Soutenus par plusieurs organisations qui luttent contre la violence conjugale, des centaines de manifestants ont participé à la marche « Ça suffit ! » samedi après-midi au centre-ville de Montréal. Des survivantes réclament des mesures plus sévères pour lutter contre la violence conjugale au Québec.

Le rassemblement était une initiative de Christine Giroux, elle-même victime de violence conjugale pendant 23 ans. Son agresseur a été reconnu coupable 17 fois à son égard, notamment pour viol, séquestration et kidnapping, a-t-elle confié devant la foule.

La survivante réclame des unités sociales dans les postes de police pour faciliter les dénonciations et davantage de places dans les maisons d’hébergement.

Christine Giroux veut également que le gouvernement du Québec hausse le nombre des bracelets antirapprochements prévus dans son programme lancé au printemps dernier. Selon elle, 1000 bracelets, c’est trop peu pour lutter contre les féminicides.

PHOTO DENIS GERMAIN, COLLABORATION SPÉCIALE

Christine Giroux, initiatrice du rassemblement, samedi

« Je demande que chaque récidiviste porte un bracelet électronique », a-t-elle déclaré devant les manifestants.

De la place du Canada aux Jardins Gamelin, on pouvait entendre les manifestants scander « Assez, c’est assez ! ». « Subir la violence n’est pas un choix », pouvait-on lire sur leurs pancartes.

« Je veux raconter mon histoire pour que mon histoire change quelque chose. Je ne veux pas avoir vécu ça pour rien », a raconté Christine Giroux à La Presse.

Pendant quatre ans, la survivante n’est pas sortie de sa maison, traumatisée par son agresseur, qui ne tombait pas sous le coup du programme de bracelets antirapprochements, ayant purgé sa peine dans un établissement fédéral. « Tu sais que je n’arrêterai pas tant que je ne te tuerai pas, c’est mon but », lui a écrit son agresseur quand il est sorti de prison il y a trois semaines.

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Manifestation contre les récents événements de violence conjugale

La loi québécoise stipule que seules les personnes ayant été détenues dans une prison provinciale sont susceptibles de porter le bracelet. Ainsi, celles qui sont incarcérées dans les prisons fédérales, parce qu’elles sont condamnées à une peine de deux ans et plus, échappent au programme.

C’est comme s’il y avait deux catégories de victimes. Est-ce que ça veut dire que celui qui a fait 18 mois de prison est moins dangereux que celui qui a fait cinq ans et demi ?

Christine Giroux, initiatrice du rassemblement

Des survivantes ont également témoigné à la place du Canada avant de défiler dans les rues. La conférencière et survivante Selena Fortier a réitéré que personne n’était à l’abri de la violence conjugale. Émue, Kahoula Grissa, survivante et militante, a ajouté que « quand on est là-dedans, c’est très difficile de sortir de cette relation. On pense à notre sécurité et à nos enfants ».

Une hausse de violence marquée

La police a recensé 114 132 victimes de violence de la part d’un partenaire intime en 2021, et pas moins de 79 % des victimes sont des femmes et des filles âgées de plus de 12 ans, selon la dernière enquête menée par Statistique Canada. La déclaration à la police de ce type de violence conjugale a encore une fois augmenté en 2021, soit de 2 % par rapport à l’année précédente, indique l’étude.

« Certainement, les femmes demandent davantage d’aide », confirme Louise Riendeau, du Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale.

« Les victimes savent qu’elles peuvent porter plainte et savent qu’elles peuvent demander de l’aide. Même si c’est désolant de voir qu’il y a encore de la violence, c’est quand même une bonne nouvelle de voir que les victimes se tournent vers les ressources qui sont là pour elles », ajoute-t-elle.

Depuis le début de l’année, SOS violence conjugale a dénombré 11 féminicides. « Faire le décompte ne réglera pas le problème, on doit bouger », a fait remarquer Madeleine Vachon, militante contre la violence conjugale.

BESOIN D’AIDE ?

Si vous êtes victime de violence conjugale et cherchez aide et répit, contactez SOS Violence conjugale au 1 800 363-9010. Des intervenants y sont disponibles 24 heures sur 24, sept jours sur sept.

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