(Charlottetown) L’augmentation du coût de la vie, y compris la crise du logement, est la « priorité numéro un » de la retraite du conseil des ministres fédéral qui s’est amorcée lundi à Charlottetown, la capitale de l’Île-du-Prince-Édouard, a indiqué le premier ministre Justin Trudeau.

Il a reconnu lors d’un point de presse qu’« énormément » de jeunes « en arrachent, qui sont incertains qu’ils vont pouvoir s’acheter une maison, qui ne voient pas l’avenir avec autant d’optimisme qu’ils devraient ».

C’est pour cela qu’une « grande emphase » sera mise « sur comment on va faire pour démontrer aux jeunes qu’il y a un avenir extrêmement fort et prospère pour eux et démontrer qu’on est là pour les aider », a-t-il poursuivi.

M. Trudeau s’est défendu de ne pas en faire suffisamment pour aider la classe moyenne. « Au contraire », a-t-il répondu du tac au tac, insistant qu’il a « ancré » ses politiques dans la croissance de ce groupe depuis que son parti est au pouvoir.

« On a livré avec l’allocation canadienne pour enfants. On est en train de livrer avec les centres de petite enfance à travers le pays et on est aussi en train d’investir massivement en logement. Mais bien sûr il y a plus à faire », a-t-il dit.

Le coût du logement, y compris à l’achat et à la location, a augmenté beaucoup plus rapidement que les salaires ces dernières années. On estime que le Canada doit au moins tripler le rythme auquel il construit de nouvelles maisons pour tenter de maîtriser le problème.

Lorsqu’il a procédé à l’important remaniement ministériel, M. Trudeau a souligné que ses objectifs étaient de mettre en place une équipe capable de faire « des progrès en matière de logement » et de « remettre plus d’argent dans les poches des familles ».

Les auteurs d’un récent rapport national sur le logement seront donc à Charlottetown pour présenter leurs conclusions aux ministres fédéraux et leur mettre de l’avant quelques pistes de solutions pour s’attaquer à la crise.

Devant les journalistes, le ministre du Logement, Sean Fraser, n’a pas nié que cela pourrait se transformer en une liste de tâches.

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Le ministre du Logement, Sean Fraser

« Avant de nous engager à dire : “oui, ces choses à faire spécifiques vont être adoptées […] par le gouvernement fédéral”, je pense que nous devons avoir une conversation avec les auteurs du rapport […] et entre nous (les ministres) pour déterminer la meilleure façon de prioriser les mesures qui auront le plus d’impact le plus rapidement possible. »

Les ministres entendront également le fondateur du groupe de réflexion Generation Squeeze de l’Université de la Colombie-Britannique, qui viendra parler des moyens d’aider les jeunes Canadiens qui se sentent impuissants devant la hausse des prix.

Seuils d’immigration

Questionné à savoir si son gouvernement a suffisamment pris en compte l’enjeu du logement dans sa décision d’augmenter les seuils d’immigration, le premier ministre a répliqué qu’il entend constamment parler du manque de main-d’œuvre, y compris dans l’industrie de la construction, pour suivre la croissance économique.

« Nous continuerons d’être le pays ouvert, accueillant, prospère et en pleine croissance que nous avons toujours été, parce que c’est quelque chose qui a mené à de grandes possibilités et à de la prospérité pour tous les Canadiens », a-t-il affirmé.

En conférence de presse à Ottawa, le chef conservateur Pierre Poilievre a refusé de dire s’il augmenterait les seuils d’immigration ou s’il les maintiendrait à leur niveau actuel.

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Pierre Poilievre

Quant à l’idée de mettre plus d’argent sur la table, M. Poilievre, qui fait presque de l’augmentation du coût de la vie et de la crise du logement son pain et son beurre depuis des mois, dit craindre de « construire de la bureaucratie » avec des « soi-disant programmes de logement ».

« Lorsque j’étais ministre du Logement, le contribuable payait moins pour les programmes de logement, mais le logement était abordable », a-t-il lancé.

La réplique n’a pas tardé à arriver depuis les rangs libéraux. « Pierre Poilievre est habitué de chialer, mais il n’est jamais en mode solution », a envoyé la ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly.

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La ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly

L’élue reconnaît cependant avoir entendu cet été la frustration de la population quant au coût de la vie « parce que c’est vrai que ça coûte cher ».

C’est pour cela que le gouvernement entend agir sur « les enjeux qui touchent les gens dans leur quotidien », a expliqué son collègue ministre de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie, François-Philippe Champagne.

« Les gens nous ont dit : “occupez-vous des affaires qui nous préoccupent de façon quotidienne”, a-t-il dit. C’est ce qu’on va faire. Puis on aura les deux, trois prochains jours pour justement discuter, puis arriver avec un plan. Puis, à la fin, les gens, ce qu’ils veulent, c’est : “action, action, action”. Moi, pour moi, c’est dans la livraison qu’on se définit. »

La retraite du cabinet intervient quelques semaines avant que les députés ne retournent à la Chambre des communes après leurs vacances d’été. Cela fait également moins d’un mois que M. Trudeau a annoncé un remaniement majeur de son cabinet.

Il y a sept nouveaux visages parmi son équipe dirigeante de 38 membres, et 19 autres ont de nouvelles fonctions.

« Dévastation apocalyptique »

Et bien que l’abordabilité et la crise du logement dans le pays doivent être prioritaires dans l’ordre du jour de la retraite de trois jours, M. Trudeau a noté que les incendies de forêt en Colombie-Britannique et dans les Territoires du Nord-Ouest sont une « préoccupation urgente ».

Plus de 30 000 personnes en Colombie-Britannique font l’objet d’ordres d’évacuation alors que de multiples incendies menacent des communautés, notamment la ville de Kelowna, dans le centre de l’Okanagan.

Plus de 20 000 personnes ont été forcées de fuir Yellowknife et plusieurs autres communautés près de Slave Lake dans les Territoires du Nord-Ouest la semaine dernière.

« C’est une période effrayante et déchirante pour les gens », a déclaré M. Trudeau.

Il s’agit de loin de la pire saison des incendies jamais enregistrée au Canada, avec plus de 5800 incendies qui ont brûlé 141 000 kilomètres carrés, une superficie plus grande que toute la Nouvelle-Écosse, le Nouveau-Brunswick et l’Île-du-Prince-Édouard réunis.

Avec des informations de Mia Rabson