Les producteurs privés d’électricité devraient pouvoir vendre leur énergie directement aux entreprises qui en ont besoin maintenant qu’Hydro-Québec ne fournit plus à la demande, estime l’Institut économique de Montréal.

Dans une étude de l'Institut économique de Montréal publiée jeudi, le chercheur Gabriel Giguère souligne qu’il y a des projets d’investissement totalisant 21 000 mégawatts en attente d’un approvisionnement en électricité alors que seulement 1000 mégawatts sont disponibles, selon le ministre de l’Économie Pierre Fitzgibbon.

« Cela revient à donner au gouvernement et à la société d’État un droit de vie ou de mort sur les projets, dit-il, et c’est un frein au développement économique. »

La Presse s’est entretenue avec l’auteur de l’étude.

La solution que vous avancez ne serait-elle pas difficile à mettre en application, étant donné que le réseau de transport et de distribution est aussi saturé ? Comment les producteurs privés achemineraient-ils l’électricité à leurs clients ?

On peut produire de l’électricité directement sur les sites industriels. Ça se fait ailleurs. C’est ce que fait Innergex, qui alimente les installations d’Amazon en Ohio avec un parc solaire de 200 mégawatts. Dans le nord, des centrales hydroélectriques pourraient être construites à proximité des entreprises, si la limite actuelle de 50 mégawatts pour les centrales privées était levée. Il y a moyen de construire des circuits courts et de s’entendre avec Hydro-Québec pour faire transiter l’électricité par son réseau. Ce qui est important, c’est de faire preuve de flexibilité.

Est-ce que des entreprises privées seraient disposées à investir des sommes importantes dans des installations de production étant donné les tarifs d’électricité relativement bas dont bénéficient les entreprises ? Le tarif industriel est à peine plus élevé que le coût de revient d’Hydro-Québec, selon une analyse publiée récemment dans La Presse⁠1.

Les tarifs d’Hydro-Québec ne reflètent pas nécessairement ses coûts, disons-le. Le coût des nouveaux approvisionnements est beaucoup plus élevé que le coût moyen du kilowattheure. Il faut avoir une réflexion là-dessus. Je ne peux pas vous dire s’il y aura beaucoup d’entreprises intéressées à investir, mais si on ne le permet pas, il n’y en aura pas. Des entreprises comme Innergex, par exemple, pourraient lever la main.

Les entreprises veulent se brancher au réseau d’Hydro-Québec pour son énergie renouvelable, mais aussi et peut-être surtout pour ses tarifs avantageux. Si des producteurs privés investissent des sommes importantes et exigent un rendement qui en tient compte, le prix plus élevé de l’électricité fera-t-il disparaître la demande de 21 000 mégawatts ?

Il faudra voir le prix du kilowattheure. Je ne sais pas si la demande va diminuer de moitié ou si elle passerait de 21 000 mégawatts à 8000 mégawatts, mais les entreprises qui se font dire non par Hydro-Québec regarderaient certainement la possibilité de s’approvisionner en électricité auprès des producteurs privés. Il n’y a pas d’alternative actuellement. Il y a énormément de projets et peu d’électricité disponible. Le développement économique du Québec est barré.

1. Lisez « Les 194 grands clients industriels : une subvention annuelle de 1,15 milliard » Consultez l'étude de l'IEDM