J’ai enfin compris les offres du gouvernement. Et j’ai pu en décortiquer les paramètres salariaux pour les infirmières, les enseignants et les psychologues.

Les grandes lignes ? Le 1er avril prochain, les offres se traduiraient par des salaires compris entre 71 424 $ et 137 870 $ pour les infirmières au sommet de l’échelle. Quant aux psychologues – titulaires d’un doctorat – et aux enseignants, l’offre ferait grimper leur paye jusqu’à 126 586 $ et 97 397 $, le 1er avril, respectivement.

J’ai enfin compris les offres, en ce sens que je sais maintenant que la hausse additionnelle de 3 % proposée, qui s’ajouterait aux 10,3 % sur cinq ans, ne s’appliquerait pas à tous. Il s’agit en fait de ce que coûtent au gouvernement les diverses majorations offertes à des sous-groupes, répartis sur l’ensemble des 600 000 employés en négociation, selon ma compréhension.

Certains sous-groupes toucheront bien davantage que la moyenne de 3 % et d’autres, rien du tout. À cela s’ajoute un montant forfaitaire de 1000 $, qui correspond à 1,5 % en moyenne. Bref, le chiffre de 14,8 % sur cinq ans, qu’on entend partout, est une sorte de moyenne (10,3 % +3 % +1,5 %) qu’aucun employé ne touchera vraiment.

J’ai enfin compris, aussi, que le gouvernement demande à certains groupes d’augmenter leurs heures de travail en échange de majorations substantielles. Mes renseignements viennent du gouvernement et des centrales syndicales.

Les infirmières

Voyons voir. La profession d’infirmière se décline en plusieurs catégories – auxiliaires, techniciennes, bachelières –, mais essentiellement, les offres sur la table se traduiraient par des salaires majorés de 18,1 % à 20,9 % sur cinq ans.

Pour avoir de telles hausses, les infirmières à temps plein devraient ajouter environ 1,5 heure par semaine à leur horaire, pour le faire passer de 37,5 à 39 heures.

Le 1er avril prochain, leur paye serait globalement majorée de 12,9 % pour celles de jour et jusqu’à 15,6 % pour celles qui acceptent un horaire condensé la fin de semaine. Cette hausse est sur deux ans, puisque leur salaire actuel est payé en fonction des paramètres du 1er avril 2022.

En gros, donc, plus du tiers de la hausse de 12,9 % s’explique par une augmentation des heures de travail (5 %) et le reste, par un bond salarial (7,9 %) sur deux ans.

Les infirmières bachelières aux conditions les plus difficiles (la fin de semaine aux urgences) au sommet de l’échelle toucheront 137 870 $, si l’offre est acceptée, somme qui passera à 144 140 $ au terme du contrat de travail, le 1er avril 2027.

Les psychologues sont beaucoup moins nombreux que les infirmières. On parle d’environ 1700 psys – la plupart dans le réseau de la santé – contre 83 000 infirmières et 131 000 enseignants.

Leur situation est plus compliquée. D’abord, le gouvernement verse actuellement aux psychologues du réseau de la santé des primes de rétention, souvent de 9,6 %, parce que le salaire relativement faible les amène à partir pour le privé.

Je dis relativement faible, car le salaire d’un psy est de 96 575 $ au sommet de l’échelle, bien que la plupart soient titulaires d’un doctorat. Les psychologues sont en fait des médecins de la tête, et leur paye est bien moindre que celle des médecins du corps, cela va sans dire. Bref, avec la prime, ils gagnent 105 846 $ pour 35 heures de travail depuis le 1er avril 2022.

Le gouvernement leur demande d’ajouter 2,5 heures à leur horaire hebdomadaire et leur propose une majoration de 19,6 % de leur paye le 1er avril prochain. Autrement dit, de cette hausse, environ la moitié vient des heures additionnelles – en supposant qu’elles seraient rémunérées en heures supplémentaires – et l’autre moitié, de l’amélioration directe de leur salaire.

Au terme du contrat de cinq ans, le 1er avril 2027, la hausse serait de 25,1 %, selon l’offre patronale, et le salaire, de 132 374 $ au sommet de l’échelle (après 13 ans d’ancienneté).

Les syndicats qui les représentent répliquent qu’on ne peut pas leur demander de travailler davantage, vu l’effet de voir des patients troublés à longueur de semaine. De plus, ils souhaitent que le gouvernement accélère le traitement de leur plainte concernant l’équité salariale – les psychologues sont surtout des femmes – déposée il y a huit ans.

Le gouvernement leur dit que l’offre sur la table comble une partie de l’iniquité salariale, et que cette partie est une avance sur le règlement éventuel.

Les cégeps et les centres de services scolaires ont aussi une centaine de psychologues et leur paye serait majorée encore davantage que celle de leurs collègues de la santé, en raison d’un retard. Leur hausse serait donc de 25 % à 37 % au terme des cinq ans du contrat, le 1er avril 2027.

Dans le secteur de l’éducation, la situation est plus simple. Les salaires au sommet de l’échelle seraient majorés de 5,8 % le 1er avril 2024 et d’un total de 10,7 % sur cinq ans, ce qui est essentiellement l’offre globale offerte à tous. Un enseignant gagnerait 101 834 $ le 1er avril 2027.

Les enseignants ont bénéficié d’une augmentation plus importante que les autres à la dernière négo. Les discussions actuelles se concentrent surtout sur la lourdeur des classes ordinaires.

Québec propose, par ailleurs, de redresser la paye des éducateurs en service de garde des écoles et des aides de classe. Le bond pourrait atteindre 86,4 % en avril 2024, mais pour une semaine de 37,5 heures, donc majorée de 75 %.

Voilà le portrait. Il manque encore beaucoup d’employés, mais bon, c’est une grosse bouchée.

Je rappelle tout de même que les employés qui gagnent 52 000 $ ou moins au sommet de l’échelle (rangement 1 à 11 dans le jargon) se voient aussi proposer une majoration spéciale additionnelle de 1 % de leurs salaires, en moyenne (donc 11,3 % au lieu de 10,3 %), selon ma compréhension.

On verra maintenant ce qui découlera des négos…