(Montréal) Même s’il évoque encore chez certains le souvenir de « beaucoup, beaucoup de trafic », des milliers de personnes ont fait la file cette fin de semaine pour mettre la main sur un rivet de l’ancien pont Champlain.

« On avait 4000 pièces grosso modo à distribuer, et on les a toutes distribuées. Les gens ont super bien répondu à notre invitation, on est vraiment très contents », a expliqué dimanche la porte-parole des Ponts Jacques Cartier et Champlain, Nathalie Lessard.

Dès 9 h 30 dimanche, piétons et automobilistes ont bravé la pluie battante pour aller récupérer l’un des 2000 rivets souvenirs de l’ancien pont qui ont été distribués à L’Île-des-Sœurs. Un premier lot de 2000 rivets avait été rendu disponible samedi à Brossard.

« Les ponts sont importants dans la vie des gens. Le pont Champlain a été important dans la vie des gens », souligne la porte-parole des Ponts Jacques Cartier et Champlain, Nathalie Lessard, dimanche lorsque rencontrée par La Presse Canadienne à la distribution.

« C’est un symbole important et les gens sont contents, même émus, de recevoir ces petits rivets souvenirs, donc on a eu une bonne idée », ajoute-t-elle.

Après presque 60 ans à relier Montréal et sa rive sud, le « vieux » pont Champlain a été mis au rancart en 2019 au profit de son successeur, le pont Samuel-De Champlain, construit au coût de 4,4 milliards.

PHOTO GRAHAM HUGHES, LA PRESSE CANADIENNE

Dès 9 h 30, sous la pluie, piétons comme automobilistes patientaient pour récupérer l’un des quelques milliers de rivets du pont qui sont offerts en souvenir, à L’Île-des-Sœurs.

Depuis, des équipes s’affairent à son démantèlement : une vaste opération chiffrée à 400 millions qui devrait être complétée d’ici janvier prochain. C’est dans le cadre de cet effort que les rivets ont été retirés de l’ancienne structure.

Morceau d’histoire

Lorsque La Presse Canadienne demande à Jeff Harris quels souvenirs il garde de l’ancien pont Champlain, sa réponse est sans équivoque : « Le trafic. Beaucoup, beaucoup de trafic. »

Avec La Presse Canadienne

C’est toutefois pour ajouter un autre morceau de l’histoire de Montréal à sa collection qu’il tenait à être présent à la distribution dimanche matin, lui qui possède déjà un jeton des postes de péage qui étaient utilisés dans les premières années du pont.

« J’espère que le nouveau va durer plus longtemps », lance-t-il à la blague.

Nathalie Lessard mentionne d’ailleurs que le pont Champlain a laissé sa marque dans l’esprit de beaucoup de personnes de la région de Montréal.

« Avec 50 millions de passages par année, beaucoup d’automobilistes l’ont traversé et il est devenu important dans la vie des gens. »

Facile à donner

Lorsque Les Ponts Jacques Cartier et Champlain ont voulu offrir des souvenirs de l’ancien pont, les rivets ont été choisis pour un avantage précis : leur taille.

« Des composantes de pont, ce sont de gros morceaux, donc il fallait trouver quelque chose qui était facile à distribuer aux gens. Les rivets sont arrivés assez rapidement dans la discussion », explique Mme Lessard.

S’ils ne sont plus utilisés dans la construction des ponts modernes — remplacés par les écrous et les boulons —, les rivets ont aussi une signification particulière, puisqu’ils étaient utilisés pour maintenir ensemble la structure du pont.

Malgré l’effet de la nostalgie, les gens qui ont fait la file pour obtenir un rivet n’avaient pas que de bons souvenirs à partager quant à leurs expériences sur l’ancien pont.

Il faut dire que le pont, qui a été inauguré en 1962, était en proie à de nombreux problèmes, notamment un manque de drainage, qui ont entraîné une corrosion rapide.

Le gouvernement fédéral a annoncé son intention de le remplacer en 2011, alors qu’il avait moins de 50 ans, après la publication de plusieurs rapports alarmants faisant état de sa détérioration.

Pour Léah Lavoie, le rivet qu’elle a récupéré dimanche lui servira donc non seulement de souvenir, mais aussi de rappel des pièges à éviter lorsqu’elle commencera sa future carrière d’ingénieure.

« Il ne faut pas faire les mêmes erreurs que l’on a faites dans le passé », note la diplômée universitaire, qui avait même peur de traverser le pont pendant son enfance — de peur qu’il s’effondre.

Les rivets sont accompagnés d’un avertissement indiquant qu’ils peuvent contenir des traces de peinture au plomb, qui ont été atténuées par une couche protectrice de vernis.

Les Ponts Jacques Cartier et Champlain prévoient recycler environ 90 % de tous les matériaux du pont, y compris 25 000 tonnes d’acier.