(Québec) Les élus caquistes ont dû faire acte de contrition aux électeurs de la Capitale-Nationale et de Chaudière-Appalaches après avoir rompu leur engagement phare de construire un troisième lien autoroutier entre Québec et Lévis. En pleurs, Bernard Drainville a présenté ses excuses tandis qu’Éric Caire choisit de rester en poste.

« C’est un sujet très émotif », a lancé le ministre Bernard Drainville en se présentant devant les médias, jeudi.

En pleurs, le député de Lévis a dû s’arrêter avant de reprendre. « Je veux d’abord présenter des excuses aux gens de Lévis et aux gens de Chaudière-Appalaches. J’ai pris un engagement et je ne suis pas en mesure de livrer », a ajouté le ministre.

Le ministre de l’Éducation a affirmé avoir pris un engagement « sincère » et qu’en aucun temps pendant la campagne électorale, il n’a eu une indication que le projet changerait de version. La dernière mouture du troisième lien lui a été présentée lundi, a-t-il dit.

Bernard Drainville maintient que le trafic routier était « malade » l’été dernier. « C’était épouvantable, et j’ai cru sincèrement que le trafic que l’on observait cet été était la nouvelle réalité du trafic à Québec. J’ai réalisé après coup que visiblement, une bonne partie de ce trafic-là était liée aux travaux de l’été dernier [sur le pont Pierre-Laporte] », a fait valoir M. Drainville.

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Le ministre de l’Éducation et député de Lévis, Bernard Drainville

Malgré cette volte-face, il continue de croire « qu’un jour », il y aura un nouveau lien autoroutier entre les deux rives. Il dit se « consoler » avec le fait que le projet reste de centre-ville à centre-ville et qu’il permettra « d’aller chercher plusieurs milliards du fédéral ».

La journée n’a pas été facile pour le ministre de l’Éducation. En après-midi, il a claqué la porte du Salon bleu après avoir accusé la porte-parole libérale en matière d’éducation Marwah Rizqy de « faire la démagogue » lors du débat de fin de séance.

Caire reste en poste

Le ministre Éric Caire avait affirmé en 2018 : « S’il y a un recul de la CAQ, je démissionne. »

Or, il reste en poste, et ira plutôt à la rencontre de ses électeurs pour leur vendre le nouveau projet de tunnel de transport collectif. Que vaut aujourd’hui sa parole ? « Vous parlez de 2018. Les électeurs m’ont renouvelé leur confiance depuis. Ce que vaut ma parole ? Je vais laisser mes électeurs décider de la suite des choses. Je pense que la décision à prendre, c’est le projet que nous présentons aux Québécois », a-t-il dit.

« Les coûts du projet ont changé de façon importante, mais en mon âme et conscience, aujourd’hui, la mathématique fait en sorte que je ne peux pas défendre ce projet », a-t-il ajouté.

Biron « blessée »

« Quand je me suis présentée en politique, je savais que j’aurais des jours un petit peu plus difficiles que d’autres. Je ne m’attendais pas à ce que ça vienne aussi vite, que ce soit aussi brutal », a confié la ministre Martine Biron, élue une première fois en 2022 dans Chutes-de-la-Chaudière. Mme Biron s’est même dite « blessée » après avoir fait campagne sur le troisième lien dans sa circonscription.

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La ministre des Relations internationales et de la Francophonie, Martine Biron

La députée de Bellechasse, Stéphanie Lachance, n’a pas défendu la version du troisième lien présentée jeudi. « Pour Bellechasse, ce n’est pas une formule qui va être gagnante. Bellechasse, vous le savez, c’est un territoire très grand et qui est desservi par l’automobile. Bellechasse, c’est 35 000 citoyens qui circulent en automobile », a-t-elle déploré.

Ce qu’ils ont dit

Ce matin, le troisième lien démontre qu’on ne peut pas se fier à la CAQ. Ils ne sont pas fiables. Ce sont des promesses en l’air, et après cinq ans, c’est 180 degrés. Et ce matin, les ministres n’ont que les yeux pour pleurer.

Marc Tanguay, chef intérimaire du Parti libéral du Québec

La CAQ insiste depuis le début, sept versions avant aujourd’hui, et ça ne se fera pas. Puis, malheureusement, en bout de ligne, il y a peut-être des gens qui ne seront pas contents. Mais la planète, elle, je peux vous le dire, que le projet autoroutier, elle est contente qu’il ne se réalise pas.

Manon Massé, co-porte-parole de Québec solidaire

Lorsque la CAQ a décidé, dans l’opposition, d’appuyer le projet de troisième lien, le critère qui était retenu, ce n’était pas celui de sa faisabilité, ce n’était pas celui de son utilité, c’était celui de sa popularité. C’est le seul qui comptait, et ils se sont dit : si ça marche, puis si on est élus, on s’arrangera après. Aujourd’hui, la réalité rattrape la Coalition avenir Québec.

Pascal Bérubé, député de Matane-Matapédia, Parti québécois