Les milieux politique et journalistique ont été bouleversés d’apprendre la mort de l’ex-ministre et constitutionnaliste Benoît Pelletier, survenue le 30 mars, au Mexique.

« Benoît Pelletier était brillant, généreux et courtois. Il avait à cœur le Québec et la défense de notre langue », a écrit le premier ministre François Legault sur X.

Comme juriste et comme politicien, Benoît Pelletier, qui était âgé de 64 ans, « a joué un rôle essentiel dans le renforcement du statut du Québec au sein du Canada et à l’étranger, a écrit l’ex-premier ministre Jean Charest. Il laisse un héritage politique inestimable ».

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Jean Charest et Benoît Pelletier, le 18 février 2005, à l’occasion d’un remaniement ministériel

Né à Québec en 1960, il est devenu passionné de politique à 9 ans, quand son père a été élu conseiller municipal. Il n’avait rien de l’adolescent typique, a-t-il déjà raconté en riant en entrevue, disant que sa chambre était alors tapissée de grandes photos ou d’affiches de Robert Bourassa, de Pierre Elliott Trudeau et du Parti libéral.

Élu député du Parti libéral dans Chapleau en 1998, puis réélu en 2003 et en 2007, M. Pelletier a été ministre de 2003 à 2008, notamment des Affaires intergouvernementales canadiennes et de la Francophonie. Après sa carrière politique, il a été professeur de droit à l’Université d’Ottawa.

Il a aussi été généreux de ses éclairages dans les débats publics, agissant régulièrement comme analyste dans les médias. Encore à la fin de février, il a passé de longues heures à commenter à chaud et en direct la victoire en Cour d’appel du gouvernement québécois dans le dossier de la Loi sur la laïcité de l’État.

Il était « une référence en droit constitutionnel », a relevé Marc Tanguay, chef du Parti libéral du Québec.

Son talent politique et son dévouement en tant qu’avocat et professeur à l’Université d’Ottawa ont inspiré beaucoup d’entre nous. Érudit, grand orateur et toujours prêt à aider, il restera un modèle pour nous tous.

Marc Tanguay, à propos de Benoît Pelletier

Dominique Anglade, ex-cheffe du Parti libéral du Québec, dit garder « en mémoire son immense volonté de porter la nation québécoise haut et fort ».

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Benoît Pelletier, en octobre 2005

Le Centre de la francophonie des Amériques a souligné que M. Pelletier avait été son « idéateur » et son « ardent promoteur ». « Le départ si soudain de notre fidèle ami Benoît Pelletier est une lourde perte pour toutes les personnes qui militent pour la promotion d’une francophonie plurielle et inclusive.

« Nous avons le devoir de tout mettre en œuvre pour que sa vision d’une pérennité du fait français pour les générations à venir se concrétise. »

Miraculé de la COVID

Dans son communiqué, la famille – qui n’a pas indiqué la cause de la mort – souligne que M. Pelletier avait survécu à la COVID-19 « qui l’a frappé sans merci en 2021 », obligeant les médecins à le plonger dans un coma artificiel de 56 jours.

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John Godfrey, Paul Martin, Jean Charest et Benoît Pelletier, en juin 2005

Ses proches lui avaient alors même fait leurs adieux. Sa fille Françoise Goulet-Pelletier avait dévoilé ce qui arrivait à son père dans une lettre touchante qui avait été publiée dans La Presse, laquelle avait suscité une vague de soutien et d’hommages de toutes parts.

Lisez le témoignage « Devenir cet autre »

En entrevue à Radio-Canada en septembre 2021, Benoît Pelletier avait dit qu’il avait alors « déjoué les probabilités », les médecins étant convaincus qu’il ne pourrait pas s’en tirer. Il vivait depuis lors avec des poumons toujours affaiblis, mais il continuait de mener une vie active.

« Autonomiste » avant l’heure

En novembre 2001, M. Pelletier avait rédigé un rapport intitulé « Un projet pour le Québec, affirmation, autonomie et leadership », qui est devenu le fer de lance du plan d’action du gouvernement Charest en matière d’affaires intergouvernementales.

Sa famille a rappelé par voie de communiqué que M. Pelletier « a toujours défendu un fédéralisme évoluant dans le respect des deux paliers de gouvernements et participé aux débats sur le rôle du Québec au sein du Canada et à l’international ».

En entrevue avec Le Devoir en 2007, il a déclaré qu’il n’hésiterait pas à se définir « comme autonomiste ».

Au micro de Michel Lacombe, à Radio-Canada, en 2021, il notait l’ironie de se savoir considéré comme un grand constitutionnaliste alors qu’il avait passé sa carrière « à chercher des voies non constitutionnelles d’assurer l’essor du Québec au sein du Canada ».

Détenteur de deux doctorats en droit, M. Pelletier était membre de l’Ordre du Canada, Officier de l’Ordre national du Québec et Grand citoyen de l’Ordre de Gatineau.

M. Pelletier était « affable, généreux, modéré et en pleine maîtrise de ses dossiers », a commenté Sébastien Bovet, journaliste à Radio-Canada.

C’était « un gentleman », a résumé Les Perreaux, rédacteur en chef d’Options politiques et ex-journaliste au Globe and Mail.