Des centaines de déplacés des incendies de forêt pourront retrouver leur domicile dans les prochains jours, voire les prochaines heures, a annoncé le ministre de la Sécurité publique, François Bonnardel, lundi. À Lebel-sur-Quévillon, un incendie reste toutefois « immensément important » et des risques accrus de foudre pourraient rallumer des incendies prochainement.

Le ministre Bonnardel s’est quand même voulu rassurant pour « Lebel ». L’incendie au nord-est de la municipalité est contenu et les vents s’avéraient favorables lundi. Les résidants qui sont évacués depuis 10 jours devront toutefois prendre leur mal en patience.

« Le souci à Lebel-sur-Quévillon avec cet immense feu sur le territoire, c’est l’usine Nordic Kraft. Dans le secteur, on peut dire que c’est à cause de cette usine que l’on doit prendre toutes les précautions nécessaires », a-t-il déclaré lors de la conférence de presse à La Sarre. L’importante usine de pâte abrite notamment des produits chimiques.

À l’inverse, le ministre a dit espérer annoncer très prochainement de « bonnes nouvelles » aux résidants de Normétal, Saint-Lambert, Beaucanton et Val-Paradis, en Abitibi-Témiscamingue. Il a toutefois précisé que ce sont les municipalités, avec l’aval de la Société de protection des forêts contre le feu (SOPFEU), qui auront le dernier mot et qui autoriseront le retour de leurs résidants.

Le ministre s’est dit encouragé par les précipitations qui étaient attendues d’ici lundi soir ou ce mardi matin dans la région. La pluie devrait durer de 36 à 48 heures.

Or, plus tôt dans la journée de lundi, Environnement et Changement climatique Canada avait présenté un portrait moins optimiste pour les prochains jours.

Des quantités peu significatives de pluie et des risques accrus de foudre pourraient rallumer des incendies de forêt, a expliqué Gérald Cheng, expert météorologue à l’Agence canadienne sur le climat, lors d’une conférence de presse virtuelle.

« Les quantités de précipitations ne seront pas suffisantes pour éteindre les feux. Et la pluie sera accompagnée d’averses, fort possiblement [aussi] de la foudre, ce qui est propice à allumer de nouveaux incendies de forêt », a-t-il dit.

La situation s’améliore dans l’Est

François Bonnardel a profité de sa conférence pour souligner que la situation dans l’est de la province, comme à Sept-Îles, s’est grandement améliorée dans les derniers jours. La qualité de l’air est aussi meilleure dans plusieurs régions, quoique les personnes avec des problèmes de santé devraient toujours réduire leurs activités à l’extérieur, a-t-il dit.

Le ministre de la Sécurité publique a estimé que les incendies de forêt coûteront plusieurs dizaines de millions de dollars à l’État. Un bilan sera nécessaire à la fin de la saison, notamment pour évaluer si des tranchées permanentes devront être aménagées autour des villes bordées de forêts.

À date, on a gagné le combat. Ça n’a pas été simple pour les gens, mais on a gagné le combat. Il n’y a pas de blessés, pas de décès et aucune résidence principale au Québec n’a brûlé.

François Bonnardel, ministre de la Sécurité publique

M. Bonnardel a précisé que la lutte pourrait néanmoins durer tout l’été.

Présent lors de la conférence de presse, le ministre responsable de la région de l’Abitibi-Témiscamingue, Mathieu Lacombe, a dû expliquer son absence de la place publique depuis le début de la crise des incendies de forêt. « Je ne pense pas que dans une crise comme celle-là que c’est une bonne idée de multiplier les porte-paroles. Je pense aussi qu’on doit regarder le travail gouvernemental dans son ensemble, pas seulement individuellement », s’est défendu celui qui est également ministre de la Culture et des Communications.

À Chibougamau, les 7500 résidants ont reçu l’autorisation, lundi, de réintégrer leur maison. Ils avaient dû quitter la ville le 6 juin en soirée.

La route 167 a été rouverte à la circulation à 8 h et les premiers véhicules ont été escortés par des patrouilles de la Sûreté du Québec. La circulation est restée fluide, contrairement à mardi soir dernier, quand la ville a été évacuée. Des citoyens avaient mis plus de sept heures pour rejoindre Roberval alors que le trajet prend normalement trois heures.

Vers 15 h, environ 3000 personnes avaient retrouvé leur domicile.

« Ç’a super bien été. Tout le monde était au poste. Tout le monde a circulé avec prudence », a annoncé Manon Cyr, mairesse de Chibougamau, lors d’une conférence de presse.

Le ministère des Ressources naturelles et des Forêts (MRNF) a également décidé de modifier l’interdiction de faire des feux à ciel ouvert en forêt, lundi, compte tenu des conditions météorologiques qui ont évolué dans les régions situées au sud du fleuve Saint-Laurent.

L’interdiction demeure toutefois en vigueur partout au nord du fleuve.

Le MRNF a également annoncé la levée partielle de l’interdiction d’accès en forêt sur les terres du domaine de l’État dans certaines régions.

Consultez la carte des secteurs visés par l’interdiction de faire des feux à ciel ouvert

Les incendies de forêt au Québec en chiffres

  • 127 incendies actifs
  • 34 incendies combattus par les pompiers
  • 880 pompiers sur le terrain ou dans les airs
  • 19 avions-citernes survolant les incendies
  • 72 hélicoptères soutenant les pompiers

Témoignages de déplacés

De retour à la maison à Chibougamau

« Tout ça est surréel », lance Kristina Tremblay alors qu’elle roule sur la route 167 vers la maison qu’elle a quittée six jours plus tôt. La femme de 28 ans a fui Chibougamau mardi soir dernier, avec son conjoint et leur golden retriever. Ils ont trouvé refuge chez la mère de Kristina Tremblay, à Saint-Honoré, au Saguenay. « On a eu de bons moments en famille, mais ç’a été très anxiogène de ne pas savoir quand on pourrait revenir à la maison et de penser qu’on pourrait tout perdre dans le feu », explique-t-elle.

PHOTO FOURNIE PAR KRISTINA TREMBLAY

Kristina Tremblay et Michael Tremblay sur le chemin du retour à la maison

Lueur d’espoir à Normétal

Avec la pluie annoncée dans les prochains jours, des résidants de Normétal voient enfin le bout du tunnel, raconte Cindy Perreault. Il y a neuf jours, cette résidante du village abitibien s’est réfugiée chez des amis avec son conjoint et leurs trois enfants de 11 mois, 2 ans et 4 ans. « C’était assez stressant ! On a des caméras de sécurité à notre maison et on voyait les pompiers qui arrosaient dans notre rue parce que le feu était proche. On suivait ça à distance », raconte-t-elle. L’incendie s’est en effet approché à moins de 500 mètres de certaines habitations, dont la sienne.

PHOTO FOURNIE PAR CINDY PERREAULT

Cindy Perreault et sa famille

Lassitude à Lebel-sur-Quévillon

À Lebel-sur-Quévillon, ça fait 11 jours que les résidants ont dû évacuer en toute vitesse. Il y a lassitude. Afin de fouetter ses troupes, le maire Guy Lafrenière a rassemblé ses citoyens lundi près d’un centre d’hébergement de Senneterre. Dans l’urgence, Kate Gosselin, 43 ans, a quitté son logis sans son quadriporteur et son chat. « Je suis une personne résiliente, mais j’ai eu peur de devoir être évacuée par ambulance. Par chance, j’ai été prise en charge par de la famille. J’ai lancé un appel à tous pour un emprunt de quadriporteur, ou un triporteur, peu importe, je n’ai toujours pas trouvé. Nous vivons tous un grand stress. »

PHOTO FOURNIE PAR KATE GOSSELIN

Kate Gosselin