(Québec) Les chefs de partis politiques ont salué le courage de Catherine Fournier, qui a fait le choix de révéler qu’elle est la jeune femme agressée sexuellement par l’ex-député du Parti québécois Harold LeBel, reconnu coupable en novembre dernier. Le chef péquiste, Paul St-Pierre Plamondon, a défendu la gestion de l’affaire au sein du PQ.

L’ordonnance de non-publication qui interdisait aux médias de diffuser le nom de la mairesse de Longueuil, qui était députée péquiste au moment des faits, a été levée mardi matin aux alentours de 9 h, sur ordre d’un juge. C’est la principale intéressée qui avait elle-même demandé que son identité soit rendue publique, disant vouloir franchir une nouvelle étape dans son cheminement.

Elle a expliqué sa décision en affirmant qu’elle souhaitait « faire œuvre utile » en aidant à « démystifier cet inconnu que représente le parcours d’une personne victime d’agression sexuelle à travers le système judiciaire ».

Le chef du Parti québécois (PQ), Paul St-Pierre Plamondon, a été questionné à ce sujet lors d’un point de presse à l’Assemblée nationale. « Si j’ai quelque chose à dire à la victime aujourd’hui, c’est de dire, au terme de ce processus-là qui, sans aucun doute, a dû être douloureux, difficile : j’espère que le fait que justice a été rendue et que le système a fait son travail lui donnera une paix intérieure », a dit M. St-Pierre Plamondon.

Allégations contradictoires

Il a rappelé que lorsque M. LeBel a été arrêté, il a annoncé sa suspension « le jour même » et l’a exclu de la formation politique. Son collègue Joël Arseneau affirme qu’il a appris l’arrestation de M. LeBel avec « surprise, étonnement et incrédulité ». Ils n’avaient jusque-là jamais entendu de rumeurs ou de ouï-dire concernant M. LeBel.

Mais à la suite de l’arrestation de l’ex-député de Rimouski, « dans les jours qui ont suivi, on me donnait des allégations contradictoires, parce que ça a généré beaucoup de discussions », a dit M. St-Pierre Plamondon.

« Il y avait plusieurs personnes dans le parti qui semblaient vouloir rendre justice eux-mêmes », a-t-il ajouté.

Il a donc « demandé à tout le monde de ne pas intervenir ni auprès de la victime ni auprès de l’accusé », qui étaient tous deux députés du Parti québécois au moment où l’agression sexuelle a eu lieu, il y a plus de cinq ans, dans l’appartement rimouskois de M. LeBel.

Il affirme n’avoir lui-même « jamais parlé à Mme Fournier ou à Harold LeBel après les accusations ». Il estime qu’un simple mot d’encouragement à l’endroit de Mme Fournier aurait pu soulever « toutes sortes d’hypothèses, de présomptions ».

Courage et avancée pour les femmes

Le premier ministre François Legault a salué le courage de Catherine Fournier. « Je trouve ça courageux de la part de Catherine d’avoir été jusqu’au bout du processus. Et je pense que c’est un modèle. Évidemment, ce n’est jamais facile pour une femme, une personne, d’aller suivre tout le processus des tribunaux. On essaie avec Simon Jolin-Barrette d’aider le plus qu’on peut les victimes, mais malgré ça, je sais que ce n’est pas un processus qui est facile. Je veux la saluer pour son courage », a-t-il dit.

« Je la trouve forte parce que c’est quand même une jeune leader qui aurait pu continuer de faire son travail à la Ville de Longueuil […], mais elle a décidé de prendre la voix et dénoncer. Elle sort de sa zone de confort pour dénoncer malgré ses occupations. C’est beaucoup de courage et de force personnelle que je trouve chez Catherine Fournier », a fait savoir la ministre responsable de la Condition féminine, Martine Biron.

« Ça me rassure parce que, wow, les femmes commencent à prendre la parole pour dénoncer, pour dire que c’est tolérance zéro et que les agressions, c’est terminé. Alors ça, je trouve que c’est une avancée. Ça nous amène, nous les femmes, à prendre de plus en plus notre pouvoir en main, et c’est une très bonne action », a-t-elle ajouté lors de son arrivée à la période des questions.

« Ça envoie un message très clair aux différentes victimes au Québec, que c’est important de dénoncer et dans ce cas-là, justice a été rendue », a exprimé le ministre de la Justice, Simon Jolin-Barrette. « Je pense qu’on doit souligner le courage de Mme Fournier et également le fait qu’elle ait décidé de dévoiler son identité, je pense que ça fait œuvre utile et ça constitue un modèle pour plusieurs personnes. »

« Je pense qu’il y a beaucoup de personnes qui ont perdu confiance et là-dessus, c’est notre devoir comme élu, comme ministre, comme gouvernement de redonner confiance au système de justice, de mieux épauler nos policiers », a affirmé le ministre de la Sécurité publique, François Bonnardel.

« C’est un témoignage important. Elle est passée à travers le système. Elle a dit qu’elle mettra de l’avant des critiques constructives. On a bien hâte de l’entendre. En ce domaine, il faut toujours rendre meilleur le système », a pour sa part déclaré le chef intérimaire du Parti libéral, Marc Tanguay.

Le chef parlementaire de Québec solidaire, Gabriel Nadeau-Dubois, souhaite que Mme Fournier soit entendue. « Je veux saluer son courage. Je veux saluer sa résilience, aussi. Elle prend la parole aujourd’hui et je souhaite qu’on l’écoute. Je souhaite que tous et toutes, on écoute ce que cette femme a à nous dire sur ce qu’il faut qui change au Québec pour que les victimes de violences sexuelles sentent qu’elles ont toute la place pour dénoncer et pour que le processus qui s’ensuit respecte leurs droits, respecte leur volonté », a-t-il dit.

« Je pense que chaque fois qu’une femme se tient debout et qu’il y a un résultat positif, c’est bon pour toutes les femmes », a fait valoir Manon Massé.