(Ottawa) Tout est en place pour que les 440 ressortissants canadiens et leurs proches qui sont coincés dans la bande de Gaza puissent traverser la frontière vers l’Égypte au cours les prochains jours, indique la ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly. Et parce qu’Ottawa ne veut pas jouer dans le même film qu’en 2006, elle exhorte encore une fois les Canadiens à quitter le Liban.

Ce n’est pas la première fois depuis le début de la guerre que le Canada laisse entrevoir la possibilité que le poste frontalier de Rafah s’ouvre pour laisser passer ses citoyens, ses résidents permanents et leurs proches.

Cette fois-ci est-elle la bonne ?

« Au cours des prochains jours, j’ai confiance que les Canadiens vont sortir », répond la ministre dans un entretien accordé à des journalistes de La Presse, jeudi.

PHOTO RYAN REMIORZ, LA PRESSE CANADIENNE

Mélanie Joly

Tout le monde est prêt. On attend juste l’autorisation du côté israélien.

Mélanie Joly, ministre des Affaires étrangères

Elle refuse cependant de fixer un échéancier, à l’heure où de plus en plus de citoyens étrangers parviennent à fuir l’enclave – jeudi, c’était au tour de 74 binationaux américains de fouler le sol égyptien.

L’entente conclue avec Israël et l’Égypte doit permettre l’évacuation de quelque 7000 ressortissants étrangers, au rythme d’environ 1000 par jour, explique la cheffe de la diplomatie canadienne.

Les quelque 440 personnes du contingent canadien qui ont demandé l’assistance du gouvernement seront attendues de l’autre côté du poste de Rafah par du personnel de l’ambassade d’Ottawa au Caire.

Une fois arrivés dans la capitale égyptienne, ils n’auront pas la permission de rester en Égypte : il leur faudra rentrer au Canada à bord de vols commerciaux, précise la ministre.

Elle ne va pas jusqu’à qualifier le contexte de trêve humanitaire, préférant parler de « détente ».

Par ailleurs, une fois les ressortissants étrangers évacués de la bande de Gaza, il faudra trouver un moyen de faire libérer les quelque 200 personnes retenues en otage par le Hamas.

C’est le Qatar qui est responsable de cette négociation.

Le Canada, pour l’heure, continue à résister aux appels à un cessez-le-feu.

Au moins 50 députés de tous les partis à la Chambre des communes, dont l’entièreté du caucus du Nouveau Parti démocratique, pressent le gouvernement Trudeau d’exiger une cessation des hostilités.

« Un cessez-le-feu, ça arrive quand deux parties, normalement des États, négocient et arrivent à une entente. La difficulté qu’on a présentement, c’est qu’on a un État et une organisation terroriste », plaide Mélanie Joly.

Et Israël, d’où le feu vient en ce moment, doit agir dans le respect du droit international, dit-elle en évoquant aussi le principe de proportionnalité.

« La manière dont Israël mène la guerre doit être conforme à ce droit international. Et c’est important que sa réponse ne soit pas la souffrance de tous les civils palestiniens », insiste-t-elle.

Liban : éviter le même film que 2006

Si le conflit devait déborder au Liban, l’opération de rapatriement serait d’une complexité considérable, argue Mélanie Joly.

Les craintes d’un embrasement régional sont vives ; Israël a annoncé avoir lancé une « vaste frappe » dans le sud du Liban sur des cibles du mouvement libanais Hezbollah, allié du Hamas, jeudi.

« Là, il y a 17 000 Canadiens au Liban enregistrés auprès d’Affaires mondiales Canada. On pense qu’il y en a entre 45 000 et 50 000 », expose la ministre.

« S’il fallait procéder à une évacuation, ce serait la plus grosse évacuation de notre histoire », ajoute-t-elle.

Même si Ottawa a échafaudé des plans d’évacuation à partir de Chypre, et potentiellement de la Turquie, le message reste le même : il faut quitter le Liban, réitère la ministre.

Les mots évacuation, Canadiens et Liban rappellent de mauvais souvenirs : en 2006, lors du conflit entre l’État hébreu et le Hezbollah, l’opération de rapatriement des Canadiens avait été chaotique.

« On a appris de 2006. Donc les messages sont clairs », exprime Mme Joly.

« Les gens doivent préparer dès maintenant tout ce qui est nécessaire pour arriver au Canada, parce qu’on ne pourra pas nécessairement faire des tests biométriques, mais on va les réclamer », prévient-elle.

avec l’Agence France-Presse