(Ottawa ) Le gouvernement Trudeau a déroulé un tapis rouge soyeux devant Volkswagen pour convaincre les dirigeants de l’entreprise d’installer sa méga-usine de fabrication de batteries pour les véhicules électriques au Canada au lieu des États-Unis.

En tout, le gouvernement fédéral s’est engagé à verser des subventions qui pourraient totaliser 13 milliards de dollars sur une période de 10 ans au constructeur automobile allemand pour l’inciter à établir sa première usine à l’extérieur du continent européen au Canada, plus précisément à St. Thomas, en Ontario.

Ottawa a aussi accepté de contribuer à hauteur de 700 millions à la construction de cette usine qui occupera un espace de 350 terrains de football, soit l’équivalent de la superficie occupée par l’aéroport international Pearson, à Toronto, a confirmé une source gouvernementale à La Presse.

L’effort financier consenti par le gouvernement Trudeau visait à concurrencer l’Inflation Reduction Act (IRA) adopté par l’administration du président Joe Biden à Washington.

L’IRA, qui est doté d’une enveloppe de 370 milliards US pour appuyer des projets visant à lutter contre les changements climatiques et accélérer la transition énergétique, est devenu une source d’inquiétude dans plusieurs pays en raison de son pouvoir d’attraction auprès des grandes entreprises.

Le montant du coup de pouce financier canadien, qui n’avait toujours pas été dévoilé près d’un mois après que Volkswagen eut confirmé qu’il installerait ses pénates à St. Thomas, a d’abord été rapporté par l’agence Bloomberg. Le premier ministre Justin Trudeau et le ministre de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie, François-Philippe Champagne, doivent confirmer les détails des investissements du gouvernement fédéral durant une conférence de presse ce vendredi à St. Thomas.

Le gouvernement de l’Ontario doit aussi préciser ce vendredi les détails des subventions qu’il a mises sur la table pour attirer Volkswagen sur son territoire. St. Thomas se trouve à environ 200 kilomètres au nord-est de Detroit et constitue un élément important du corridor automobile qui existe entre le Canada et les États-Unis.

« C’est un investissement qui aura des retombées économiques pour les deux ou trois prochaines générations », a affirmé une source gouvernementale, qui a requis l’anonymat parce qu’elle n’était pas autorisée à parler publiquement de ce dossier.

En vertu de l’entente conclue entre Volkswagen et le gouvernement fédéral, le géant de l’automobile allemand touchera annuellement une partie des subventions seulement après que la production et la vente des batteries pour les véhicules électriques auront commencé.

En outre, le versement des subventions sera assujetti au maintien de l’IRA aux États-Unis. Si une nouvelle administration décide de mettre la hache dans ce généreux programme, les subventions canadiennes prendront également fin.

« C’est au cœur de l’entente avec Volkswagen. L’entreprise ne touchera pas de subvention tant et aussi longtemps que la production des batteries et leur vente n’auront pas commencé », a précisé une source gouvernementale.

La place du Canada dans la transition

Au cours des dernières semaines, M. Champagne a affirmé que le gouvernement Trudeau devait riposter à l’IRA à la hauteur de ses moyens pour que le Canada demeure concurrentiel et puisse attirer son lot d’investissements liés à la transition énergétique.

« Ce que nous nous sommes donné comme objectif, c’est de rester concurrentiels par rapport à ce qui se passe aux États-Unis, mais de façon sélective », a commenté le ministre le mois dernier à Montréal, tout en reconnaissant qu’on « ne peut pas tout faire ».

La décision de Volkswagen de s’installer à St. Thomas au lieu de s’établir aux États-Unis a été décrite par M. Champagne comme « un coup de circuit pour le Canada ».

« Ça m’a pris des mois de travail pour convaincre nos partenaires européens que le Canada, c’est l’endroit par excellence pour le secteur de l’électrification des transports », a dit le ministre lors d’un évènement à Montréal le mois dernier.

Dans une entrevue accordée à l’agence Bloomberg, M. Champagne a indiqué que le gouvernement Trudeau était aussi en pourparlers avec LG Energy Solution et Stellantis NV pour une aide financière en prévision de la construction d’une usine, également en Ontario.

Selon les calculs du ministère de l’Industrie, le Canada et l’Ontario ont attiré plus de 17 milliards de dollars d’investissements de constructeurs automobiles et de fournisseurs de batteries pour véhicules électriques et de composants de batteries depuis 2020.

Le mois dernier, le chef du Parti conservateur, Pierre Poilievre, avait dénoncé l’absence de détails au sujet de l’effort financier que le gouvernement Trudeau avait consenti pour convaincre Volkswagen d’installer son usine au Canada.