La présidente de la Confédération des syndicats nationaux (CSN) – l’un des syndicats les plus importants dans la fonction publique du Québec – estime que le gouvernement de François Legault doit réagir pour faire face aux problèmes du réseau public liés à des « décennies de négligence », mais que le débat doit inclure la « société civile ».

« Si [le premier ministre François Legault] se place dans une logique de dialogue et de discussion [afin] de trouver des solutions ensemble, nous, on va y participer », a soutenu Caroline Senneville, présidente de la CSN, en entrevue avec La Presse samedi.

La CSN représente 175 000 employés du secteur public, sur 330 000 membres au total.

Rappelons que M. Legault a affirmé vendredi vouloir apporter d’importants changements dans la gestion des deux réseaux publics majeurs du Québec, soit la santé et l’éducation, dans le cadre d’une longue entrevue accordée à La Presse.

Québec entend notamment se donner plus de pouvoirs dans la gestion du réseau scolaire, insatisfait de décisions prises par les centres de services scolaires. Il veut nommer – et au besoin limoger – leurs directeurs généraux comme il a le pouvoir de le faire avec les PDG de CISSS et de CIUSSS.

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Le premier ministre du Québec, François Legault

Du côté du réseau de la santé, les médecins gestionnaires dans les hôpitaux pourraient perdre une partie de leurs pouvoirs au profit des PDG et des directeurs généraux, a aussi indiqué M. Legault. Et les conseils d’administration des CISSS et des CIUSSS sont au centre d’une remise en question majeure.

Pas le premier à faire face au réseau

François Legault n’est pas le premier à vouloir apporter d’importants changements de gouvernance au sein de ces réseaux publics, rappelle Caroline Senneville.

« Toute la gouvernance en santé, de notre côté, ça fait une bonne décennie qu’on dénonce la façon dont ça s’est fait sous le gouvernement libéral avec la fameuse réforme [de l’ex-ministre de la Santé Gaétan] Barrette, illustre-t-elle. Avant, dans le réseau, il y avait des représentants de la société civile, des syndicats et des patients, et ça donnait le pouls de ce qui se passait sur le terrain. »

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La présidente de la CSN, Caroline Senneville

Mme Senneville reconnaît aussi les grandes difficultés auxquelles fait face le réseau public, où les mauvaises nouvelles font constamment les manchettes. ​​ « Il y a des gens qui meurent dans les corridors, des jeunes qui auraient dû faire l’objet d’enquêtes de la DPJ et qui ne se sont pas rendus là, des écoles où il n’y a pas de ventilation, un hôpital qui tient avec de la broche, dont on est obligé de fermer les urgences parce qu’un tuyau est en train de lâcher », énumère-t-elle.

Le gouvernement doit « voir plus loin que la prochaine élection » pour faire face à ces problèmes qui résultent de « décennies de négligence dans le secteur public », estime Caroline Senneville.

« Mais il faut inclure la société civile dans ces débats-là », affirme la présidente.

Présents sur le terrain

Les syndicats ont d’ailleurs des yeux et des oreilles sur le terrain pour faire des recommandations au gouvernement, soutient la présidente.

« Ça doit faire trois négociations qu’on se présente devant le gouvernement en disant : “Telle année, il va y avoir une pénurie de tel corps de métier”, dit-elle. Pour la maternelle 4 ans, on est venu en commission parlementaire et on a dit : “Dans l’état actuel physique des écoles, on n’a pas de place, et en plus, on manque de personnel.” Trois ans plus tard, le ministre de l’Éducation doit se rendre à l’évidence. Donc nous aussi, on est sur le terrain, on a des solutions et on attend juste ça : les présenter. »

Dans la foulée, elle affirme que la CSN ne s’opposera pas nécessairement à François Legault. « On a à cœur les missions importantes de l’État, soit les services publics. Pour toutes les solutions qui sont porteuses, on ne sera pas des adversaires. »

« Je pense qu’on peut atteindre les mêmes objectifs en ayant un discours plus positif », résume-t-elle.

Le premier ministre François Legault n’a pas voulu discuter de la question lors d’un bref passage devant les journalistes, à l’occasion des funérailles de l’ex-ministre des Relations internationales et de la Francophonie Nadine Girault à Laval samedi.

Avec la collaboration de Tommy Chouinard, La Presse

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