(Toronto) Les dirigeants de Canopy Growth assurent que l’entreprise progresse vers la rentabilité, même si elle a enregistré une dépréciation hors trésorerie de 1,72 milliard qui l’a forcée à enregistrer une perte nette de plus de 2 milliards au cours de son dernier trimestre.

« Nos aspirations ont peut-être changé au cours des dernières années, mais nous croyons que nous pouvons nous diriger, en nous concentrant sur les bonnes catégories, vers une entreprise rentable qui n’épuise pas ses fonds sur le marché canadien », a affirmé vendredi le chef de la direction, David Klein, lors d’une conférence téléphonique avec des analystes.

« Je ne veux pas que quiconque pense que nous ne passons pas la quasi-totalité de nos heures éveillées à […] tenter d’arrêter la combustion de la trésorerie au Canada. »

Ses remarques survenaient alors que le producteur de cannabis de Smiths Falls, en Ontario, dévoilait sa perte du premier trimestre, qui se comparait à un bénéfice net de plus de 389 millions lors de la même période l’an dernier.

La charge de dépréciation pour le trimestre clos le 30 juin était liée aux activités de cannabis de Canopy et est intervenue alors que ses ventes de cannabis récréatif interentreprises ont chuté de 38 % sur un an, en raison de la compression des prix et de la concurrence accrue.

« Le marché canadien s’est vraiment développé très différemment de ce à quoi nous nous attendions initialement », a admis la directrice financière, Judy Hong, lors de la conférence téléphonique.

Elle a évoqué la fragmentation du marché, la vigueur du marché illicite et les obstacles réglementaires, y compris la lenteur de la légalisation fédérale aux États-Unis, comme les plus grandes difficultés auxquelles l’entreprise est confrontée.

Ces conditions ont poussé Canopy à recentrer sa gamme de produits sur le secteur haut de gamme, qui commande généralement des prix plus élevés et génère une base de consommateurs plus fidèle que les autres articles.

L’évolution vers le haut de gamme s’est accompagnée d’un plan de réduction des coûts en cours, qui implique le réoutillage de ses installations, la révision de ses stratégies d’approvisionnement, la mise en œuvre de processus de fabrication flexibles et la réduction des frais professionnels et de bureau des tiers.

Dans le cadre du plan, 243 travailleurs de Canopy au Canada, en Europe et aux États-Unis ont perdu leur emploi en avril. L’opération s’inscrivait dans une série de mises à pied que Canopy et ses rivales ont effectuées pendant la pandémie de COVID-19.

Canopy prévoit que ses mesures créeront entre 100 millions et 150 millions d’économies sur une période de 12 à 18 mois et l’aideront à atteindre la rentabilité en alignant mieux l’offre sur la demande.

Mais de nombreux obstacles menacent de faire dérailler cet objectif.

Au cours du dernier trimestre, le plus grand distributeur américain de Canopy a été confronté à des difficultés financières qui l’ont amené à suspendre ses commandes, et la société doit maintenant s’efforcer de rétablir les schémas de commande qui ont été perdus, a expliqué Mme Hong.

Le pouvoir d’achat des consommateurs diminue également alors que le Canada est confronté à sa plus forte inflation en près de 40 ans, un phénomène que connaissent aussi plusieurs autres pays. La hausse de l’inflation a déjà modéré les ventes de vaporisateurs haut de gamme en Europe et en Amérique du Nord, a souligné Mme Hong.

Les défis de la chaîne d’approvisionnement des trimestres précédents ont également persisté et ont été un problème, en particulier pour sa marque de vaporisateur Storz and Bickel.

« Notre équipe d’approvisionnement, d’ingénierie et de fabrication travaille fort pour identifier des solutions à ces défis, y compris le recours à des composants et des fournisseurs alternatifs, et nous nous attendons à ce que cela soit gérable », a noté Mme Hong.

Le marché américain toujours dans la mire

Alors que Canopy s’efforce de résoudre ces problèmes, M. Klein a noté qu’il gardait toujours un œil sur les États-Unis.

Au cours des dernières semaines, le chef de la majorité au Sénat, Chuck Schumer, a présenté une loi qui pourrait aider à légaliser la marijuana au niveau fédéral, même si les observateurs ne s’attendent pas à ce qu’elle soit promulguée.

« Il ne fait aucun doute que nous mettons fortement l’accent sur le marché américain, qui évolue […] plus lentement que nous ne le souhaiterions », a admis M. Klein.

Il a noté que les deux tiers des Américains vivaient déjà dans un endroit qui propose un accès au cannabis sous une forme ou une autre, « mais le gouvernement fédéral refuse toujours de reconnaître cette réalité ».

« Donc, en ne tenant pas compte de cela […] nous n’attendons pas, a-t-il déclaré. Nous continuons de voir que les États-Unis sont le marché le plus grand et le plus important au monde. »

Pour faire avancer sa stratégie américaine, Canopy a signé un accord pour acquérir la société de produits comestibles Wana Brands, pour être prêt si les États-Unis décident d’aller de l’avant.

Canopy a déjà conclu des accords similaires avec TerrAscend et Acreage Holdings et a renforcé sa présence aux États-Unis en lançant quatre eaux pétillantes au cannabidiol sous la marque Quatreau au sud de la frontière en mars 2021, qui sont venues s’ajouter à la liste des produits Martha Stewart, BioSteel et This Works qu’elle vend déjà aux États-Unis.

La perte nette subie par la société s’est élevée à 5,23 $ par action, contre une perte de 84 cents par action au deuxième trimestre 2021.

Les analystes s’attendaient à ce que la société enregistre une perte nette de 111,6 millions, ou 28 cents par action, selon les prévisions recueillies par la firme de données financières Refinitiv.

Les revenus nets pour le trimestre se sont élevés à 110,1 millions, en baisse de 19 % par rapport à ceux de 136,2 millions du même trimestre l’an dernier.

Le cours de l’action de Canopy a chuté de 19 cents, ou 5,2 %, à 3,50 $ à la Bourse de Toronto.