Une ex-directrice de la Commission scolaire Lester-B.-Pearson reconnaît avoir participé à un stratagème frauduleux qui a bénéficié à une agence de recrutement d’étudiants étrangers. Caroline Mastantuono ordonnait à ses employés de créer de faux documents pour favoriser le recrutement d’étudiants indiens.

La femme de 61 ans a plaidé coupable à la mi-mai, au palais de justice de Montréal, à des chefs d’accusation de fabrication de faux, d’utilisation de documents contrefaits et d’abus de confiance par un fonctionnaire public en fraudant le ministère de l’Immigration et la Commission scolaire Lester-B.-Pearson.

Elle avait été arrêtée en 2020 par l’Unité permanente anticorruption dans le cadre de l’enquête PANDORE.

Le juge Salvatore Mascia avait imposé une ordonnance de non-publication sur sa reconnaissance de culpabilité à la mi-mai. Or, cette ordonnance a été levée mercredi, ce qui nous permet de révéler les faits reconnus par Caroline Mastantuono, surtout connue sous le prénom Carol.

Pour comprendre l’affaire, il faut savoir qu’un étudiant étranger qui souhaite étudier au Québec doit obtenir un Certificat d’acceptation du Québec (CAQ) émis par le gouvernement provincial. Dans certains cas, il doit aussi recevoir un permis d’études de la part d’Immigration Canada. Pour obtenir le CAQ, l’étudiant doit démontrer sa capacité financière. Ce montant s’élevait à 24 164 $ en 2016.

En 2014, la directrice du département international de la Commission, Caroline Mastantuono, constate que des étudiants étrangers n’ont pas reçu leur CAQ en raison de leur capacité financière insuffisante.

La directrice demande alors à ses employés de créer de faux reçus de paiement de droits de scolarité et de les inclure dans les documents remis au ministère de l’Immigration. Le total des 81 faux reçus s’élève à 1,6 million de dollars. Selon la preuve, la Commission n’avait pourtant reçu que 172 000 $.

L’objectif était de faire croire au Ministère que ces étudiants étrangers indiens avaient déjà payé leurs droits de scolarité. Le Ministère déduisait donc cette somme du calcul pour évaluer la capacité financière des étudiants. Ainsi, cela facilitait leur obtention du CAQ.

Un coaccusé dans cette affaire, Naveen Kolan (dont le procès est prévu lundi prochain), était le propriétaire de l’agence de recrutement d’étudiants étrangers Edu Edge inc. Cette agence spécialisée dans le marché indien a signé un contrat avec la Commission scolaire Lester-B.-Pearson en 2012 et 2013.

Selon les faits admis par Caroline Mastantuono, « ce stratagème bénéficiait à Edu Edge inc., qui facturait ensuite la Commission scolaire pour le recrutement de ces étudiants ». Par ailleurs, Caroline Mastantuono et Naveen Kolan ont tenu une rencontre avec les employés de la Commission scolaire au début du stratagème, selon les faits.

La relation entre Edu Edge inc. et la Commission scolaire était « problématique » depuis 2013, selon les faits admis par l’accusée, sans en révéler davantage à ce sujet. On ignore par ailleurs quel intérêt l’accusée avait dans ce stratagème.

Également, la Commission scolaire a payé 76 698 $ en commissions à une agence détenue par la femme de Naveen Kolan pour le recrutement d’une vingtaine d’étudiants étrangers. Or, ces étudiants n’avaient pas été recrutés par l’entremise d’une agence. On les avait néanmoins assignés à cette agence. Dans le cadre de ce stratagème, 14 reçus ont été fabriqués.

Selon une analyse comptable, cette agence établie en Colombie-Britannique a reçu 118 953 $ de la Commission scolaire. Un rapport montre que 70 % des fonds de l’agence provenaient de l’agence Edu Edge de Naveen Kolan.

Les observations sur la peine à imposer à Caroline Mastantuono sont prévues en septembre prochain. Sa fille et coaccusée, Christina Mastantuono, est toujours en attente de procès.

MSarah-Audrey Daigneault a représenté le ministère public, alors que MIsabel Schurman a défendu l’accusée.