Une toute première épicerie détenue et dirigée par des producteurs agricoles biologiques ouvre ses portes, ce jeudi, dans le quartier Rosemont à Montréal.

Manger bio et local en offrant un prix juste au producteur et au consommateur, voilà le pari de la Coopérative pour l’agriculture de proximité écologique (CAPÉ), alors que le panier d’épicerie est la première victime de l’inflation.

Le but ? « C’est d’en avoir partout au Québec », répond Émilie Viau-Drouin, fermière et directrice générale de la CAPÉ, une coopérative qui réunit les 125 agriculteurs membres du réseau des Fermiers de famille. Ces producteurs certifiés bio distribuent durant la saison estivale des paniers de légumes à près de 20 000 foyers chaque semaine. Ils sont aussi présents dans les marchés publics, en plus d’avoir des kiosques à la ferme.

L’idée derrière l’épicerie Bio Locaux – qui a pignon sur la rue Masson – est de continuer à faire de la vente directe, mais en offrant une formule plus flexible et des produits de plusieurs fermes à la fois.

« Sans intermédiaire, les producteurs et les citoyens seront en mesure de décider de l’avenir de leur agriculture et de leur alimentation », a affirmé Mme Viau-Drouin.

« Ici, on paye le producteur le même prix que s’il vendait dans son panier ou en marché public, donc il ne perd pas sa marge comme s’il essayait d’aller en épicerie, a-t-elle ajouté. Au lieu que ça soit un 5 % à 30 % de l’argent [du consommateur] qui va au producteur, c’est 70 % qui lui va directement. »

En contrepartie, éliminer les intermédiaires permet de réduire la facture du client. Émilie Viau-Drouin cite d’ailleurs une étude menée par Équiterre en 2018 qui a montré que les aliments vendus sous la formule de panier bio étaient 20 % moins chers que ceux vendus dans les supermarchés.

« Les producteurs de la Coop font vivre les villages à travers le Québec, c’est eux qui font des enfants dans les petits villages, qui vont à l’école, qui achètent local. Donc quand on parle d’économie locale... Si on redonne un juste prix à ces gens-là qui produisent notre nourriture puis qu’ils continuent à le faire, il y a une roue pour moi qui est beaucoup plus conséquente. »

Des légumes à l’année

Dans le petit local de la rue Masson, entre 30 et 50 sortes de légumes seront vendues à l’année, grâce notamment aux serres d’hiver, qui se sont multipliées au Québec dans les dernières années.

PHOTO PATRICK SANFAÇON, LA PRESSE

L’épicerie Bio Locaux

Il y aura aussi quelques fruits frais et congelés, des œufs, de la viande et des produits transformés. Une deuxième épicerie de la CAPÉ ouvrira ses portes au printemps au Grand Marché de Québec.

Philippe Benoit est copropriétaire, avec son mari Maxime Dion, de la Ferme la Bourrasque à Saint-Nazaire-d’Acton, une des fermes instigatrices du projet.

« Vu que c’est moi le boss, c’est sûr que je vais arriver à un prix qui est rentable qui me permet de vivre de mon métier, ça, c’est évident. Ce qui n’est vraiment pas le cas lorsqu’on vend à de grandes chaînes », explique-t-il.

Autre grand avantage à ses yeux : participer à la mise en marché. « C’est Philippe, c’est moi, c’est la Bourrasque qui vend au client. Tandis qu’en épicerie, c’est l’invisibilité. Tu ne te sens vraiment pas indispensable. Tu te sens comme un fournisseur [parmi tant] d’autres. »