La main-d'oeuvre se fait rare et l'économie canadienne continue de créer des emplois. Pourtant, les salaires n'augmentent pas autant qu'on pourrait s'y attendre. L'explication se trouve peut-être du côté de la hausse des emplois à temps partiel.

« La hausse des emplois à temps partiel a été depuis un an presque deux fois plus élevée que celle des emplois à temps plein », constate Benoit Durocher, économiste principal chez Desjardins.

Le nombre total d'heures travaillées n'augmente donc pas autant qu'on pourrait le penser et la productivité non plus, précise-t-il, ce qui explique que les salaires augmentent peu.

Étant donné la relation directe entre productivité et salaire, « la faible productivité devrait continuer de limiter la progression des salaires dans les prochains mois », estime Benoit Durocher.

Depuis le début de 2019, soit pour les mois de janvier et février, l'économie canadienne a créé plus de 100 000 emplois et le taux de chômage est à un niveau historiquement bas.

Le marché de l'emploi continue donc de bien se porter au Canada, ce qui indique que l'économie est encore capable de créer des emplois, malgré la pénurie de main-d'oeuvre.

« On crée des emplois quand même. C'est comme s'il y avait encore un bassin de travailleurs disponibles, surtout chez les jeunes et les étudiants. »

Ces jeunes travaillent souvent à temps partiel, d'où la croissance marquée d'emplois à temps partiel. « Le nombre d'heures travaillées pour les emplois de 1 à 14 heures par semaine a augmenté de 8,2 % depuis un an, tandis que les emplois de 35 heures et plus par semaine affichent une baisse de 0,3 %. »

Par ailleurs, l'augmentation des emplois à temps partiel et la croissance moins rapide du nombre total d'heures travaillées sont aussi un signe de ralentissement économique, souligne l'économiste.

Un paradoxe

La faible croissance des salaires au Canada persiste malgré la bonne tenue de l'économie, ce qui inquiète plusieurs économistes, à commencer par le gouverneur de la Banque du Canada, Stephen Poloz, qui tente de comprendre pourquoi.

« C'est un paradoxe », convient Benoit Durocher, parce que la théorie veut que la rareté de la main-d'oeuvre entraîne l'augmentation du coût de celle-ci, c'est-à-dire les salaires.

Les pénuries de main-d'oeuvre ne se font pas seulement sentir au Québec, mais aussi dans les principales provinces du Canada comme la Colombie-Britannique et l'Ontario.

On saura aujourd'hui si le marché du travail canadien a maintenu son dynamisme au premier trimestre de 2019, avec les résultats de l'Enquête mensuelle de Statistique Canada pour le mois de mars.

Peu importe les résultats de mars, le bilan récent du Canada en matière de création d'emplois est exceptionnel, estime l'économiste de Desjardins, qui prévoit un bilan négatif et la perte de 12 000 emplois.

Emplois créés au Canada/au Québec

• Janvier : 66 800/16 000

• Février : 55 900/14 900

• Taux de chômage : 5,8 %/5,3 %

Source : Statistique Canada