« J’aurais dû être mieux protégée. »

Jade avait 3 ans lorsqu’elle a été enlevée à sa mère par la DPJ pour être placée en famille d’accueil. Quand elle a atterri chez Éric et sa conjointe, elle s’est attachée à eux. Elle les appelait même papa et maman.

À 9 ans, les agressions ont commencé.

« [Quand ils me l’ont enlevée], je n’allais pas bien, raconte la mère de la jeune victime. Je n’étais pas une bonne mère. Ils n’ont pas fait mieux. »

Pendant six ans, Jade a vécu l’enfer. Selon le résumé conjoint des faits déposé devant le tribunal lors de la reconnaissance de culpabilité d’Éric Jean, tout a commencé par un baiser « avec la langue ». Un baiser qu’elle n’a « pas eu ben ben le choix » de retourner.

Les choses ont vite dégénéré. Il y a eu des attouchements, de la masturbation, puis, quand elle a eu ses règles, des relations sexuelles complètes. « Il m’a acheté des bijoux. Il me donnait des cadeaux. Il a dit qu’il voulait me marier, me faire des enfants », raconte Jade en entrevue avec La Presse. « Je n’ai pas eu de père, alors pour moi, c’était lui mon père et c’était comme ça que je pensais qu’un père était avec sa fille. »

Lorsqu’elle voyait sa mère dans le cadre de visites organisées, la jeune fille faisait des crises de larmes. « Je pleurais dans ses bras. Ça a commencé en même temps que les agressions », dit-elle.

« Et moi, chaque fois, ils me disaient que c’était de ma faute si elle ne voulait pas y retourner », rage la maman.

En plus des agressions d’Éric Jean, Jade affirme avoir été victime de plusieurs autres hommes et adolescents dans la maison. « La question, ce n’est pas qui m’a agressée, mais qui ne m’a pas agressée », laisse-t-elle tomber.

Le fils de M. Jean et un mineur hébergé dans la ressource font aussi l’objet d’accusations criminelles.

Pour l’adolescente, qui aura 18 ans dans quelques mois, les conséquences sont lourdes. La semaine dernière, elle s’est frappé la tête contre le mur parce qu’elle était hantée par des souvenirs. Elle a subi une commotion cérébrale, affirme sa mère.

« Les séquelles sont graves au point où on ne sait pas ce qu’on va faire avec elle quand elle va avoir 18 ans, dit cette dernière. [Jade] est incapable de ne pas se mettre dans une situation dangereuse. Sa notion de la sexualité n’est pas bonne. Elle ne sait pas comment interagir avec les hommes. »

La jeune femme raconte souffrir de crises de panique et de flash-backs. Elle dit aussi être tombée enceinte dans le passé.

« Elle voit Éric partout. Elle le voit dans sa chambre. Tout le lui rappelle, une odeur, une voix qui lui ressemble. Quand elle vient dormir chez moi, elle couche dans mon lit », dit sa mère.