(Québec) Les propriétaires de Québec verront leur compte de taxes bondir en moyenne de 3,9 % en 2024, une hausse salée jamais vue depuis les fusions de 2002, qui reste toutefois moindre que l’inflation ou que l’augmentation annoncée dans la métropole.

Pour boucler ce budget dans une « conjoncture économique particulièrement difficile », la Ville devra notamment augmenter le coût des vignettes de stationnement. Québec exigera aussi que les propriétaires de chat paient un permis annuel.

Le maire de Québec a présenté son budget 2024 mercredi. Il s’est réjoui d’une hausse d’impôt foncier sous l’inflation de 5,6 %. « Il y a 1,7 point entre le 3,9 % d’augmentation moyenne et les 5,6 % de l’inflation. C’est un plus grand écart que jamais. On est en bas de l’inflation. Un effort colossal est fait », a assuré le maire.

PHOTO YAN DOUBLET, ARCHIVES LE SOLEIL

Hôtel de ville de Québec

La hausse de l’impôt foncier va représenter 120 $ de plus pour une résidence évaluée à 293 000 $, soit l’évaluation moyenne des propriétés à Québec.

Dette encore en baisse

La Ville prévoit réduire sa dette pour la neuvième année d’affilée malgré une hausse de 7,4 % de ses dépenses totales. Québec veut toutefois réduire de 24 millions les dépenses de ses « unités administratives ». Des économies sont attendues dans l’entretien et le déneigement des voies de circulation, ou encore avec des abolitions de postes.

En guise de comparaison, rappelons que les Montréalais auront droit à des hausses moyennes d’impôt foncier de 4,9 % en 2024 et que la dette de la Ville doit augmenter de 200 millions.

Dans la capitale, la dette doit fondre de seulement 5 millions, pour s’établir à 1,53 milliard. Depuis 2016, la dette a baissé de 141,5 millions.

Le chef de l’opposition officielle n’a pas voulu se réjouir de la comparaison avec la métropole. « M. Marchand a été très chanceux d’arriver à la tête d’une municipalité qui avait été extrêmement bien gérée. On dirait que c’est le budget où il se rend compte de la réalité des villes », a lancé Claude Villeneuve.

Des vignettes à 150 $

L’administration Marchand introduit une série de mesures d’écofiscalité pour engranger des revenus. Les propriétaires d’immeubles non résidentiels devront payer plus cher pour l’eau et la gestion des déchets. Les propriétaires de grands stationnements vont quant à eux payer une nouvelle taxe.

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Claude Villeneuve, chef de l’opposition officielle

Le prix des vignettes de stationnement, qui était encore de 80 $ en 2022, va passer à 150 $ en 2024. La deuxième vignette à une même adresse coûtera quant à elle 225 $. La Ville invoque le principe d’utilisateur-payeur, puisque chaque case sur rue lui coûte 580 $ d’entretien par année.

Claude Villeneuve a vertement critiqué cette mesure, qui épargne les citoyens des quartiers périphériques de Québec disposant d’une entrée ou d’un garage.

On augmente le coût d’habiter dans un quartier central. Ça impacte les gens en appartement, qui ont un loyer. C’est exactement le contraire de ce qu’on veut faire. Je n’aime pas ces mesures-là qui touchent des gens qui font déjà leur part.

Claude Villeneuve, chef de l’opposition officielle

Le chef de la deuxième opposition, Patrick Paquet, croit qu’il s’agit « un peu de la guerre à l’auto ».

L’administration Marchand instaure par ailleurs l’enregistrement obligatoire des chats. La mesure doit toucher les 12 000 félins de la capitale et rapporter 145 000 $. Le coût d’enregistrement de chaque « minou » n’est pas encore connu, mais il en coûte actuellement 11 $ par animal dans le programme d’enregistrement facultatif de la Ville.

Une « claque au visage »

Si la hausse de taxes a été maintenue sous la barre des 4 % pour les propriétaires résidentiels, elle sera de 4,7 % en moyenne pour les immeubles non résidentiels.

« Une augmentation des taxes commerciales de 4,7 %, plus élevée que les taxes résidentielles pour les citoyens, n’est pas un cadeau, mais une claque au visage des entreprises », a réagi François Vincent, vice-président pour le Québec à la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante.

Le maire de Québec s’est défendu en expliquant qu’« il était hors de question de tout transmettre ça aux citoyens ».

Cette hausse est particulièrement frappante dans la mesure où le maire Marchand s’était engagé en campagne électorale à chouchouter les commerçants. Une étude la firme KPMG commandée par l’administration Labeaume en 2021 avait conclu que Québec arrivait en queue de peloton parmi les grandes villes canadiennes en matière d’impôt foncier.

Un milliard en vain pour le tramway ?

Le budget 2024 a aussi permis de constater que les dépenses pour le tramway se poursuivent, même si le gouvernement Legault menace d’abandonner le projet.

La Ville de Québec aura dépensé ou se sera engagée à hauteur de 613 millions d’ici la fin 2023. Ces dépenses couvrent des travaux de voirie en vue de l’arrivée du tramway ou des expropriations. La Ville avait reçu l’accord du gouvernement pour sortir le chéquier. C’est d’ailleurs Québec qui doit éponger ces factures.

Or, d’ici la fin de 2025, les dépenses ou engagements pourraient atteindre 925 millions, a indiqué le maire, mercredi, que le projet se fasse ou non.

« Est-ce qu’on va se rendre au 925 ? Ce sont des négociations qui ont lieu. On verra », a lancé Bruno Marchand, qui a rappelé que plusieurs contrats avaient été accordés et que la Ville ne pouvait reculer.

Le gouvernement Legault a-t-il pris la pleine mesure de sa décision au moment de confier à la Caisse de dépôt le mandat de trouver le meilleur moyen de transports en commun structurant pour la capitale, mettant en péril le tramway ?

« Non. Je suis convaincu qu’au moment où ils ont pris la décision, ils n’avaient pas la pleine mesure », a répondu M. Marchand.