(Québec) Jean Boulet a tranché : les enfants de moins de 14 ans, sauf exception, ne pourront plus travailler au Québec, malgré le contexte de la pénurie de main-d’œuvre et la pression des restaurateurs, qui s’opposaient à cette nouvelle restriction.

Pour le ministre du Travail, la place d’un enfant qui n’a pas encore 14 ans, « clairement, c’est sur les bancs d’école et dans les activités [parascolaires] », a-t-il dit mardi, alors qu’il déposait à Québec le projet de loi 19 qui encadre le travail des enfants.

« [Leur place est dans] le sport, le cinéma, le théâtre… Peu importe la nature de l’activité, l’enfant a besoin de la diversité d’activités [parascolaires] pour se développer et atteindre son plein potentiel. D’abord et avant tout, son premier métier, c’est d’être un élève », a ajouté M. Boulet.

Ainsi, malgré l’appel des restaurateurs, qui demandaient de ne pas établir d’âge minimal pour travailler, le gouvernement interdira aux employeurs, dès la sanction du projet de loi, de faire travailler un enfant qui n’a pas 14 ans. Le ministre prévoit toutefois des exceptions, soit les activités qui sont associées à une prolongation de la vie scolaire, familiale, et qui comportent peu de risques pour leur santé.

Des exemples d’exceptions  

  • le gardiennage d’enfants ;
  • l’aide aux devoirs ;
  • les colonies de vacances et les camps de jour ;
  • les pratiques artistiques (comme les youtubeurs, qui génèrent des revenus en ligne) ;
  • ou le travail qui est fait dans une entreprise familiale de moins de 10 salariés par l’enfant du propriétaire, de son conjoint ou de sa conjointe, de l’administrateur ou de l’associé.

De plus, pour les enfants qui répondent à ces exceptions et pour ceux qui sont âgés de 14 à 16 ans, les employeurs ne pourront plus les faire travailler plus de 17 heures par semaine pendant le calendrier scolaire, incluant un maximum de 10 heures entre le lundi et le vendredi.

Ces normes seront appliquées dès la prochaine rentrée, en septembre. Les employeurs qui ne respecteraient pas ces nouvelles règles pourraient recevoir des amendes allant jusqu’à 12 000 $ en cas de récidive.

« Il faut mettre des balises »

En point de presse, mardi, Jean Boulet a rappelé que son projet de loi respecte les recommandations formulées en décembre dernier par le Comité consultatif du travail et de la main-d’œuvre, qui réunit les représentants patronaux et syndicaux du Québec. Il a également affirmé que cet encadrement était rendu nécessaire en raison de l’augmentation de 540 % du nombre de lésions professionnelles reconnues par la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) pour les enfants de 14 ans et moins entre 2017 et 2021. « Un moment donné, il faut mettre des balises », a-t-il dit.

Sur le plan scolaire, le ministre du Travail a rappelé les conclusions d’une enquête réalisée par l’Institut de la statistique du Québec sur la santé des jeunes au secondaire qui notait que « l’indice de décrochage » était de 14 % pour ceux qui travaillaient moins de 11 heures par semaine, de 20 % pour ceux qui étaient en emploi entre 11 et 15 heures par semaine, et de 31 % pour les élèves qui travaillaient plus de 16 heures par semaine.

Jusqu’à maintenant, contrairement à d’autres provinces canadiennes, il n’y avait pas d’âge minimal pour travailler au Québec. L’Association Restauration Québec (ARQ) s’opposait à l’imposition d’une telle limite. Son vice-président aux affaires publiques et gouvernementales, Martin Vézina, a reconnu mardi que l’adoption du projet de loi ne causerait pas de fermetures dans l’industrie. Il a toutefois indiqué que certains restaurateurs auront une réflexion sur leurs heures d’ouverture.

« Nous allons perdre de bons travailleurs », a déploré M. Vézina, qui aurait préféré que Québec impose une limite d’heures travaillées aux enfants de moins de 14 ans plutôt que de les exclure du marché du travail.