L’entreprise montréalaise de sécurité GardaWorld se trouve dans la tourmente en Libye. La milice qui contrôle l’aéroport de Mitiga, près de la capitale Tripoli, a arrêté sept de ses employés le 11 avril.

« Notre priorité demeure la sécurité et le bien-être de notre équipe et nous travaillons activement avec les autorités libyennes afin d’obtenir leur libération », écrit dans un courriel à La Presse la vice-présidente Isabelle Panelli, au bureau du PDG Stéphan Crétier.

GardaWorld, une des plus importantes sociétés de sécurité au monde, forme un consortium avec l’entreprise française Amarante International en Libye. Leur partenariat assure la sécurité de la Mission de l’Union européenne chargée de l’assistance aux frontières en Libye (EUBAM).

« Sept membres de leur équipe, soit trois prestataires expatriés et quatre ressortissants locaux, ont été arrêtés le 11 avril 2023 en raison d’un imbroglio administratif, alors qu’ils effectuaient une tâche de routine », explique Isabelle Panelli.

« Pour des raisons de sécurité de notre personnel dans la région, nous n’émettrons pas de commentaire additionnel par rapport à cette situation », conclut-elle.

Les sept employés – quatre chauffeurs libyens et trois gardes armés d’origine irlandaise, roumaine et croate – sont entre les mains de la Rada, une puissante milice qui relève du ministère de l’Intérieur.

Les risques du métier

En entretien avec La Presse, le président d’Amarante, partenaire de GardaWorld en Libye, assure que l’équipe travaille fort en ce moment pour les faire libérer, mais qu’il n’y a pas de raison particulière de craindre pour leur sécurité.

« On n’a pas d’éléments qui nous laissent penser qu’ils sont maltraités ou en danger », dit Alexandre Hollander.

Le patron d’Amarante ajoute que ce genre de situations est le lot des sociétés de sécurité privées occidentales déployées en Libye et dans le reste de l’Afrique.

C’est toujours plus simple quand tout se déroule sans accroc ! Mais vous ne pouvez pas travailler en Libye comme vous travaillez en Suisse ou au Canada. Il faut accepter que ça soit plus compliqué, que la situation géopolitique soit plus complexe. Ça fait partie de nos métiers de gérer ce genre de crise.

Alexandre Hollander, président d’Amarante, partenaire de GardaWorld en Libye

Professeure adjointe au Collège militaire royal de Saint-Jean, Marina Sharpe croit que cette situation est typique de l’industrie de la sécurité dans les zones à risque.

« La raison d’être de ce contrat de GardaWorld, c’est l’insécurité, dit-elle. Mais ça ne veut pas dire que l’entreprise n’a pas de devoir d’assurer la sécurité de ses employés. En fait, elle a même un devoir encore plus important à ce chapitre », dit la spécialiste du droit international, qui s’intéresse notamment aux détentions arbitraires.

GardaWorld n’a pas précisé quel « imbroglio administratif » a causé l’arrestation de son personnel à Tripoli.

Selon un article d’Africa Intelligence, les miliciens de Rada auraient arrêté ses employés parce qu’ils n’avaient pas de permis de port d’armes de la Libye. Le média spécialisé affirme que l’entreprise montréalaise n’avait qu’une « licence délivrée directement par l’EUBAM », la mission européenne qui leur a accordé le contrat.

Des contrats en danger ?

L’entreprise montréalaise multiplie les contrats en Libye, notamment avec l’ambassade de Grande-Bretagne à Tripoli et le géant pétrolier italien ENI.

Selon Africa Intelligence, la situation de l’entreprise dans le pays se détériore depuis l’arrestation de ses employés. Le média indique que les services de renseignement intérieurs libyens ont ouvert une enquête et que les contrats de GardaWorld seraient menacés.

Certains membres du personnel de l’entreprise « exerceraient encore sur le terrain malgré l’expiration de leur visa », ajoute Africa Intelligence.

Dans son courriel en réponse à nos questions, le bureau de Stéphan Crétier n’a pas commenté ces informations.

Chez Amarante, Alexandre Hollander assure que le consortium avec GardaWorld est toujours en place.

« On fait tout ensemble, dit-il. On se coordonne pour voir comment se sortir de cette situation. Nous, on va proposer des options à l’Union européenne. »

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    Source : GardaWorld