La Société de transport de Montréal (STM) s’engage à plafonner la croissance de ses dépenses à 3 %, chaque année, jusqu’en 2029, une nouvelle « mesure d’optimisation » financière qui lui permet de se serrer la ceinture sans toutefois réduire le niveau de service.

C’est ce qu’on apprend dans un document qui sera présenté ce lundi devant la Commission sur les finances et l’administration de la Ville. Celle-ci commence cette semaine à entendre différents organismes dans le cadre de la consultation sur le financement métropolitain du transport collectif, un exercice où des choix déchirants seront soumis aux Montréalais et qui doit culminer le 14 juin avec l’adoption de recommandations.

Lisez l’article « Financement du transport collectif : des choix déchirants soumis aux Montréalais »

« Trois pour cent, c’est une base de référence qu’on se donne à offre constante, mais on espère que d’ici là, le niveau de service va avoir augmenté. Présentement, je n’ai même pas encore la confirmation de l’offre que je dois donner dans sept mois, et encore moins dans cinq ans », dit le président de la STM, Éric Alan Caldwell.

Il fait ainsi référence à l’incertitude entourant les négociations entre les maires et la ministre des Transports, Geneviève Guilbault, qui sont toujours dans une impasse malgré deux rencontres en un mois. Québec entend a priori combler 70 % du déficit « conjoncturel » des sociétés de transport, soit environ 200 millions, alors que le manque à gagner est de 565 millions pour 2025 seulement.

PHOTO ALAIN ROBERGE, ARCHIVES LA PRESSE

Le président de la STM, Éric Alan Caldwell

On fait beaucoup d’efforts, mais là, le gouvernement doit être au rendez-vous pour les prochaines années. L’histoire nous montre que ça fait une différence.

Éric Alan Caldwell, président de la STM, en entrevue avec La Presse

Fin 2023, la STM avait déjà annoncé réduire ses dépenses de 86 millions pour éviter le pire, soit des coupes dans le service. La masse salariale a notamment été réduite de 5 %, pour un gain d’environ 25 millions, et le budget des biens et services, notamment les campagnes de communication, a été réduit de 2 %. Le budget de certains « projets spéciaux », comme le remplacement des trains MR-73 par des AZUR, a aussi été abaissé.

Tout cela a permis au transporteur montréalais de limiter la hausse de ses dépenses à 5 % en 2023. Cette année, il prévoit une hausse encore plus maigre, oscillant entre 1 et 2 %. En 2025, et jusqu’en 2029, la proportion d’augmentation de ces dépenses ne sera jamais supérieure à 3 %. La société de transport s’est déjà engagée à un « plan de réduction des dépenses récurrentes de 100 millions sur cinq ans ».

Recentrer le débat sur les revenus

Si elle est « fondamentale », l’optimisation financière « n’est pas la solution au déficit actuel », croit M. Caldwell.

La plus grosse solution, ça reste de générer plus de revenus et de les diversifier. Après deux ans de débats sur les dépenses, là, on doit impérativement ramener le débat sur ces revenus.

Éric Alan Caldwell, président de la STM, en entrevue avec La Presse

Outre une hausse de la taxe de l’immatriculation, qui semble plus que jamais imminente, la STM plaidera devant la commission l’urgence de multiplier les nouvelles sources de financement « dédiées et inspirées de l’écofiscalité ». « Taxe kilométrique, taxe sur le stationnement, péage de congestion » sont autant d’options qui devraient être mises en place, lit-on dans le mémoire de la société, qui fait valoir que « le cadre financier ne peut dépendre autant des subventions gouvernementales et municipales ».

L’exemple de Vancouver, où TransLink tire des revenus d’une taxe sur le stationnement, d’une taxe sur l’électricité et de redevances sur le développement, « devrait inspirer le gouvernement Legault », selon le président de la STM.

Ça prend les deux : un soutien du gouvernement, mais aussi une écofiscalité qui encourage les meilleurs comportements en amenant des revenus au transport collectif.

Éric Alan Caldwell, président de la STM, en entrevue avec La Presse

Enfin, l’utilisation « des fonds associés au rabais à l’achat de véhicules électriques serait une occasion d’augmenter temporairement les revenus liés au transport collectif de 200 millions », affirme la société, qui réclame aussi, comme la Ville de Montréal, d’indexer la taxe sur l’essence et le droit d’immatriculation.

La STM réitère aussi sa demande d’obtenir le droit de pouvoir réaliser des projets immobiliers avec des promoteurs autour des stations de métro, afin de générer plus de revenus. Cela se rapproche du modèle adopté par le Réseau express métropolitain. Ce dernier, note au passage le président, touchera avec les années de plus en plus de subventions à l’exploitation, à un rythme beaucoup plus élevé que son groupe, ce qui lui fait craindre un « désinvestissement gouvernemental dans les sociétés classiques ».

Seulement avec le prolongement de la ligne bleue jusqu’à Anjou, la société estime qu’elle pourrait dégager 310 millions de revenus liés au développement immobilier et ainsi « réduire la facture du projet ». « Il faut qu’on arrive à se donner cette maturité que beaucoup d’autres juridictions ont déjà », conclut M. Caldwell.

L’Histoire jusqu’ici

  • Décembre 2023 : La STM annonce réduire ses dépenses de presque 86 millions en 2024, une hausse de plus de 70 % par rapport à ce qui était appréhendé.
  • Février 2024 : 230 postes sont éliminés, l’équivalent d’une baisse de 5 % sur sa masse salariale.
  • Avril 2024 : L’administration Plante annonce le lancement d’une consultation sur le financement du transport collectif, alors que des négociations sont toujours en cours avec Québec.
  • Mai 2024 : La STM s’engage à plafonner la croissance de ses dépenses jusqu’en 2029.
En savoir plus
  • 700 millions
    En 2025, seulement dans le Grand Montréal, le manque à gagner des sociétés de transport est évalué à 561 millions, mais il bondira l’année d’après à 605 millions, puis à 670 millions en 2027 et à 700 millions en 2028.
    Source : AUTORITÉ RÉGIONALE DE TRANSPORT MÉTROPOLITAIN