(Drummondville) Les municipalités qui veulent abaisser la limite de vitesse sur une route relevant du gouvernement provincial sur leur territoire auront plus facilement l’oreille du ministère des Transports, selon un projet de loi qui sera déposé cette année par Geneviève Guilbault, ministre des Transports et de la Mobilité durable.

Ce qu’il faut savoir

Québec veut donner plus de latitude aux municipalités en matière de sécurisation.

Le premier sommet « Piétonnes et piétons avant tout » s’est déroulé cette semaine à Drummondville sur fond d’aggravation du bilan routier.

Plusieurs municipalités, dont Strasbourg, en France, découvrent les vertus d’une ville où les déplacements à pied sont en hausse.

« Dans plusieurs municipalités où je me rends, on me dit qu’on veut modifier la limite de vitesse, mais qu’on doit demander l’approbation [au Ministère] », a dit mardi la ministre Guilbault à La Presse.

Mme Guilbault compte déposer le premier plan d’action sur les relations entre le ministère des Transports et de la Mobilité durable et les municipalités, qui va entre autres « réviser le processus ministériel de traitement des demandes municipales de modification des limites de vitesse », dans les mots du Ministère.

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Geneviève Guilbault, ministre des Transports et de la Mobilité durable

« Ça va être déposé avant la fin de l’année, dit Mme Guilbault. On a eu des discussions avec les unions municipales qui se disent très satisfaites de ce plan-là, donc ça va aller dans le sens de donner plus de pouvoir d’autonomie aux villes toujours en ayant un cadre évidemment pour ne pas faire n’importe quoi, n’importe où. »

La ministre s’exprimait en marge du sommet « Piétonnes et piétons avant tout : agir ensemble pour un Québec qui marche », organisé par Piétons Québec, qui réunissait 200 participants au Centrexpo Cogeco de Drummondville, lundi et mardi. Il s’agit du premier sommet portant sur les questions piétonnes dans la province, et il a lieu alors que le bilan routier se détériore pour les usagers de la route les plus vulnérables.

Un total de 79 piétons a perdu la vie l’an dernier au Québec, une hausse de 22,7 % des décès par rapport à 2021. Les enfants et les personnes âgées sont surreprésentés chez les morts et les blessés graves par rapport à leur poids démographique.

Catherine Fournier, mairesse de Longueuil, l’une des panélistes du sommet, a parlé de l’importance pour les élus de placer les besoins des enfants et des adolescents au centre des décisions liées à l’aménagement de la voie publique.

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Catherine Fournier, mairesse de Longueuil

« Si, par exemple, on veut retirer des cases de stationnement pour ajouter une piste cyclable, les gens que l’on entend dans les consultations publiques sont souvent les gens qui sont contre. Mais les enfants et les adolescents qui vont utiliser cette piste-là pour être autonomes, pour aller à l’école, pour aller au parc, ils ne viennent pas dans les consultations. Et donc, il faut comme élu faire preuve de courage et de vision dans ces dossiers », a-t-elle dit, ajoutant que les aménagements sont utilisés par la population « dès le jour 1 » lorsqu’ils sont accessibles et sécuritaires.

En marge du sommet, Mme Fournier a noté que la prochaine étape pour Longueuil était de voir à l’aménagement des mesures d’apaisement dans tous les quartiers de la ville. « Dans les quartiers plus favorisés, les citoyens ont historiquement demandé et reçu des aménagements sécuritaires, alors que dans d’autres quartiers moins favorisés, il n’y a pas ou peu d’aménagements. C’est ça qu’on veut changer. »

Petite révolution à Strasbourg

Noémie Meyer, chargée de mission thématique vélo de la Ville et Eurométropole de Strasbourg, a énuméré une série de résultats « encourageants » sur le plan des déplacements actifs vécus ces dernières années par la métropole de Strasbourg, qui compte plus de 500 000 habitants.

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Noémie Meyer, chargée de mission thématique vélo de la Ville et Eurométropole de Strasbourg

« Si on regarde des photos de Strasbourg il y a 50 ans, il y avait des voitures partout, dit-elle en entrevue. La voiture était vue comme le moyen de transport du futur dans les villes, et Strasbourg n’y faisait pas exception. »

La première zone piétonne au centre-ville a été aménagée en 1973. Depuis, plusieurs initiatives ont eu lieu pour réduire l’emprise de la voiture sur la voie publique et le nombre de cases de stationnement, et augmenter le nombre de rues piétonnes et de pistes cyclables. Organisé chaque année en juin, le concours « Boulot à vélo » fait se concurrencer les entreprises, qui tentent de gagner en accumulant les kilomètres franchis à vélo par leurs employés. Les gouvernements offrent aussi des subventions à l’achat d’un vélo électrique.

Les résultats sont encourageants, dit Mme Meyer. « La part modale de la voiture diminue, celle des vélos, des transports en commun et de la marche augmente », dit-elle, ajoutant que la voiture sera toujours utilisée, notamment par les personnes à mobilité réduite, seulement pas pour tous les trajets.

Malgré les succès, chaque nouveau projet soulève les passions, ajoute-t-elle.

« Chaque fois qu’on veut piétonniser ou aménager une piste cyclable sur l’emprise réservée à la voiture, on rencontre toujours et encore des résistances. Or, a posteriori, les commerçants et les habitants apprécient et nous demandent pourquoi on n’avait pas fait ça avant. »