait alors apparaître des choses qui nous maintiennent dans une chambre d’écho », a-t-elle déclaré, faisant référence à un terme utilisé pour décrire le moment où les plateformes proposent à des individus un contenu qui réaffirme leurs opinions existantes plutôt que de les remettre en question.

« Les actualités sont presque la seule catégorie dans laquelle vous souhaitez proposer aux gens un contenu qui sort un peu de leur rythme pour remettre un peu plus en question leur réflexion ou élargir leurs horizons, a poursuivi Mme Zuckerberg. C’est la partie qui nous échappe et j’espère que nous pourrons en venir à bout. »