Bâtisseur de marque, comme il se définit, Bertrand Cesvet a contribué à faire rayonner de grands groupes internationaux comme le Cirque du Soleil, Adidas ou Absolut Vodka lorsqu’il était PDG de l’agence de création multidisciplinaire Sid Lee, qu’il avait cofondée. Aujourd’hui, il vient de racheter le fabricant de manteaux d’hiver haut de gamme Kanuk et souhaite maintenant faire rejaillir cette marque emblématique québécoise à l’échelle mondiale.

Les manteaux Kanuk ont fait leur nid depuis 40 ans au Québec et l’entreprise a même tenté une percée aux États-Unis avec l’ouverture d’un magasin à New York, qui a été cependant rapidement fermé. Depuis cinq ans, la marque a souffert de la COVID-19 et aussi de sa trop grande identification aux rudes hivers québécois d’antan.

« Lorsque le Groupe Champlain a racheté Kanuk à son fondateur en 2015, le Québec a enregistré cet hiver-là des journées à - 35 degrés. Ç’a été la dernière fois.

« Nos manteaux ne sont plus adaptés aux changements de température, ils sont trop chauds, trop gros. On va fabriquer maintenant des manteaux pour les quatre saisons et on va positionner Kanuk à l’international », m’explique Bertrand Cesvet, dans la salle d’exposition du magasin-usine de la rue Rachel.

L’ex-PDG de Sid Lee, qui a quitté l’agence créative en 2020 après l’avoir vendue à un groupe japonais en 2015, s’est associé à deux partenaires, Alan Brandman et Jacques Bohobt, pour investir il y a deux ans dans la marque Psycho Bunny, un fabricant de vêtements pour hommes.

Il y a quatre ans, Psycho Bunny avait des ventes de 20 millions, aujourd’hui, on a plus de 100 boutiques à nous et 50 magasins en franchise au Japon et en Amérique latine. On a un modèle qui fonctionne et que l’on veut reproduire avec Kanuk.

Bertrand Cesvet

Bertrand Cesvet observe qu’il a contribué durant des années à faire la renommée commerciale d’entreprises, que ce soit le Cirque du Soleil ou Adidas, et qu’il veut maintenant le faire pour ses propres projets.

« Je suis un bâtisseur de marque, et Kanuk est une belle marque qui peut s’exporter, mais il va falloir faire plus de volume. C’est ce qui a permis à Canada Goose d’exporter ses manteaux dans le monde.

« On va devoir revoir le modèle de Kanuk et sa chaîne d’approvisionnement. Avec Psycho Bunny, on a développé des contacts avec des fabricants de tissus au Pérou et ailleurs. On va continuer de faire nos manteaux d’hiver, mais on va intégrer de nouveaux modèles plus légers, avec du duvet, des manteaux courts, des imperméables… », précise Bertrand Cesvet.

Des ventes en recul

Lorsque le Groupe Champlain a fait l’acquisition de Kanuk, l’entreprise enregistrait des ventes annuelles de 10 millions, qui ont monté jusqu’à 15 millions en 2019, avant la pandémie. Depuis 2020, les ventes ont reculé à 8 millions.

« On a repris l’entreprise parce qu’on a le savoir-faire pour la transformer. On se donne une année de transition et en 2026, on va avoir nos nouvelles gammes de produits », explique le repreneur, qui aura le titre de directeur exécutif de la création.

Lui-même et une petite équipe sont présentement en Italie pour aller visiter des boutiques et des fournisseurs et prendre le pouls du marché.

Kanuk n’est pas une grosse opération en soi alors que l’on compte une vingtaine de personnes au siège social et magasin de la rue Rachel et une quarantaine de couturières qui viennent assembler les manteaux de juin à octobre, aux 2e et 3étages de l’édifice.

« On veut faire plus de volume et produire à longueur d’année. Le siège social va toujours rester à Montréal, mais on va aussi faire fabriquer ailleurs en sous-traitance. Nous, notre rôle, c’est de créer les plus beaux produits qui vont identifier la marque Kanuk partout dans le monde. On va être des industriels de la créativité », prévoit Bertrand Cesvet.

Encore une fois, il veut répliquer le succès de Psycho Bunny, qui emploie aujourd’hui 200 personnes à son siège social montréalais et qui participent au rayonnement mondial de la marque.

On veut ouvrir des magasins Kanuk. On a plus de 60 baux avec Simon Property Group, le plus gros opérateur de centres d’achats aux États-Unis. Là, ce qu’on fait, c’est de l’artisanat, on veut amener l’entreprise au stade de joueur global.

Bertrand Cesvet

Lorsqu’il a quitté Sid Lee en 2020, Bertrand Cesvet a joué au golf et au tennis durant six mois, pour se rendre compte que ce n’est pas la vie qu’il voulait mener. Il s’est mis à la recherche d’entreprises où il ne pourrait pas juste investir, mais aussi s’investir.

« Je voulais être un investisseur actif. J’étais au départ économiste et détenteur d’un MBA de McGill jusqu’à ce que je me lance dans la création multidisciplinaire et que je devienne responsable de l’image mondiale d’Adidas.

« Lorsque Sid Lee a été rachetée en 2015, mon rôle comme PDG pour le groupe japonais a été de réaliser des fusions et des acquisitions de firmes de création. Donc aujourd’hui, je combine un peu toutes mes expériences passées », observe Bertrand Cesvet.