(Unamen Shipu) L’ambiance est plutôt détendue à l’arrivée des ministres au Conseil de bande. La veille, un grand souper communautaire a été organisé pour souligner leur arrivée. Des cadeaux leur ont été offerts, les ministres ont même dansé le makusham, une danse traditionnelle.

Tout le monde prend place dans le bureau du chef. Le leader innu s’installe dans son fauteuil, au bout de la table. Derrière lui, une fresque représentant une harde de caribous. Le ton change.

  • Un souper est organisé dans le centre communautaire pour les convives, animé par l’aîné de la communauté innue, Joséphis Bellefleur, qui chante et joue du tambour.

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    Un souper est organisé dans le centre communautaire pour les convives, animé par l’aîné de la communauté innue, Joséphis Bellefleur, qui chante et joue du tambour.

  • L’ambiance est plutôt détendue : au son du tambour, les convives, dont les ministres Champagne Jourdain, Fitzgibbon et Lafrenière, dansent le makusham, une danse traditionnelle.

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    L’ambiance est plutôt détendue : au son du tambour, les convives, dont les ministres Champagne Jourdain, Fitzgibbon et Lafrenière, dansent le makusham, une danse traditionnelle.

  • Le ministre Ian Lafrenière fait connaissance avec des membres de la communauté au centre communautaire Unamen Shipu.

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    Le ministre Ian Lafrenière fait connaissance avec des membres de la communauté au centre communautaire Unamen Shipu.

  • La communauté d’Unamen Shipu a accueilli les invités par un grand souper communautaire.

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    La communauté d’Unamen Shipu a accueilli les invités par un grand souper communautaire.

  • Joséphis Bellefleur et Anastasie Bellefleur, aînés de la communauté innue d’Unamen Shipu

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    Joséphis Bellefleur et Anastasie Bellefleur, aînés de la communauté innue d’Unamen Shipu

  • Les ministres Kateri Champagne Jourdain, Ian Lafrenière et Pierre Fitzgibbon remercient les membres de la communauté innue pour leur accueil.

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    Les ministres Kateri Champagne Jourdain, Ian Lafrenière et Pierre Fitzgibbon remercient les membres de la communauté innue pour leur accueil.

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« On va commencer. Le but de votre visite, c’est quoi ? », lance sans ambages Raymond Bellefleur. « De répondre à votre invitation de venir vous jaser. Vous nous avez demandé une rencontre avec mon collègue Fitzgibbon pour parler de développement », répond le ministre Ian Lafrenière.

Les échanges qui s’amorcent sont pourtant bien loin du sujet annoncé. Le chef a une liste d’épicerie bien garnie : ravages de la drogue, mauvaise desserte policière, problème d’accès à la communauté, pénurie de logements…

Les Innus veulent s’attaquer aux enjeux sociaux avant de penser à ériger des éoliennes dans leur cour.

Dans le cadre des négociations avec Hydro-Québec, Unamen Shipu réclame d’ailleurs une vingtaine de millions pour la construction d’une résidence pour aînés de 21 places. C’est la priorité, dit le chef.

Pierre Fitzgibbon écoute les discussions, mais n’intervient à peu près pas pendant la rencontre d’une heure et demie. Il ne sera d’ailleurs jamais question de Petit Mécatina.

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Le ministre Pierre Fitzgibbon en mode écoute.

Pourquoi ne pas avoir profité de la présence du ministre de l’Énergie ? « Je suis plus à l’aise d’en parler avec Michael Sabia », nous confie Raymond Bellefleur après l’entretien.

« C’est la première fois [qu’un PDG] d’Hydro vient ici pour faire des excuses. Les autres avant ne sont jamais venus, ils nous ont toujours tenus à l’écart », déplore le chef. La communauté a donc accepté en retour de « mettre un stand-by » sur les griefs contre un éventuel barrage.

Le chef de Pakua Shipi, que les ministres ont rencontré la veille, va dans le même sens. « Moi, je veux régler avant [le dossier de la centrale du] Lac-Robertson », a lancé Denis Mestenapéo aux élus.

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Le chef du conseil innu de Pakua Shipi, Denis Mestenapéo, a rencontré les ministres lors de leur séjour en Basse-Côte-Nord.

La communauté demande un nouvel aréna, une maison des jeunes et même des fonds pour investir dans un projet hôtelier.

« Quand Robertson va être réglé, après ça seriez-vous ouverts à l’éolien, au solaire ? J’ai vu les cartes, il y du potentiel chez vous », lui demande M. Fitzgibbon. Son interlocuteur opine.

« Oui, c’est sûr. On va en parler plus tard », répond-il brièvement.

Comme à Unamen Shipu, l’acceptabilité sociale d’un nouvel ouvrage hydroélectrique est loin d’être acquise à Pakua Shipi.

« Tout le monde dit qu’on ne peut pas avoir un projet comme un barrage, ça va détruire nos terres, nos animaux, nos médecines traditionnelles », indique le chef en entrevue à La Presse.

Michael Sabia devait se rendre sur place le 20 mars dernier, mais la rencontre a été reportée.

Ouverture timide

De retour à Unamen Shipu, les grandes fenêtres du bureau de Raymond Bellefleur montrent que la tempête ne s’essouffle pas.

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Les ministres Kateri Champagne Jourdain et Pierre Fitzgibbon écoutent le chef Raymond Bellefleur (au premier plan).

« Au niveau énergétique, est-ce qu’il y avait des choses que tu voulais regarder avec mon collègue Pierre ? », reprend M. Lafrenière. Le chef évoque alors un vague projet de l’administration précédente visant à installer une minicentrale au fil de l’eau avec une éolienne, mais sans plus.

Après 50 minutes d’échanges, le gouvernement ouvre son jeu.

« Trouvons quelque chose qui fait votre affaire », plaide Ian Lafrenière alors que les conseillers innus présents se renseignent sur l’avancement de l’entente Petapan, un projet de traité négocié entre Québec, Ottawa et les Innus de Mashteuiatsh, Essipit et Nutashkuan.

« Je ne fais pas du mur-à-mur au Québec, ce qu’Unamen va vouloir, on va le regarder pour vous. Regardons quel genre d’entente est profitable pour vous. […] On ne veut plus voir les Premières Nations comme des bénéficiaires […] on veut vous avoir comme partenaires », soutient-il.

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Le ministre Ian Lafrenière en discussion avec le chef Raymond Bellefleur

M. Lafrenière poursuit son argumentaire de vente : « Ce que ça change, c’est que quand les décisions sont prises, vous êtes autour de la table. […] Je ne sais pas ce que vous en pensez… »

S’en suit un long silence du chef.

« Pensez-y. Bref, c’est sur la table », ajoute le ministre.

La rencontre prend fin. L’attachée de presse de Ian Lafrenière regarde son téléphone. Un message de la compagnie aérienne.

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Coincés à Unamen Shipu en raison du mauvais temps, les ministres Champagne Jourdain, Lafrenière et Fitzgibbon n’ont d’autre choix que de regarder la présentation du budget à la télévision.

Le vol de retour est annulé… Les élus s’envoleront finalement pour Québec deux jours plus tard que prévu et rateront même la présentation du budget par leur collègue Eric Girard – moment d’une importance capitale pour un gouvernement.