(Québec) Le propriétaire de Radio X vient de subir un premier revers dans la longue bataille judiciaire qu’il mène pour démasquer les auteurs de l’ancienne Coalition sortons les radios-poubelles de Québec, qu’il veut poursuivre pour plusieurs dizaines de milliers de dollars.

La Cour supérieure vient de refuser à RNC Media une requête pour forcer une entreprise de télécommunication à lui révéler l’identité derrière quatre numéros de téléphone. RNC cherche ces informations pour poursuivre ceux qui ont alimenté pendant une décennie les différentes plateformes de la Coalition.

Les impacts de ce revers sur la poursuite ne sont pas encore clairs. RNC réussira-t-elle à démasquer les gens derrière la Coalition, qui ont toujours protégé leur anonymat ? L’avocat de l’entreprise n’avait pas répondu à La Presse au moment où ces lignes étaient écrites. La Coalition a quant à elle réagi dans une déclaration, assurant que « jusqu’ici, rien ne démontre que RNC est capable de remonter à la source ».

Dans sa poursuite, RNC accuse la Coalition d’avoir harcelé les annonceurs et les dirigeants de Radio X. La radio demande d’« arrêter de harceler ou, en bon français, d’écœurer les clients », selon les mots utilisés par son directeur général Philippe Lefebvre lors d’un interrogatoire préalable.

La Coalition a annoncé l’été dernier cesser ses activités. L’action en justice, elle, n’a pas été abandonnée. L’entreprise poursuit déjà deux hommes dont le nom se trouve au registre des entreprises en tant qu’administrateurs de l’OSBL Coalition contre la radio poubelle, créé en 2012 puis dissous en 2019.

Mais ces deux hommes ont nié avoir alimenté les plateformes de la Coalition. RNC cherche donc d’autres responsables. Elle a déjà eu gain de cause dans plusieurs requêtes devant les tribunaux pour obtenir de META, Vidéotron, Telus et Rogers l’identité des acteurs derrière des pages Facebook, des adresses IP ou encore des numéros de téléphone.

Mais ce qu’elle a trouvé ne semble pas suffisant. Dans sa dernière requête, elle demandait à Rogers les informations liées à quatre numéros de téléphone. Cette fois, la Cour supérieure a refusé.

« Rien ne soutient les affirmations de RNC quant à la possible commission d’un acte criminel dont auraient été victimes des tiers », note la juge Alicia Soldevila, dans sa décision du 22 février.

« Tout ce qu’ils ont, c’est bidon »

Le propriétaire de Radio X se plaint que ses détracteurs « ont redoublé d’efforts pour nuire à la réputation et aux affaires » de la station depuis la pandémie de COVID-19.

Rappelons que Radio X a été la cible d’une importante campagne de boycottage en septembre 2020. En parallèle, la Coalition sortons les radios-poubelles a fait circuler sur ses plateformes le nom des patrons de RNC et la liste des annonceurs de Radio X. Elle invitait les gens à écrire aux annonceurs pour leur demander d’arrêter d’y acheter de la publicité.

La juge Soldevila conclut que RNC n’a pas fait la démonstration dans sa requête des dommages subis par ses patrons ou les annonceurs.

« La publication des noms et adresses des administrateurs et dirigeants de RNC ne peut, en soi, constituer une faute. Ces informations sont de nature publique et se retrouvent à l’État des renseignements des personnes morales au Registraire des entreprises du Québec », note la magistrate.

« L’appel au boycott pour des motifs relevant de la liberté d’expression, dans un contexte où un recours en diffamation est exclu, n’est pas en soi une faute », ajoute-t-elle.

La juge précise que sa décision ne vise pas à « cautionner ou encourager le sentiment d’impunité favorisé par l’anonymat du clavier », mais résulte plutôt d’un équilibre délicat à trouver compte tenu des droits protégés par les chartes.

Dans une déclaration envoyée à La Presse, la Coalition affirme que RNC peine à démasquer les administrateurs des plateformes, qui ont depuis toutes été fermées. « Jusqu’ici, rien ne démontre que RNC est capable de remonter à la source. Tout ce qu’ils ont, c’est bidon […] Ils sont embourbés dans une sauce, une sorte de fable, que les pirates ont eux-mêmes fabriquée », écrit la Coalition.

RNC Media n’avait pas encore commenté la décision de la Cour supérieure au moment où ces lignes étaient écrites.