Dans L’argent et le bonheur, notre journaliste Nicolas Bérubé offre chaque dimanche ses réflexions sur l’enrichissement. Ses textes sont envoyés en infolettre le lendemain.

Cette année encore, les attentes en matière d’économie se sont mesurées à la réalité. Et cette année encore, la réalité l’a emporté... Voici quelques leçons apprises au cours des 12 derniers mois.

Le monde ne s’est pas effondré

La plus grande surprise cette année a été la résilience de l’économie. Il s’est créé plus de 400 000 emplois dans les neuf premiers mois de l’année au pays. Air Canada engrange des revenus records. Loto-Québec et la SAQ font des profits records. L’achalandage bat des records à l’aéroport Montréal-Trudeau. Oui, l’économie ralentit cet automne. Mais le taux de chômage au Québec en octobre était de 4,9 %, soit parmi les niveaux les plus bas en un quart de siècle. Personne n’avait prévu un tel scénario pour la fin de 2023. « La bonne leçon à tirer des surprises est que le monde est surprenant », a déjà dit le psychologue et Prix Nobel d’économie Daniel Kahneman. Une citation qui résume bien l’année qui s’achève.

Les taux d’intérêt sont restés élevés

Dès que les taux d’intérêt se sont mis à monter en 2022, les analystes se bousculaient pour prédire une baisse des taux en 2022 ou en 2023. Même à l’été 2023, certains parlaient d’une baisse rapide. Ça ne s’est pas produit. Même si des baisses sont probables en 2024, on parle jusqu’ici d’un ajustement plutôt que d’une diminution importante des taux. L’époque étrange où l’argent ne coûtait presque rien semble révolue.

L’augmentation des salaires a battu l’inflation

L’une des tendances surprenantes en 2023 est que les salaires ont augmenté en moyenne plus rapidement que l’inflation au pays. Depuis un an, les salaires sont en hausse de 4,8 % en moyenne, contre une hausse de 3,1 % pour les prix. Donc les travailleurs se sont globalement enrichis même si tout coûte plus cher. Or, personne ne semble heureux de son sort, y compris les gens qui s’en sortent le mieux dans notre société. « Vous conduisez une camionnette de 80 000 $ et vous prenez des vacances en Europe ? Vous n’avez pas le droit de vous plaindre de l’inflation », a récemment décrété l’auteur financier américain Ben Carlson. Une excellente règle à suivre pour le temps des Fêtes.

PHOTO BRENDAN MCDERMID, ARCHIVES REUTERS

Novembre a été le meilleur mois pour les actions et les obligations depuis de nombreuses années.

Les marchés financiers sont imprévisibles

Quelque chose a cédé dans la psychologie des investisseurs cet automne. Dans les noirs mois de septembre et d’octobre, ma boîte de réception se remplissait de courriels déprimés. Les marchés chutaient chaque jour. L’inflation s’était remise à grimper. Tout le monde ne parlait que de récession. Il y a eu l’attaque terroriste du Hamas en Israël, et le début d’une nouvelle guerre. Beaucoup de lecteurs m’ont donné l’impression de vouloir tout lâcher. Certains me parlaient même de « baisses prévisibles » des marchés financiers pour les mois à venir. Eh bien, le mois suivant, en novembre, les marchés ont été catapultés vers le haut. Novembre a été le meilleur mois pour les actions et les obligations depuis de nombreuses années. C’était imprévisible, bien sûr. C’est la leçon à tirer de tout ça.

La Bourse en hausse en 2023

Parlant de Bourse, les marchés ont été en mode croissance en 2023. Les actions canadiennes étaient en hausse de 8 % en date du 1er décembre, incluant le réinvestissement des dividendes. Les actions américaines étaient en hausse de 21 %, dont une hausse de 37 % pour le NASDAQ, qui représente les titres de technologie. Même les obligations ont été en hausse cette année. Un portefeuille diversifié 60 % actions, 40 % obligations a grimpé de 9 %, tandis qu’un portefeuille 80 % actions, 20 % obligations était en hausse de 11 %, incluant les dividendes. Un investisseur qui a paniqué et a vendu ses placements en janvier 2023 regrette sans doute aujourd’hui de l’avoir fait. J’espère que ce n’était pas vous.

L’immobilier a cessé d’être excitant

Parlant de surprise, celle-là en est une : après 15 années de frénésie, l’année 2023 a été celle où l’immobilier a cessé de libérer de la dopamine dans notre cerveau. Le sujet est passé d’« emballant » à « neutre ». Ces jours-ci, les acheteurs sont découragés par les prix records et les taux d’intérêt élevés. Les vendeurs font le pari que l’année prochaine renouera avec l’inflation immobilière. Les propriétaires craignent la renégociation de leur hypothèque en 2024 ou 2025, et la hausse des versements qui en découlera.

PHOTO WANG XIANG, ASSOCIATED PRESS

Selon une analyse de l’Institut Brookings en 2023, la population en âge de travailler chutera de près de 1 % par année en Chine d’ici 2050, alors qu’elle sera en hausse aux États-Unis.

Les États-Unis promis à une meilleure croissance économique que… la Chine ?

C’était tout entendu : le règne des États-Unis sur la scène économique mondiale vivait ses derniers moments. Le XXIsiècle appartenait à la Chine. Qui ne pouvait pas le réaliser ? Eh bien, il semblerait que le consensus ait été prématuré. Selon une analyse de l’Institut Brookings en 2023, la population en âge de travailler chutera de près de 1 % par année en Chine d’ici 2050, alors qu’elle sera en hausse aux États-Unis. En considérant une hypothèse de croissance économique annuelle de 2 % en Chine et de 2 % aux États-Unis, l’économie américaine serait 42 % plus importante que celle de la Chine en 2050. Une surperformance de la Chine n’est toutefois pas exclue. Bref, le portrait est plus nuancé qu’on aurait plus le croire il n’y a pas si longtemps.

Égalité des sexes

La dernière année a aussi été bonne pour l’égalité des sexes et un plus grand rôle des femmes dans la société. Par exemple, jamais autant de femmes qu’aujourd’hui n’ont occupé de sièges dans les parlements et les assemblées législatives du globe. En Amérique du Nord, en Europe et en Afrique du Sud, plus de 30 % des élus qui détiennent des sièges sont des femmes, soit plus du double de ce qui avait cours il y a 20 ans, selon les données du site Our World In Data. Sur le plan mondial, 25 % des sièges sont détenus par des femmes, contre moins de 9 % il y a deux décennies. La parité n’est pas atteinte, mais la tendance est claire.

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