Cette année, la Chine a ravi au Japon le titre de premier exportateur de voitures dans le monde, après avoir doublé l’an dernier l’Allemagne, qui peine à s’en remettre. Le moteur économique de l’Europe a calé.

L’économie allemande est sur le chemin d’une deuxième récession en moins d’un an. C’est le seul grand pays industrialisé qui n’a pas encore récupéré le terrain perdu pendant la pandémie et ce sera vraisemblablement le seul pays de la zone euro à afficher une décroissance de son produit intérieur brut en 2023.

L’énergie, ou plutôt l’incertitude énergétique, est au cœur du problème. L’Allemagne est l’usine de l’Europe avec un secteur manufacturier qui pèse lourd dans l’ensemble de l’économie. Les activités manufacturières ont contribué à 26,6 % à la croissance économique de l’Allemagne en 2021, comparativement à 16,8 % en France et 18,4 % aux États-Unis.

Les gros canons du secteur manufacturier allemand sont bien connus partout dans le monde, surtout ceux du secteur automobile, Volkswagen, Daimler et BMW. Mais la plus grande entreprise chimique au monde, BASF, est allemande, de même que le géant Siemens, un conglomérat aux multiples spécialités, dont l’énergie, la santé et le transport.

Ces mastodontes ont besoin d’énergie, de beaucoup d’énergie. Depuis l’invasion de l’Ukraine, l’Allemagne s’est sevrée du gaz russe à bon prix qui alimentait son industrie lourde, ce qui a plongé tout ce secteur dans l’incertitude. Ne pas savoir s’il y aura de l’énergie disponible et s’il y en a, à quel prix, n’est pas exactement un contexte qui encourage les entreprises à investir.

BASF, le plus gros consommateur de gaz d’Allemagne, a déjà fait savoir qu’il a l’intention d’investir ailleurs, notamment en Chine, pour pouvoir maintenir sa compétitivité.

Le vénérable secteur automobile allemand, la fierté du pays, est en voie d’être dépassé par la concurrence chinoise et celle de Tesla. Volkswagen, premier constructeur de véhicules électriques d’Allemagne, a annoncé la semaine dernière des mises à pied dans son usine qui construit les modèles ID.3, ID.4 et ID.5, en raison de la demande qui faiblit.

Chez la concurrence, la faiblesse de la demande n’est pas un problème. Ce serait plutôt le contraire. Les voitures chinoises électriques ou à essence sont en train d’envahir le monde.

Ici, si on n’en voit pas beaucoup sur nos routes, c’est parce que le gouvernement américain a bloqué l’accès de la Chine à son marché, en imposant des tarifs de plus de 25 % sur les voitures chinoises. Certaines d’entre elles sont quand même exportées en Amérique du Nord, notamment sous le nom de Volvo (Polestar) ou MG, des marques qui appartiennent à des intérêts chinois.

C’est une tout autre histoire en Europe, où les voitures chinoises sont si populaires en raison de leur prix relativement bas que la Commission européenne vient d’ouvrir une enquête sur les subventions qui donneraient un avantage commercial aux exportations chinoises.

Les constructeurs automobiles allemands ont adopté la voie de l’électrification sur le tard. Ils n’étaient pas convaincus que c’était la route à suivre, pour des raisons assez faciles à comprendre. Les ménages allemands sont ceux qui paient l’électricité le plus cher en Europe, sinon dans le monde. C’était le cas avant la flambée des prix de l’énergie causée par l’invasion de l’Ukraine et c’est toujours le cas aujourd’hui. Pour eux, il y a vraiment peu d’économie à faire sur le coût de la recharge électrique par rapport à un plein d’essence.

Quand le secteur automobile allemand a finalement pris le virage électrique, il était en retard de plusieurs tours. Les marques chinoises ont doublé leur part du marché européen des voitures électriques, de 4 % qu’elle était en 2021 à 8 % en 2023. Si la tendance se maintient, ce sera 15 % en 2025, estime la Commission européenne.

La crainte d’être submergée par les exportations chinoises a poussé l’Europe à réagir.

Le but est d’aider l’Allemagne, premier constructeur automobile d’Europe, à redémarrer son économie en panne. S’il n’est pas déjà trop tard pour son secteur automobile.

Lisez l’article « La Chine inonde le monde de ses voitures »