Laval augmente la pression pour relancer le prolongement de la ligne orange, toujours au point mort malgré des engagements répétés du gouvernement. Le maire Stéphane Boyer se dit même prêt à livrer un tracé sans expropriation et à le segmenter au besoin, afin d’en réduire les coûts au maximum.

Ce qu’il faut savoir

  • Le prolongement de la ligne orange fait l’objet de discussions depuis plusieurs années déjà.
  • En 2022, Québec s’était engagé à mettre sur pied un bureau de projet. Cela n’a pas encore été fait.
  • Laval propose aujourd’hui de relancer le projet sous une forme facilitée, notamment sans devoir procéder à des expropriations.

« On a vraiment l’occasion de faire les choses différemment. Il n’y a pas encore de tracé précis sur la table. C’est l’opportunité de s’entendre sur le meilleur scénario dès le départ, pour aller de l’avant sans devoir reculer par la suite », affirme M. Boyer en entrevue avec La Presse.

PHOTO PATRICK SANFAÇON, ARCHIVES LA PRESSE

Stéphane Boyer, maire de Laval

Un prolongement du métro au nord de Laval fait l’objet de discussions depuis plusieurs années. En mai 2022, alors qu’il était ministre des Transports, François Bonnardel avait annoncé la création d’un bureau de projet pour le prolongement de la ligne orange.

Ce bureau n’existe toujours pas à ce jour et aucune somme n’a été inscrite au budget. Ce dernier est toujours à la case départ malgré de nombreux signaux d’impatience démontrés par Montréal et Laval l’an dernier.

Le scénario le plus mis de l’avant est un prolongement au nord de la station Côte-Vertu, en passant par la future station Bois-Franc du REM jusqu’à Laval. Un axe au nord de la station Montmorency et un raccordement des deux terminus, pour faire de la ligne orange une sorte de boucle, ont néanmoins aussi été évoqués dans les dernières années.

INFOGRAPHIE LA PRESSE

Scénario du prolongement de la ligne orange au nord de la station Côte-Vertu

Dans tous les cas, « on peut le faire sans expropriation », juge Stéphane Boyer, qui y voit un argument de taille pour aller de l’avant. « Ça a été un gros enjeu à Montréal avec la ligne bleue, mais ici, la Ville possède beaucoup de terrains. Au centre-ville, il y a aussi de grands terrains souvent possédés par des fonds immobiliers qui ont intérêt à ce que ça avance. Il y a moyen de travailler avec eux », explique-t-il.

« Ça peut être un tracé qui est plus court aussi. Ça pourrait par exemple être seulement quelques stations à Laval à partir de Montmorency, dans un premier temps. Ce qui est certain, c’est qu’on a l’obligation de mieux desservir ce secteur », poursuit M. Boyer.

Gouvernance simplifiée ?

D’après l’élu municipal, Laval pourrait proposer une gouvernance simplifiée afin de procéder plus rapidement.

On est une ville sans arrondissement avec une structure qui est très simple. À partir du moment où on s’entend avec Québec sur un tracé, les choses peuvent aller très vite.

Stéphane Boyer, maire de Laval

Son administration réitère au passage qu’elle est prête à financer le bureau de projet en parts égales entre les deux ordres de gouvernement.

La Ville se dit ouverte au fait que la future agence des transports du gouvernement, censée réduire les délais et les coûts, réalise le tout. La création de cette agence est prévue au cours de l’automne prochain et Québec vise l’adoption d’une loi à ce sujet d’ici juin.

Cela dit, l’Autorité régionale de transport métropolitain (ARTM), qui gère les chantiers majeurs de transport dans le Grand Montréal, pourrait aussi être impliquée. L’organisme a tout récemment transmis, en octobre, une « fiche d’avant-projet » au ministère des Transports sur un éventuel prolongement de la ligne orange.

Dans le document, que La Presse a obtenu, on peut lire que le coût du prolongement vers Laval à partir de la station Côte-Vertu oscillerait entre 1,8 milliard et 6 milliards. Un tel projet « aurait pour effet de faire augmenter l’achalandage de la branche ouest de la ligne orange de 25 % », dit l’ARTM, qui envisage de premiers travaux de construction vers Bois-Franc dès 2027.

Une vision « intéressante », dit Québec

Laval anticipe la construction d’environ 50 000 logements autour du futur prolongement de la ligne orange, dont 16 000 sont « déjà en planification », selon le maire. Au centre-ville, les plans d’aménagement prévoient un développement très dense, variant entre 15 et 25 étages.

« Pour l’instant, c’est beaucoup des centres [commerciaux] avec des stationnements », avoue le maire à ce sujet. « Mais on sait que plusieurs propriétaires regardent pour développer leurs terrains et, surtout, qu’il y a une acceptabilité sociale », ajoute-t-il, en rappelant que ce prolongement reçoit aussi un appui global de 75 % dans la population, selon un sondage Léger mené l’an dernier.

Au gouvernement, on estime que la vision du développement de M. Boyer, « basée sur la collaboration avec plusieurs partenaires publics et privés, est très intéressante dans le contexte économique actuel ». « Nous poursuivrons le travail pour améliorer la desserte de transport collectif dans la région », a indiqué le cabinet de la ministre des Transports, Geneviève Guilbault.

Dans l’ouest de Montréal, le maire de l’arrondissement de Saint-Laurent, Alan DeSousa, espère aussi voir les discussions débloquer. « C’est rentable sur tous les fronts. Cela dit, je vais le croire quand je vais voir que l’argent est au rendez-vous. On ne parle pas pour l’instant de milliards, mais bien seulement de millions pour entamer des études. Ça prend ça pour passer à l’action », conclut-il.

Au cabinet de la mairesse Valérie Plante, on réitère que la multiplication des projets de transport collectif est « cruciale ». « Le prolongement de la ligne orange jusqu’à Laval est une bonne solution pour décongestionner la région métropolitaine et offrir une connexion efficace à la station Bois-Franc du REM », dit l’attachée de presse Catherine Cadotte.