(Québec) Le chef du Bloc québécois Yves-François Blanchet a profité du conseil général de son parti à Québec pour décocher plusieurs flèches à l’endroit du premier ministre du Québec François Legault – sans le nommer – alors que ce dernier vient de subir un nouveau revers de la part d’Ottawa en matière d’immigration et que le gouvernement a annoncé un déficit de 11 milliards dans son dernier budget.

« Mon travail, c’est de dire que ce déficit, il est abyssal, mais il est surtout fédéral, car le responsable, il est fédéral […]. C’est 11 milliards, car on ne dit pas qu’Ottawa doit sept milliards (pour les transferts en santé) au Québec, drette-là ! Expliquez-moi pourquoi ça prend un parti indépendantiste à Ottawa et son frère au Québec pour dire au gouvernement : “vous avez un trou de sept milliards, car vous ne réclamez pas et vous ne le dites pas” », a lancé le chef bloquiste devant quelque 250 militants réunis à l’Université Laval.

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« C’est ce qui arrive quand on s’engage à être fédéraliste. Quand on promet de ne pas faire de référendum sur la souveraineté, on mange une tape derrière la tête. On se fait dire non et on se fera toujours dire non », a ajouté Yves-François Blanchet.

Le premier ministre du Québec a dit jeudi qu’il allait demander tous les pouvoirs en matière d’immigration à son homologue fédéral, Justin Trudeau. Le lendemain, le premier ministre canadien a refusé la demande de M. Legault.

« Avoir tous les pouvoirs en immigration, ce n’est qu’un début, parce que ce qu’on veut, c’est tous les pouvoirs, point. Sans rapport de force, on se fait dire non », a renchéri Yves-François Blanchet.

« Nous, ici, dans cette salle, quand on nous dit non à ce qui nous revient de bon droit, on se lève debout et on se bat », a-t-il ajouté.

« La stratégie n’a pas marché »

Il y a quelques semaines, François Legault a remis en question l’utilité du Bloc. « À quoi ça sert le Bloc québécois à Ottawa ? Ça sert à quoi ? Ça sert à quoi ? », a lancé le premier ministre en période de questions au Salon bleu.

Malgré les propos du chef caquiste, Yves-François Blanchet a assuré qu’il n’y « a pas d’acrimonie » entre les deux hommes.

PHOTO JACQUES BOISSINOT, LA PRESSE CANADIENNE

Yves-François Blanchet

« C’est de faire le constat froid et rationnel à l’effet que la stratégie n’a pas marché, ni en termes de transfert en santé, ni en termes de récupération de l’argent en immigration, ni en termes de seuils d’immigration », a précisé le chef bloquiste en point de presse après son discours.

Des militants rencontrés par La Presse Canadienne abondaient dans le même sens que leur chef. « Je pense que ça montre que le projet de François Legault, ça ne mène nulle part. La seule façon d’avoir un contrepoids par rapport au fédéral, c’est le projet d’indépendance », a dit Ismaël Lamoureux.

« François Legault n’arrête pas de répéter que c’est une coalition avec supposément autant de péquistes que de libéraux. Je pense que ce sont les libéraux au sein de la CAQ qui ont le plus de poids par rapport aux péquistes. Donc quand on vient défendre des idées face au fédéral et qu’on est libéral à la base, ben on s’écrase », a soutenu Daniel Rochon.

« Je pense qu’habituellement on essaie de se garder une petite gêne pour laisser Québec faire ce qu’il a à faire, mais quand on se fait attaquer parfois il faut répondre. Donc je pense que c’était de bonne guerre et que c’était fait au bon endroit. Les pointes n’ont pas été faites en plein parlement, par exemple », a pour sa part affirmé Simon Grenier qui milite dans Montarville.

« Quand tu veux conquérir un pays, tu commences par sa capitale »

Le Bloc souhaite visiblement être prêt à d’éventuelles élections fédérales – ce qui est possible à tout moment en raison du gouvernement libéral minoritaire à Ottawa – et la ville de Québec sera vraisemblablement un champ de bataille important. Vendredi soir, le chef bloquiste a annoncé son premier candidat en vue du prochain scrutin. Il s’agit de Simon Bérubé qui va représenter le parti dans la circonscription de Québec.

« Pourquoi on est encore à Québec, à part pour l’investiture de Simon Bérubé ? Quand tu veux conquérir un pays, tu commences par sa capitale […] C’est aussi parce qu’on s’y sent bien et ce n’est pas pour un match des Nordiques et encore moins des Kings », a affirmé Yves-François Blanchet lançant une autre pointe au premier ministre caquiste qui a été accueilli par des rires dans l’assistance.

Le gouvernement Legault a été embourbé dans une controverse après l’annonce en novembre dernier d’une subvention de 5 à 7 millions pour deux matchs préparatoires des Kings de Los Angeles au Centre Vidéotron à Québec.

« Mouvement irrésistible vers l’indépendance »

Le chef du Parti québécois (PQ), Paul St-Pierre Plamondon, devait aussi prendre la parole au conseil général du Bloc, mais il a annulé sa présence vendredi soir.

Malgré l’absence de leur chef, les députés péquistes Joël Arseneau et Pascal Paradis étaient sur place. Leur présence a été chaudement soulignée par des applaudissements nourris. Le nouveau député de Jean-Talon a d’ailleurs fait une allocution pour galvaniser les militants bloquistes réunis à l’Université Laval.

« Il y a un mouvement irrésistible vers l’indépendance du Québec et ce mouvement irrésistible, il est très fort dans la Capitale-Nationale du Québec », a lancé Pascal Paradis à une foule déjà conquise.

Alors que les conservateurs de Pierre Poilievre caracolent dans les sondages, le Bloc québécois est toujours premier au Québec, selon l’agrégateur de sondages 338Canada. En plus du comté de Québec, le chef bloquiste a fait la liste de plusieurs circonscriptions qui sont dans sa mire comme Châteauguay—Lacolle, Gaspésie—Les Îles-de-la-Madeleine, Brome – Missisquoi, Hochelaga ou encore Chicoutimi – Le Fjord.