(Ottawa) La décision de la Russie de se retirer de l’Initiative céréalière de la mer Noire constitue une « grave escalade de la militarisation de la faim », a fustigé mardi le gouvernement canadien.

« Le Canada condamne fermement la décision de la Fédération de Russie de retirer sa participation à l’Initiative céréalière de la mer Noire négociée par les Nations Unies et la Turquie », ont déclaré les ministres Mélanie Joly, aux Affaires étrangères, et Harjit Sajjan, au Développement international.

« Cette décision réimpose de facto un blocus des ports ukrainiens de la mer Noire, ce qui aura une incidence importante sur les exportations mondiales d’aliments ainsi que sur la sécurité dans la mer Noire », ont-ils aussi déploré dans le même communiqué.

Ainsi la Fédération de Russie doit-elle « renouveler immédiatement sa participation à l’Initiative afin d’éviter tout nouveau choc aux systèmes alimentaires mondiaux déjà mis à rude épreuve par sa guerre d’agression contre l’Ukraine », ont sommé les deux ministres.

Ce geste constitue une « grave escalade de la militarisation de la faim », ont dénoncé Mme Joly et M. Sajjan.

Le Kremlin a signifié lundi son refus de maintenir l’accord céréalier signé en juillet 2022 sous l’égide des Nations unies et de la Turquie, se plaignant d’entraves à ses livraisons de produits agricoles et d’engrais, et estimant qu’il n’avait pas permis autant que prévu de livrer des céréales aux pays pauvres.

En un an, cet accord avait permis de sortir près de 33 millions de tonnes de céréales des ports ukrainiens, essentiellement du maïs et du blé, contribuant à stabiliser les prix alimentaires mondiaux et à écarter les risques de pénurie.

Les critiques fusent, la Russie menace

D’autres pays et organisations ont critiqué Moscou. Le président de l’Union africaine, Moussa Faki Mahamat, l’a fait poliment. « Je regrette la suspension de l’Initiative céréalière de la mer Noire, que l’Union africaine avait soutenue très tôt », a-t-il écrit sur Twitter.

Aux yeux du président français, Emmanuel Macron, il s’agit d’une décision malavisée de la part de Vladimir Poutine. « Il a décidé de faire de la nourriture une arme […] Je pense que c’est une énorme erreur », a-t-il commenté à l’issue d’un sommet à Bruxelles, mardi.

Quant au secrétaire général des Nations unies, António Guterres, il dit craindre les répercussions pour « des centaines de millions de personnes [qui] font face à la faim », et qui vont « payer le prix » de la fin de cet accord qui avait été prolongé à plusieurs reprises depuis juillet 2022.

La Russie, elle, a mis en garde l’Ukraine mardi contre ses velléités de poursuivre les exportations de céréales par la mer Noire, prévenant qu’il n’y avait plus de « garanties de sécurité », et donc des « risques », après l’expiration de l’entente qui permettait de les transporter malgré la guerre.