(Québec) Éclairage aux DEL, récupération de chaleur dans les hôpitaux et électrification des ambulances : décarboner l’imposant réseau de la santé d’ici 2040 coûterait 3,8 milliards à l’État, à condition que le gouvernement Legault s’y engage dès maintenant, conclut une nouvelle étude.

Dans un rapport qui sera rendu public ce mardi, l’Association pour la santé publique du Québec (ASPQ) offre au ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) une feuille de route « clés en main » vers l’atteinte de l’objectif zéro émission.

Le plan de match, signé Dunsky Énergie+Climat – une firme qui collabore déjà avec le gouvernement du Québec vers la carboneutralité –, établit des recommandations pour les secteurs les plus énergivores du réseau : les bâtiments (hôpitaux, CHSLD) et les transports.

C’est l’ASPQ qui a mandaté Dunsky en mai dernier, grâce au soutien financier de la Fondation Familiale Trottier, qui finance des projets à caractère environnemental, notamment. L’association estime que décarboner le système de la santé répondrait « aux objectifs climatiques » du Québec tout en ayant des effets sur la santé de la population en général.

Le réseau de la santé représente à lui seul 3,6 % des émissions du Québec, soit 2,7 millions de tonnes de gaz à effet de serre (GES) provenant principalement des bâtiments, des transports et des émissions indirectes, écrit Dunsky dans le rapport consulté par La Presse.

Sans surprise, la majorité des émissions sont encore générées par des énergies fossiles utilisées pour le chauffage.

INFOGRAPHIE LA PRESSE

Portrait des émissions de GES en santé

Les hôpitaux sont les plus importants émetteurs en raison de leur « intensité énergétique » plus élevée que les autres bâtiments du réseau. Ils « se démarquent » par un taux d’activités important et surtout « un taux de ventilation élevé pour se conformer aux normes sanitaires », écrit-on.

« Changements majeurs »

« Nous reconnaissons qu’il existe des enjeux importants pour rendre le secteur de la santé zéro émission et plusieurs avenues pour y parvenir, plus particulièrement pour les bâtiments », souligne d’ailleurs la firme, qui rappelle que le réseau compte 1534 bâtiments.

« La transition vers des établissements de santé zéro émission d’ici 2040 nécessite des changements majeurs en termes de sources d’énergies consommées et […] dans les systèmes de chauffage et de ventilation : une augmentation de la consommation d’électricité est à prévoir », écrit-on.

Selon la firme, l’État devrait débourser 3,8 milliards d’ici 2040, dont 1,6 milliard d’ici cinq ans, pour atteindre zéro émission.

La récupération de chaleur des bâtiments et la substitution des énergies fossiles sont les mesures de transition qui nécessiteront le plus d’investissements, selon Dunsky.

  • Récupération de chaleur : 2 milliards d’investissements d’ici 2040 pour une réduction de 2,8 millions de tonnes de GES
  • Substitution des énergies fossiles : 1,18 milliard d’investissements d’ici 2040 pour une réduction de 4,5 millions de tonnes de GES

Source : rapport de Dunsky Énergie+Climat

« La feuille de route offre un ordre de grandeur des investissements et du rythme des efforts requis à l’échelle de la province d’ici 2040 », peut-on lire dans le rapport de Dunsky Énergie+Climat.

On explique également que ce scénario « n’a pas pour objectif d’imposer une vision unique pour la décarbonation du secteur, mais plutôt d’offrir une base de référence robuste sur laquelle s’appuyer pour proposer des initiatives et des actions structurantes ».

Le plan présenté mardi pourrait par ailleurs entraîner des économies de l’ordre de 787 millions, dont 571 millions grâce à la décarbonation des bâtiments et 216 millions avec l’électrification du parc de véhicules.

Défis et occasions

Or, les établissements de santé, malgré les défis soulignés, « présentent des profils et des opportunités uniques en matière de récupération de chaleur », précise le rapport. Il s’agit « d’une mesure phare » pour arriver à décarboner le secteur de la santé.

La feuille de route de décarbonation élaborée par la firme vise d’ailleurs à réduire la consommation d’énergie totale de 25 % avant d’avoir recours aux énergies renouvelables.

Pour y arriver, on propose l’installation d’ampoules DEL dans l’ensemble des établissements pour une diminution de 6 % de la consommation totale d’énergie d’ici 2040.

Après l’éclairage aux DEL, la récupération de chaleur a le potentiel de réduire de 15 % la consommation totale d’énergie. La firme note que la plupart des établissements n’ont pas de systèmes permettant une telle récupération, donc des « modifications importantes, ou des remplacements complets des systèmes mécaniques sont nécessaires ».

On recommande enfin que « les usages restants de gaz naturel après la récupération de la chaleur » soient convertis aux énergies renouvelables pour récupérer 4 % de la consommation totale.

Réduction de la consommation d’énergie de 25 % dans les bâtiments

  • Éclairage aux DEL : 6 %
  • Récupération de chaleur : 15 %
  • Substitution des énergies fossiles : 4 %

Source : rapport de Dunsky Énergie+Climat

Dans son rapport, Dunsky souligne que le gouvernement Legault a déjà entamé sa transition vers l’électrification complète des véhicules légers d’ici 2030, tandis que « 40 % des véhicules légers du réseau de la santé sont déjà électriques ».

Pour « compléter la décarbonation du parc de véhicules », il faudra électrifier les « véhicules routiers » comme les ambulances et les camionnettes. L’électrification des ambulances « demeure un défi », écrit la firme, indiquant que les « enjeux diffèrent d’une région à l’autre ». La firme estime que des investissements de 480 millions seront nécessaires d’ici 2040 pour électrifier les ambulances.