Les taxes foncières des Montréalais risquent d’augmenter significativement l’an prochain, du moins si l’hôtel de ville s’inspire des hausses votées ces jours-ci par les arrondissements.

Ces taxes locales ne représentent qu’une petite portion de la facture finale envoyée aux propriétaires de la métropole, mais donnent une idée de l’impact de l’inflation sur les finances municipales.

Les hausses locales seront en moyenne de 9,3 % dans les 11 arrondissements ayant déjà adopté leur budget (ou étant sur le point de le faire), selon les données envoyées à La Presse par l’administration.

Les taxes locales représentent moins de 10 % du total du compte de taxes foncières. L’augmentation de 10,4 % dans Villeray–Saint-Michel–Parc-Extension « représente une hausse de 33 $ » pour la maison unifamiliale moyenne (compte d’impôt foncier total de 3727 $), faisait valoir mardi la mairesse d’arrondissement, Laurence Lavigne-Lalonde.

Mardi, la mairesse Valérie Plante a justifié la hausse des taxes locales qu’elle demandera aux propriétaires de l’arrondissement de Ville-Marie, qu’elle dirige directement.

« La taxe locale a été indexée de 5 % », a-t-elle dit, faisant valoir que l’environnement, la solidarité sociale et la sécurité avaient constitué des priorités budgétaires. « C’est important pour moi de mentionner qu’à Ville-Marie, on détient le taux de taxe locale le moins élevé des arrondissements de Montréal, et ce, malgré l’ensemble des responsabilités que l’on a. »

La veille, le maire de Mercier–Hochelaga-Maisonneuve avait livré un plaidoyer semblable.

« On est très rigoureux sur ce qu’on peut faire avec les sommes qu’on a », a plaidé Pierre Lessard-Blais, en présentant un budget incluant une hausse de 7 %.

On se fait régulièrement dire qu’on taxe trop, mais qu’il n’y a pas assez [de services]. L’argent, il ne s’invente pas. Si on veut davantage de ressources sur le terrain, il faut davantage de ressources financières.

Pierre Lessard-Blais, maire de Mercier–Hochelaga-Maisonneuve

Hausses « crève-cœur »

Le cabinet de Valérie Plante a assuré que les arrondissements faisaient de leur mieux dans « un contexte économique difficile qui affecte aussi leurs finances ».

« Les arrondissements déterminent eux-mêmes leurs taxes locales, qui représentent, en moyenne, une augmentation de moins de 1 % de la taxe générale », a indiqué l’attachée de presse Béatrice Saulnier. « Néanmoins, ces hausses témoignent de la nécessité de continuer de trouver des solutions pour diversifier les revenus et de poursuivre les échanges dans la foulée du sommet sur la fiscalité. »

L’opposition officielle plaide que les hausses de taxes locales dans ses arrondissements n’ont pas été votées de gaieté de cœur.

« La hausse de taxes locales est une décision crève-cœur pour nos arrondissements, qui doivent composer avec des transferts de la ville-centre largement insuffisants face aux besoins », a indiqué le porte-parole Alan DeSousa, dans une déclaration écrite.

« Cette décision aurait pu être évitable si l’administration Plante avait répondu aux demandes effectuées à deux reprises par les maire(sse)s d’Ensemble Montréal pour un meilleur financement des arrondissements », a-t-il ajouté, disant souhaiter que l’administration puisse « remettre les services de proximité au cœur des priorités ».

Luis Miranda, maire d’Anjou, a fait valoir en entrevue avec La Presse qu’il n’avait pas le choix de hausser significativement les taxes locales en raison du manque de financement. À 15,3 %, l’augmentation figure au sommet du palmarès.

« C’est une augmentation, c’est clair que c’est une augmentation, a-t-il dit. Ça fait longtemps qu’on est sous-financés pour la masse salariale. […] On est un des arrondissements sous-financés. On est limités dans le personnel qu’on peut avoir. »

Les taxes locales, autorisées par Gérald Tremblay comme moyen de financer des projets discrétionnaires précis, ont graduellement pris de l’importance dans les budgets des arrondissements. À Anjou, près du tiers du budget provient maintenant directement des poches des contribuables, plutôt que de transferts de la ville-centre.

« Un équilibre à trouver »

La Ville de Montréal présentera son budget le mois prochain, incluant ses propres décisions fiscales. Celles-ci constitueront la part du lion des changements qui toucheront le portefeuille des Montréalais.

En début de journée, mardi, Valérie Plante avait refusé de s’avancer.

Imaginable de plafonner la hausse à l’inflation de 3 % ou 4 % prévue pour l’ensemble de 2023 ? « Il y a encore des choses qui doivent être attachées, avait répondu la mairesse. Jusqu’à la dernière minute, notre administration, on regarde, on est toujours à soulever chaque pierre. »

On est extrêmement conscient de la pression que subissent les Montréalais et Montréalaises, l’ensemble des Québécois et Québécoises face à l’inflation.

La mairesse Valérie Plante

« Je pense que notre administration a toujours démontré beaucoup de sensibilité, a poursuivi Mme Plante. C’est un équilibre à trouver. »

Le mois dernier, son bras droit Dominique Ollivier avait souligné se retrouver devant des choix difficiles en préparant le budget 2024 de Montréal.

« Qu’est-ce qu’on va devoir couper ? Parce qu’on ne peut pas tout faire », avait-elle évoqué, précisant être justement en train de boucler le budget. Réduction des dépenses et hausse de taxes, « on regarde les deux », continuait-elle. « Toutes les options sont sur la table, comme chaque année, avec la rigueur que vous nous connaissez. »

Avec la collaboration de Pierre-André Normandin et d’Isabelle Ducas, La Presse