Le Québec figure dans les démarches effectuées par Northvolt, acteur connu de l’électrification en Europe, pour une potentielle usine nord-américaine. Ce projet, s’il se réalise, permettrait au gouvernement Legault de concrétiser un objectif qu’il caresse : attirer un fabricant de cellules, dernière étape avant l’assemblage d’une batterie lithium-ion.

Depuis le début de l’année, l’entreprise suédoise a tenu au moins quatre rencontres avec des représentants du gouvernement Trudeau. La plus récente rencontre a eu lieu le 28 mars dernier, selon l’inscription de la société au registre fédéral des lobbyistes.

Le ministère de l’Innovation, des Sciences et du Développement économique a été présent à chacune des étapes, mais le ministère des Finances a participé au plus récent rendez-vous.

« Northvolt étudie la possibilité de construire et exploiter une [usine] de production de batteries en Amérique du Nord et est donc en dialogue avec le gouvernement fédéral afin d’identifier les aides politiques et financières potentielles », peut-on lire dans l’inscription de Northvolt.

Vendredi, la société établie à Stockholm n’avait pas répondu aux questions envoyées par La Presse visant à obtenir des précisions sur ses démarches. L’entreprise n’est pas étrangère au Canada, puisqu’elle compte le Régime de retraite des employés municipaux de l’Ontario parmi ses investisseurs.

Fait intéressant, l’inscription de Northvolt précise qu’elle s’attend à obtenir du financement de la part d’Ottawa et de Québec. En fait, le « gouvernement du Québec » est l’unique gouvernement provincial identifié dans les informations divulguées par le fabricant de cellules de batteries.

Chaînon manquant

De l’extraction minière jusqu’au recyclage des batteries, le gouvernement Legault ambitionne d’attirer des entreprises pour chacune des étapes de la filière québécoise des batteries. Il y a toujours un chaînon manquant : un cellulier. Britishvolt et StromVolt, qui faisaient miroiter des projets, ont fait marche arrière l’an dernier. Les deux sociétés n’avaient pas de contrats fermes en poche avec des clients.

Les cellules de batterie, qu’est-ce que c’est ?

Une batterie lithium-ion que l’on retrouve dans un véhicule électrique est en quelque sorte un assemblage de batteries individuelles – les cellules. Ces modules sont placés en parallèle et reliés les uns aux autres pour former une batterie. Le nombre ainsi que la taille des cellules dans une batterie permettent de déterminer la quantité d’électricité qu’elle est en mesure de stocker.

Le portrait est différent avec Northvolt ; la jeune pousse fondée en 2015 est déjà partenaire de Volvo, qui est propriétaire de Prevost et Novabus au Québec. Elle compte également Volkswagen – qui construira une usine de batteries en Ontario (voir écran 10) – ainsi que BWM parmi ses clients. Elle semble avoir une plus grande crédibilité auprès du gouvernement fédéral.

« Oui, parce qu’ils ont des clients, affirme une source gouvernementale fédérale au fait du dossier, mais qui n’est pas autorisée à s’exprimer. C’est la différence. La fabrication de cellules, c’est une étape, mais il faut aussi la vendre. »

Le gouvernement Legault n’a pas commenté les démarches de Northvolt, qui n’est toujours pas inscrite au registre québécois des lobbyistes. À l’occasion de l’inauguration de l’usine de batteries construite par Lion Électrique à Mirabel, lundi, le ministre de l’Économie, de l’Innovation et de l’Énergie, Pierre Fitzgibbon, avait été interrogé sur la possibilité de voir la province convaincre un fabricant de cellules de venir s’installer.

« Je pense que oui », avait répondu M. Fitzgibbon, sans toutefois offrir d’échéancier ou de candidats potentiels.

Sortir de Bécancour ?

Selon nos informations, le parc industriel et portuaire de Bécancour – l’endroit privilégié par Québec pour jeter les bases de la filière des batteries – ne disposerait plus de suffisamment d’espace pour accueillir un complexe comme ceux du cellulier suédois. Il n’a pas été possible de savoir quels endroits pourraient être privilégiés.

Au-delà des intentions nord-américaines de Northvolt, la question du financement risque de dicter l’allure des choses. Les grands complexes pour assembler des batteries contraignent les ordres de gouvernement à délier les cordons de leur bourse. Pour l’usine de batteries que construira Volkswagen en Ontario sur un terrain de 1500 acres (environ 6 km⁠2), Ottawa est prêt à débourser 13 milliards sur une décennie.

Cela ne tient pas compte du demi-milliard de dollars en incitations directes pour l’entreprise auxquels a consenti le gouvernement ontarien. La province dépensera également plusieurs centaines de millions pour construire des routes, des services publics et aménager d’autres infrastructures à St. Thomas, au sud de London.

En savoir plus
  • 9
    De l’exploration jusqu’au recyclage, c’est le nombre d’étapes dans la chaîne des batteries.
    Source : Gouvernement du Québec