Cet été, La Presse vous fait découvrir sept rues piétonnes de Montréal.

Piétonnisée pour un quatrième été, l’avenue Bernard devient une véritable place publique, un lieu de rencontre familial et gourmand. Malgré une programmation culturelle plus mince cette année, la rue mise sur de nouveaux aménagements pour charmer les passants.

« Ici, c’est vraiment notre cour, l’été », souligne Claire Briffault, qui savoure une crème glacée avec sa fille Isaure, devant la crèmerie Bilboquet. « Avec les voisins, on se rencontre ici, on apporte des chips, on vient jaser. »

La rue piétonne ne s’étend que sur trois tronçons de Bernard, mais elle transforme la vie quotidienne dans le quartier. Pendant cinq mois, Bernard devient le point de ralliement des Outremontais.

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Claire Briffault et sa fille Isaure

« Ce qu’on veut créer comme lieu, ce n’est pas juste une rue piétonne, mais vraiment une place publique », explique le maire de l’arrondissement d’Outremont, Laurent Desbois, au téléphone.

Cette année, l’arrondissement a refait une beauté à l’avenue avec de nouveaux aménagements, comme des tables bistro, des bancs de parc et des zones d’ombrage. Une exposition photo des élèves de l’école Paul-Gérin-Lajoie ponctue d’images colorées le chemin des piétons.

Les restaurants qui longent l’avenue Bernard sont un passage incontournable, avec leurs grands parasols et leurs terrasses qui débordent jusque dans la rue.

Devant la Brasserie Bernard, la directrice Cybèle Bartolini accueille les clients avec le sourire. Ce restaurant incontournable du quartier dresse plus de 200 couverts, une fois les terrasses ouvertes.

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Cybèle Bartolini, directrice de la Brasserie Bernard

Ça double notre achalandage et ça crée une belle ambiance : les gens sont heureux d’être dehors et d’avoir le calme.

Cybèle Bartolini, directrice de la Brasserie Bernard

Pour Virginie Portes, une cliente habituée de la brasserie, l’avenue Bernard est « familiale, avec un petit charme à l’européenne ».

Pour cette Outremontaise, une journée passée sur Bernard est une journée idéale. « Je passe acheter un livre à la Librairie du Square, je m’arrête à la brasserie pour manger, ensuite je vais prendre une crème glacée au Bilboquet », décrit-elle.

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Virginie Portes, résidante d’Outremont, fréquente souvent la Brasserie Bernard.

Plus silencieuse, cette année

Dès ses débuts, l’avenue Bernard piétonne a fait le bonheur de la plupart des passants. Dans un sondage de la firme L’Observateur mené en 2021, près de 98 % des répondants se disaient satisfaits des aménagements et avaient une perception favorable de la rue.

Citoyens et commerçants soulèvent toutefois un même bémol, cette année : l’offre culturelle laisse à désirer. « Il y a beaucoup moins de spectacles, comparé à l’an passé », observe Marilou Savoie-Côté, directrice du restaurant Les Enfants Terribles.

Pourtant, l’avenue Bernard avait l’habitude d’en mettre plein la vue à ses piétons, les étés passés, avec des jeux extérieurs géants, des concerts gratuits d’artistes comme Louis-Jean Cormier ainsi que des performances de danse, de théâtre et d’arts du cirque.

« En 2021, la Ville avait mis tellement d’argent sur l’évènementiel, c’était hallucinant, se souvient Cybèle Bartolini. Plein d’artistes étaient venus jouer devant le Théâtre Outremont, juste en face, c’était une ambiance folle. »

Faute d’une programmation aussi riche cette année, les restaurateurs de l’avenue Bernard se sont cotisés pour engager un DJ, qui met de l’ambiance chaque vendredi soir. « On le fait pour que la rue reste cool, jeune et attrayante, qu’il y ait du mouvement », explique Cybèle Bartolini.

Quelques rendez-vous culturels sont prévus par l’arrondissement d’Outremont, comme des prestations d’un trio jazz et un spectacle de marionnettes géantes.

Laurent Desbois reconnaît avoir dû faire des coupe dans l’animation de rue, mais assure qu’il s’agit d’une concession temporaire. « On a vraiment donné un coup et investi dans les aménagements extérieurs, mais pour les prochaines années, on va continuer à développer notre offre culturelle », rassure le maire.

Pas piétonne l’hiver

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De nouveaux aménagements ont été ajoutés à l’avenue Bernard, cet été

D’après Claire Briffault, l’ambiance dans la rue change de façon draconienne à l’automne, quand les voitures reviennent. « Les gens ne s’arrêtent plus, les gens sont pressés à nouveau, il y a moins de liens qui se créent », déplore-t-elle.

Le projet de piétonniser l’avenue Bernard à longueur d’année avait été proposé en 2020 par le Programme d’implantation des rues piétonnes et partagées (PIRPP) de la Ville de Montréal. Abandonnée en 2022, cette idée morte dans l’œuf est largement passée inaperçue.

Laurent Desbois ne prévoit pas réanimer ce projet « difficile à concevoir ».

« Les gens sont réellement enthousiastes pour la rue piétonne l’été, on a eu un appui massif, mais pour l’hiver, on n’a pas senti d’élan de la population », explique-t-il.

En effet, la piétonnisation à longueur d’année en laisse plusieurs dubitatifs, dont Marilou Savoie-Côté, des Enfants Terribles. « Déjà, l’été, il est difficile pour les clients de se stationner. […] J’ai de la misère à imaginer comment ça fonctionnerait », souligne-t-elle.

Pour l’instant, Laurent Desbois priorise d’autres enjeux de mobilité, comme la coexistence entre piétons et cyclistes. « On essaie d’améliorer cette cohabitation chaque année. »

Rouler à vélo était auparavant interdit dans la rue piétonne, mais depuis cet été, les cyclistes ont l’autorisation de circuler librement sur l’avenue Bernard avant 11 h et après 21 h. « On essaie surtout de protéger les plus vulnérables, les aînés et les jeunes enfants », souligne le maire.

Rectificatif
Une correction a été apportée à ce texte après publication. Marilou Savoie-Côté y avait erronément été prénommée Maude. Nos excuses.