(Québec) Pressé par les partis de l’opposition de trouver une solution à la crise du logement, François Legault a plaidé en faveur du libre marché et croit que les baisses d’impôt qu’il a offertes aux Québécois vont leur permettre d’économiser pour s’acheter une maison.

« Nous, on pense que la meilleure façon, c’est de mettre de l’argent dans le portefeuille des Québécois », a lancé le premier ministre lors de l’étude des crédits budgétaires du ministère du Conseil exécutif, mercredi.

M. Legault estime donc qu’en attirant des entreprises, ce qui permet d’offrir de « meilleurs salaires » aux travailleurs, et en accordant des baisses d’impôt, il met plus d’argent dans les poches des acheteurs pour qu’ils soient « capables de se payer une maison ».

L’an dernier, le gouvernement Legault a livré comme promis des baisses d’impôt pour 4,6 millions de Québécois, une baisse moyenne de 370 $ par année.

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Le chef parlementaire de Québec solidaire, Gabriel Nadeau-Dubois

Le chef parlementaire de Québec solidaire, Gabriel Nadeau-Dubois, a rétorqué que tandis que les salaires ont augmenté de 24 % depuis l’arrivée au pouvoir de la CAQ, le « prix médian des maisons entre 2019 et 2024 a augmenté de 68 % ». « Autrement dit, depuis qu’il est premier ministre, le prix des maisons a augmenté trois fois plus vite que le salaire des Québécois », a-t-il déploré.

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Le chef par intérim du Parti libéral, Marc Tanguay

Le chef par intérim du Parti libéral, Marc Tanguay, a affirmé de son côté que « ça prend du logement qui sorte de terre », et pas juste du logement social. Il a souligné que son parti propose par exemple de retirer la TVQ sur les matériaux de construction.

L’immigration, une « bombe », dit Legault

M. Legault a répondu qu’il ne souhaitait pas intervenir dans la construction de maisons. Il a toutefois montré du doigt la hausse importante du nombre d’immigrants temporaires au Québec pour expliquer la hausse du coût des maisons. Entre 2021 et 2023, le nombre de travailleurs étrangers temporaires passant par le programme québécois est passé de 29 000 à 65 000, ce qui n’est pas un problème, a dit M. Legault.

Le « problème majeur », ce sont les 178 000 demandeurs d’asile, a-t-il ajouté, et l’ensemble des 495 000 immigrants temporaires que le Québec ne contrôle pas. « C’est une bombe qui est gérée par Ottawa », a lancé le premier ministre.

« Il y a actuellement un débalancement entre la demande et l’offre. Les prix explosent. On se retrouve dans une situation où il faut faire du rattrapage, a dit M. Legault. On n’y arrivera pas si on ne diminue pas la demande. »

Prix d’un loyer

Par la suite, il s’est montré irrité lorsque le chef libéral Marc Tanguay a tenté de le coincer en lui demandant le prix du loyer d’un quatre et demie à Montréal. En 2021, le premier ministre s’était retrouvé sur la sellette après avoir dit, lors du même exercice de reddition de comptes, que le prix d’un appartement à louer à Montréal commence à « 500, 600 $ par mois », mais qu’il « peut rapidement monter à 1000 $ ».

« Vous voulez faire une Manon Massé de vous-même », a-t-il lancé à Marc Tanguay. M. Legault a donc tout d’abord refusé de répondre, et a demandé à son équipe de chercher la bonne information. Lorsque Dominique Savoie, secrétaire générale et greffière du Conseil exécutif, lui a présenté des documents, M. Legault a dit : « On me donne un chiffre, mais je pense que c’est plus haut que ça. »

Lors de cet exercice, M. Legault a réitéré son désir de solliciter un troisième mandat auprès des Québécois en 2026, et n’a pas exclu de prendre position pour appuyer un parti politique fédéral lorsque des élections auront lieu, probablement en 2025.

Brève apparition de St-Pierre Plamondon

De son côté, le chef péquiste Paul St-Pierre Plamondon a fait une brève apparition durant cette séance de trois heures. Il est arrivé au milieu de l’exercice et a commencé son intervention en soulignant le peu de temps qu’il avait. « Vous êtes chanceux, je n’ai que 12 minutes », a-t-il lancé au premier ministre.

M. St-Pierre Plamondon a demandé à M. Legault s’il allait militer pour le camp du Oui en cas d’échec de la troisième voie. Le premier ministre n’a pas voulu répondre directement à la question, mais a souligné qu’il ne baissait pas les bras et comptait aller chercher plus de pouvoirs à Ottawa, tout en critiquant les positions passées et changements de cap de M. St-Pierre Plamondon.

Ce dernier n’a pas apprécié ces propos, affirmant à la fin de l’échange que « l’exercice consiste du côté du premier ministre à lire des citations aléatoires ».

« Je sais que ça choque le chef du PQ, mais il a déjà dit qu’il avait un malaise avec le nationalisme, que le déclin du français n’existait pas, que la loi 101 au cégep n’était pas une bonne idée. Quelle crédibilité a-t-il aujourd’hui ? », a répondu M. Legault pendant que M. St-Pierre Plamondon quittait la salle. Le directeur des communications du chef péquiste a expliqué par la suite qu’il avait des engagements.

Quelques minutes plus tard, Gabriel Nadeau-Dubois a pris la parole : « Je promets que je ne m’en vais pas si jamais je n’aime pas vos réponses », a-t-il lancé au premier ministre, qui a ri.

La CAQ critique une campagne de financement du PLQ

Le gouvernement Legault a profité de l’étude des crédits budgétaires pour critiquer le Parti libéral, qui fait selon lui campagne sur le dos des agriculteurs pour récolter des fonds.

Dans une lettre écrite au « je » diffusée par la CAQ, le député libéral André Fortin écrit : « Plusieurs agriculteurs, au moment où j’écris ces lignes, n’ont que très peu de liquidités. » Il ajoute qu’il a manifesté auprès des agriculteurs. Puis, il invite à « donner dès maintenant pour nous aider à défendre les intérêts de nos agriculteurs québécois contre l’inaction du gouvernement de la CAQ ».

« C’est quand même incroyable. Jamais je n’oserais dire : on va utiliser la crise en agriculture pour collecter de l’argent pour le Parti libéral du Québec. C’est une insulte, à mon avis, aux agriculteurs. Je n’en reviens pas que le député de Pontiac accepte de mettre sa photo […] C’est gênant », a dénoncé François Legault.