Le Québec compte un nombre croissant de vignobles, de cidreries et de microbrasseries. Mais les fabricants de spiritueux y sont encore rares. C'est pourquoi Nicolas Duvernois, président de PUR Vodka, est un pionnier à sa façon. En choisissant de fabriquer de la vodka, l'entrepreneur de 30 ans part de loin. Il sait qu'il devra affronter des multinationales aux moyens illimités. Bille en tête, il n'a qu'un seul objectif: que PUR Vodka soit une marque mondialement reconnue.

La PME montréalaise de 15 employés fabrique une vodka dite «ultra-premium». Son spiritueux est élaboré avec du maïs et de l'eau de source du Québec. Contrairement à une vodka d'entrée de gamme, embouteillée après seulement 24 heures de fermentation, une vodka sélecte demeure en cuve plusieurs semaines, explique Nicolas Duvernois.

La PUR Vodka est donc un produit haut de gamme vendu 40$ la bouteille. Son goût léger (malgré ses 40% d'alcool) n'a rien à voir avec le goût d'alcool à friction de certaines autres vodkas. Elle se boit sur glace et ne brûle pas la bouche.

Le produit québécois est dans les rayons de la SAQ depuis un an. Mais, d'ici février 2012, Nicolas Duvernois exportera sa vodka en Australie, en France, en Nouvelle-Zélande, de même qu'en Chine. L'Empire du Milieu lui a commandé la bagatelle de 40 000 bouteilles. La PME profite de cette incursion à l'étranger pour refaire son image. Nouveau format de bouteille, nouvelle étiquette, etc.

Selon le fondateur de l'entreprise, qui préfère taire son chiffre d'affaires, il se vend 6 milliards de bouteilles de vodka par année dans le monde. Les principaux concurrents de PUR Vodka s'appellent Grey Goose (propriété de Bacardi) et Belvédère (une vodka polonaise appartenant à Luis Vuitton).

Vodka récompensée

Comment un petit fabricant québécois de vodka, qui commercialise son produit depuis à peine deux ans, peut-il avoir créé des liens à l'étranger aussi facilement? En gagnant 14 médailles internationales, dont celle de «meilleure vodka au monde», lors du plus récent International Wine and Spirit Competition (IWSC).

«Ce concours-là, c'est comme les Jeux olympiques. Après avoir reçu notre prix, au moins 50 agents de vente de partout dans le monde sont venus nous voir pour distribuer notre produit», explique Nicolas Duvernois qui, à terme, aimerait s'associer à un important distributeur.

Le jeune chef d'entreprise est donc conscient qu'il a une véritable mine d'or entre les mains. Et qu'il doit par conséquent être sur ses gardes. «C'est facile de s'exciter. Il y a des gens très connus et très influents qui ont flairé la bonne affaire et qui m'ont fait des propositions. Sur le coup, ça semblait intéressant. Mais ça n'apportait rien à PUR Vodka. C'est pourquoi nous allons prendre notre temps et gérer notre croissance intelligemment», dit le président de l'entreprise.

Et croissance il y a. PUR Vodka a crû de 900% depuis un an. La PME, qui fait distiller son produit par un sous-traitant à Rougemont, a dû se trouver un second embouteilleur tellement la demande est forte. La capacité de production du fabricant de vodka est actuellement de 400 000 bouteilles. Elle pourrait rapidement être atteinte.

C'est pourquoi Nicolas Duvernois et son partenaire d'affaires, Christopher Lecky, souhaitent posséder leurs propres installations d'ici 2013. Ils y feront tout (R&D, fermentation, embouteillage, etc.), sauf la distillation. Ce n'est donc pas demain que PUR Vodka possédera son propre alambic.

Nombreux défis

PUR Vodka a vu le jour en 2006. Pour financer son entreprise, Nicolas Duvernois a vendu sa participation dans un bar (le Massaï) qu'il exploitait à Outremont. C'est la volonté de cet ancien tenancier de vouloir offrir des produits québécois à sa clientèle (alcool et nourriture) qui l'a poussé à créer son propre spiritueux.

«Je cherchais une vodka faite ici et je n'en trouvais pas. Je me suis dit, «Pourquoi ne pas en faire une?» Tout le monde m'a dit que j'étais fou, que je ne réussirais pas. C'est le genre de commentaires qui, au contraire, me motivent. Je ne lâcherai pas tant que je n'aurai pas atteint mes objectifs», dit-il.

Convaincre les banquiers fait partie des nombreux autres défis qui attendent Nicolas Duvernois. «Même si les chiffres sont là, même si on a gagné des prix, les banquiers demeurent sceptiques. Pour eux, un jeune qui fabrique de la vodka, ce n'est pas sérieux», déplore le chef d'entreprise.