(Ottawa) Les chasseurs ont des milliers d’autres armes à leur disposition pour s’adonner à leur activité, selon les libéraux. Le ministre de la Sécurité publique, Marco Mendicino, a fait une sortie au dernier jour des travaux parlementaires avant la relâche des Fêtes dans ce qui avait toutes les apparences d’une opération de relations publiques.

Il était entouré de plusieurs députés, dont Sophie Chatel de la circonscription de Pontiac et Gudie Hutchings de Long Range Mountains à Terre-Neuve-et-Labrador qui pratique elle-même la chasse.

« Il y a un fait que vous devez savoir, a affirmé la Terre-Neuvienne. Il y a encore 19 000 armes à feu disponibles pour les chasseurs, les tireurs sportifs et les chasseurs autochtones. Donc, il y a encore beaucoup d’armes à feu légalement disponibles au Canada si vous voulez tirer sur des canards, des orignaux, des cerfs, des perdrix, des lagopèdes. »

Quant aux chasseurs qui craignent que l’arme qu’ils utilisent soit prohibée et que leur portefeuille ne leur permette pas de s’en procurer une nouvelle, elle leur dit de ne pas s’inquiéter. « Je suis persuadée que vous allez voir certains fabricants proposer une autre arme à feu moins chère », a-t-elle répondu.

Les libéraux ont soulevé la controverse en novembre en déposant deux amendements au projet de loi C-21 qui interdisait les armes de poing pour en élargir la portée, semant la confusion. Outre les conservateurs, l’Assemblée des Premières Nations s’y oppose. Le Bloc québécois et le Nouveau Parti démocratique émettent des réserves.

Le ministre Mendicino a réitéré mercredi qu’il voulait corriger le tir. « Nous voulons montrer notre détermination à bien faire les choses », a-t-il dit.

Blanchet veut un débat modéré

Le chef du Bloc québécois, Yves-François Blanchet, a invité mercredi Justin Trudeau et Pierre Poilievre à cesser de « jouer la polarisation » dans ce dossier. Il estime que le gouvernement devrait modifier sa définition d’arme prohibée pour dénouer l’impasse.

L’étude du projet de loi stagne en comité parlementaire. Les élus n’ont pas réussi à s’entendre mardi sur la voie de passage proposée par la députée bloquiste Kristina Michaud.

Elle avait réclamé une réunion d’urgence pour déterminer combien de groupes pourront se faire entendre en comité parlementaire sur la nouvelle définition d’une arme à feu prohibée et la longue liste de plus de 300 pages, soit les deux amendements déposés par le gouvernement après la fin des consultations. Ils se sont entendus pour tenir huit rencontres, mais n’ont pas réussi à clore le débat avant la fin de réunion. La discussion a finalement été reportée en janvier, soit après la période des Fêtes.

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Yves-François Blanchet

« Je souhaite très vivement — et je suis même prêt à les rencontrer n’importe quand — que M. Poilievre et M. Trudeau cessent de jouer la polarisation », a répondu M. Blanchet à une question de La Presse lors de son bilan de fin d’année mercredi.

« Je pense au sentiment de sécurité que les gens doivent avoir, a-t-il ajouté. La meilleure manière de leur donner sentiment de sécurité, c’est de tous s’asseoir avec une attitude modérée, raisonnable. »

La définition et la liste d’armes prohibées proposées à la dernière minute par les libéraux touchent certaines armes populaires auprès des chasseurs, comme le SKS, une arme de style militaire.

Poilievre vise « les vrais criminels »

« Au lieu de cibler des chasseurs en interdisant leurs armes de chasse, les conservateurs vont cibler des vrais criminels en remettant en place davantage de conséquences pour des criminels violents qui font des crimes une fois après l’autre », a déclaré le chef conservateur Pierre Poilievre lors d’une allocution devant le caucus conservateur mercredi. Les médias avaient été invités à y assister.

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Pierre Poilievre

Le gouvernement se défend de vouloir bannir les armes de chasse. Le premier ministre Justin Trudeau a affirmé la semaine dernière qu’il était ouvert à revoir sa longue liste de modèles à interdire pour éliminer les armes prisées par les chasseurs, mais il n’est pas ouvert à revoir sa définition d’une arme prohibée.

Le ministre de la Sécurité publique, Marco Mendicino, s’est dit ouvert mercredi à entendre l’avis d’experts sur « la langue de la définition ». Il avait toutefois rappelé la semaine dernière que le SKS était au départ une arme conçue pour la guerre et avait donc donné l’impression qu’il ne serait pas flexible pour ce type de fusils.

Le député néo-démocrate Alistair MacGregor a invité les libéraux à « nettoyer les dégâts qu’ils ont causés ».

Comme les libéraux sont minoritaires, ils ont besoin de l’appui du Bloc québécois ou du Nouveau Parti démocratique pour que les deux amendements soient adoptés. Pour le groupe PolySeSouvient, les amendements étaient une condition « sine qua non » pour qu’ils donnent leur appui au projet de loi C-21. Le groupe qui milite pour un meilleur contrôle des armes à feu dans la foulée du féminicide de masse de la Polytechnique se dit ouvert au compromis.