(Ottawa) Wab Kinew a fait l’histoire mardi en devenant le premier autochtone issu d’une Première Nation à devenir premier ministre d’une province. Le chef du Nouveau Parti démocratique (NPD) a obtenu un gouvernement majoritaire au terme d’une campagne électorale de 28 jours dominée par la santé. Face à des résultats décevants, les chefs du Parti progressiste-conservateur et du Parti libéral ont annoncé leur démission.

« C’est une grande victoire pour nous tous au Manitoba », a déclaré M. Kinew dans son discours de victoire.

« Beaucoup de gens dans les grandes villes nous regardent de haut ici au Manitoba, a-t-il ajouté. Mais regardez ce que le bon vieux Manitoba a fait ce soir. Le Manitoba a fait quelque chose de plus progressif que toutes ces grandes villes. »

Dès le début de la soirée, les néo-démocrates ont creusé une avance confortable dans de nombreuses circonscriptions de Winnipeg, mais le résultat demeurait si serré dans six comtés que leur victoire a été confirmée par CBC près deux heures et demie après la fermeture des bureaux de scrutin. L’utilisation pour la première fois de tabulatrices pour compter les votes aurait également ralenti le dévoilement des résultats.

La capitale manitobaine compte 32 des 57 circonscriptions de la province. En milieu rural, la carte est demeurée bleue à l’exception de quelques percées orange.

Au moment où ces lignes ont été écrites, les néo-démocrates détenaient 33 circonscriptions, soit 15 de plus qu’à la dissolution de l’Assemblée législative. Les progressistes-conservateurs conservaient 23 sièges, eux qui avaient 35 avant l’élection.

« La victoire historique de M. Kinew doit être reconnue ce soir, a déclaré Heather Stefanson. Wab, j’espère que ta victoire ce soir va inspirer de futures générations de jeunes Autochtones de prendre part à notre processus démocratique non seulement au Manitoba, mais partout au pays. »

La cheffe progressiste-conservatrice, première femme à occuper le poste de premier ministre du Manitoba, a annoncé qu’elle quittait la tête de son parti. « Ça a été l’honneur de ma vie », a-t-elle dit.

C’est donc un retour au pouvoir pour les néo-démocrates après sept années sur les banquettes de l’opposition. Wab Kinew a misé sur la santé pour convaincre les électeurs, le talon d’Achille des progressistes-conservateurs. Ces derniers ont été critiqués pour leurs coupes budgétaires et leur gestion de la pandémie. Les néo-démocrates ont promis notamment de rouvrir trois salles d’urgence, fermées par ses adversaires, et d’embaucher 300 nouvelles infirmières.

Les publicités négatives des progressistes-conservateurs publiées durant la dernière semaine de la campagne électorale n’ont pas réussi à décourager les électeurs. Ils avaient souligné, entre autres, l’inexpérience des néo-démocrates en matière de gouvernance et le passé trouble de leur chef Wab Kinew. Ce dernier a déjà été accusé de violence conjugale, de conduite en état d’ébriété et d’avoir frappé un chauffeur de taxi. Il a toujours nié les accusations de violence conjugale, qui ont été retirées, et a obtenu la suspension de son casier judiciaire pour les autres.

Les progressistes-conservateurs se sont également attiré les foudres du ministre fédéral Marc Miller pour avoir acheté des publicités pour souligner qu’ils rejetaient l’idée d’effectuer des fouilles dans un dépotoir Winnipeg pour retrouver les restes de deux femmes autochtones qui ont été tuées par un meurtrier. Le sujet déchire la population depuis des mois.

Le chef du Parti libéral, Dougald Lamont, a annoncé qu’il quittait la vie politique après avoir perdu son siège dans la circonscription de Saint-Boniface, qui est allé aux néo-démocrates. Le vote libéral s’est effondré si bien que les libéraux qui comptaient trois députés à la dissolution de l’Assemblée législative n’en ont plus qu’un seul. Il s’agit de Cindy Lamoureux, la fille du député fédéral Kevin Lamoureux, qui en est à son troisième mandat.

PHOTO JOHN WOODS, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Le chef du Parti libéral, Dougald Lamont, a annoncé qu’il quittait la vie politique après avoir perdu son siège.

« Parfois vous êtes pris dans une vague et peu importe ce que vous faites, ça ne semble pas faire de différence », a déclaré M. Lamont sans pouvoir cacher sa déception. Il a reconnu que la campagne électorale avait été difficile.

L’ex-député fédéral, Robert-Falcon Ouellette, qui était candidat pour le Parti libéral, a lui aussi mordu la poussière. Il a affirmé en entrevue à Radio-Canada que l’étiquette libérale et le nom de Justin Trudeau lui ont nui durant cette campagne électorale, allant jusqu’à rappeler qu’il avait déjà voté à l’encontre de son parti à la Chambre des communes.

Le NPD a dirigé la province durant près de 17 ans, de 1999 à 2016, d’abord sous Gary Doer. Ce dernier avait été remplacé par Greg Selinger après avoir été nommé ambassadeur du Canada aux États-Unis en 2009. Un poste qu’il a occupé durant sept ans.