(Sherbrooke) Les partis de l’opposition à Québec s’entendent tous avec le gouvernement Legault sur le fait qu’il faut évaluer l’imposition de bracelets électroniques « anti-rapprochement » pour accroître la sécurité des victimes de violence conjugale.

« On pense que c’est assurément une option qui doit être examinée de très près […] parce qu’on a vu les ratés des 810 [d’après l’article du Code criminel relatif à l’engagement de ne pas troubler l’ordre public] pour lesquels il n’y a pas de suivi », a indiqué la porte-parole du Parti québécois en matière de justice, Véronique Hivon, en marge du caucus présessionnel de sa formation, à Sherbrooke.

La députée de Joliette, qui était accompagnée de sa collègue Méganne Perry Mélançon, réagissait à la proposition de la ministre responsable de la Condition féminine, Isabelle Charest, qui a indiqué jeudi, en entrevue avec La Presse, vouloir évaluer sérieusement ce moyen légal, récemment adopté par la Parlement en France.

La ministre Charest s’est vu confier par le premier ministre François Legault le mandat de coordonner un plan d’action en matière de violence conjugale, en décembre dernier, dans la foulée du triple meurtre suivi d’un suicide à Pointe-aux-Trembles.

Le gouvernement de Philippe Couillard avait présenté un plan d’action 2018-2023 pour lutter contre la violence domestique, faut-il rappeler. Un plan « tout à fait pertinent », a souligné Isabelle Charest, et qui servira de base à ses travaux.

PHOTO JACQUES BOISSINOT, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Isabelle Charest, ministre responsable de la Condition féminine

Relisez l’entrevue accordée par Isabelle Charest

La députée libérale Hélène David, qui a participé à l’élaboration du document à l’époque où elle occupait les fonctions de Mme Charest, n’est pas du tout « étonnée » que l’idée des bracelets électroniques « revienne dans le discours en raison du nombre récent de féminicides » au Québec.

Cela faisait partie d’ailleurs des pistes de solution soulevées lors des consultations sous sa gouverne. Reste que « la question n’est pas tranchée » et que ce moyen n’est pas si simple à appliquer. « Il y a des pour et des contre […], mais il faut y réfléchir comme il faut », a-t-elle indiqué à La Presse.

La députée de Québec solidaire Christine Labrie estime quant à elle que c’est un moyen qui viendrait « permettre à une victime de rester en sécurité sans brimer la liberté » d’un individu qui doit respecter une ordonnance de la cour.

Moyens financiers attendus

Si les partis de l’opposition saluent la détermination de la ministre Isabelle Charest d’accélérer le pas en matière de violence conjugale, ils craignent que les moyens financiers qui seront accordés ne soient pas à la hauteur de ses ambitions. Le prochain budget du gouvernement doit notamment bonifier le financement des maisons d’hébergement.

« Tant qu’il n’y aura pas d’argent annoncé, pour moi, c’est un exercice de communication pour démontrer qu’on est à pied d’œuvre », prétend Mme Perry Mélançon, rappelant que la Fédération des maisons d’hébergement du Québec réclame un réinvestissement de 50 millions dans le réseau.

Elle rappelle par ailleurs à Mme Charest que les « mesures, elles sont déjà élaborées » dans le plan d’action du gouvernement précédent et qu’elle doit maintenant s’activer à les appliquer. La députée solidaire de Sherbrooke abonde dans le même sens.

« On a talonné le gouvernement depuis des mois pour qu’il se mette en action dans ce dossier-là […] Je trouve ça dommage qu’on ait perdu beaucoup de temps alors que Mme Charest avait en main tous les outils et la légitimité pour agir dès sa nomination » en février 2019, a déploré Mme Labrie.

Isabelle Charest rencontre vendredi ses vis-à-vis de sept importants ministères du gouvernement Legault pour travailler à des solutions pour combattre la violence conjugale.