Les négociations se corsent entre Airbus Canada et quelque 1300 de ses employés qui assemblent l’A220 à Mirabel dont la convention collective est échue depuis le 31 décembre dernier. Leur syndicat reproche à l’employeur d’avoir formulé des demandes « insensées, voire insultantes ». Ce dernier concède que le « contexte est difficile ».

Après des pourparlers qui semblent s’être bien déroulés en ce qui a trait à la portion normative – des éléments n’ayant pas ou peu d’impacts financiers pour l’employeur –, le portrait semble bien différent depuis que les deux parties discutent d’enjeux qui s’accompagnent d’une facture pour la multinationale.

« Il y a des demandes de reculs importantes, entre autres sur le régime de retraite, la prestation de raccordement et les assurances, pour ne nommer que ceux-ci », déplore le comité de négociation de l’Association internationale des machinistes et des travailleurs de l’aérospatiale (AIMTA), dans un bulletin interne distribué à ses membres, mardi.

Les syndiqués – parmi lesquels on retrouve des mécaniciens, des outilleurs, des soudeurs et des techniciens – concernés par cette négociation bénéficient d’un régime de retraite à prestations déterminées. Tout indique que l’employeur souhaite y apporter des changements. La prestation de raccordement est un supplément temporaire pour combler le déficit financier entre le début de la retraite et l’âge de 65 ans – où les rentes provenant des régimes publics commencent à être versées.

Selon la missive interne, la position syndicale sur ces deux questions est « non négociable ». À la manière où vont les choses, les « prochaines étapes » s’annoncent « difficiles », selon l’AIMTA.

Le programme A220 « toujours pas à maturité »

Détenue à hauteur de 25 % par l’État québécois, l’ancienne C Series de Bombardier a tourné la page sur une année record au chapitre des commandes, avec 142 contrats fermes, où l’accélération de la cadence de production – essentielle à la rentabilité du programme – a commencé à se matérialiser.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, ARCHIVES LA PRESSE

L’usine d’Airbus à Mirabel

Parallèlement, Airbus accroît son empreinte à Mirabel. La multinationale européenne a multiplié les embauches et compte quelque 3000 travailleurs à Mirabel. Elle est en train d’aménager un centre d’essais en vol à ses installations de Mirabel et construira un centre de livraison – un projet éventé par La Presse en juillet dernier – qui coûtera au moins 45 millions.

Mais le « contexte est difficile » alors que le programme A220 « n’est toujours pas à maturité », donc déficitaire, souligne la responsable des communications externes et relations avec les médias, Amélie Forcier.

« Bien qu’il y ait des attentes différentes, nous continuerons de dialoguer de façon ouverte et constructive à la table », écrit-elle dans un courriel, en soulignant que l’on est « au tout début » des négociations entourant la « partie monétaire ».

« Le dialogue et non la confrontation »

L’échelle salariale varie selon les catégories de postes. D’après le plus récent contrat de travail, des apprentis pouvaient toucher un peu plus de 18 $ l’heure. Pour un technicien en outillage, le taux horaire peut atteindre plus de 46 $ l’heure. Les membres du comité de négociation syndical doivent se réunir vendredi « afin d’établir une stratégie » avant de nouvelles rencontres avec l’employeur qui sont prévues les 22, 24 et 26 janvier prochains.

« Dans cette négociation, sachez que nous prônons le dialogue et non la confrontation, mais il y a des limites ; l’employeur doit comprendre tous les sacrifices que vous avez faits pour le programme, écrit l’AIMTA. Nous ne sommes pas dans un esprit de reculs, mais bien de gains. »

Québec a injecté environ 1,7 milliard dans l’A220 depuis 2015. Airbus affirme que le programme sortira du rouge une fois que la cadence de production aura atteint 14 appareils par mois à Mirabel et à Mobile, en Alabama. Airbus peut racheter la part de l’État québécois en 2030.

En savoir plus
  • 68
    Nombre d’A220 livrés par Airbus en 2023. Il s’agit d’une hausse annuelle de 28 %.
    Source : airbus