(Bangkok) L’éducation de millions d’enfants est menacée par le changement climatique, comme l’a prouvé le mois dernier la vague de chaleur qui a frappé l’Asie et contraint à des fermetures d’écoles.

Si l’arrivée des pluies saisonnières a offert un certain répit dans certaines régions, les experts redoutent que ce type de problème ne s’aggrave avec à terme de graves conséquences sur la scolarité.

L’Asie se réchauffe plus rapidement que la moyenne mondiale avec des vagues de chaleur plus fréquentes, plus longues et plus intenses, mais la hausse des températures n’est pas l’unique défi à relever.

Une atmosphère plus chaude s’accompagne de davantage d’humidité, ce qui peut conduire à de fortes précipitations et des inondations pouvant causer des dégâts dans les écoles ou entraîner leur fermeture afin qu’elles servent d’abris.  

Par ailleurs, des températures plus élevées peuvent engendrer des incendies de forêt et des pics de pollution, obligeant là aussi des établissements scolaires à fermer, comme cela s’est déjà produit en Inde ou en Australie.

« La crise climatique est déjà une réalité pour les enfants d’Asie de l’Est et du Pacifique », a averti l’an passé le Fonds des Nations unies pour l’enfance (UNICEF).

Mohua Akter Nur, 13 ans, en est la preuve vivante. Depuis la fermeture de son école, elle étouffe dans la seule pièce que compte sa maison à Dacca, la capitale du Bangladesh.

PHOTO MUNIR UZ ZAMAN, AGENCE FRANCE-PRESSE

Mohua Akter Nur

Les coupures d’électricité étant fréquentes, l’adolescente ne peut pas compter sur un ventilateur pour rafraîchir son logement exigu.

« La chaleur est insupportable », a-t-elle expliqué à l’AFP le mois dernier. « Notre école est fermée, mais je ne peux pas étudier à la maison. »

Le mois d’avril a marqué le 11mois consécutif de chaleur record à l’échelle mondiale, et au Bangladesh, ce phénomène est évident, remarque Shumon Sengupta, directeur national de l’ONG Save the Children. « Non seulement les températures sont plus élevées, mais cela dure beaucoup plus longtemps », selon lui.

Modernisation des infrastructures

« Auparavant, peu de régions étaient touchées par ces vagues de chaleur, alors qu’aujourd’hui, cela représente une partie plus importante du pays », souligne-t-il.  

En Asie, la majeure partie des écoles ne sont pas équipées pour faire face aux conséquences croissantes du changement climatique. Les écoles situées dans les zones urbaines du Bangladesh sont souvent surpeuplées et peu ventilées, affirme M. Sengupta.  

Dans les zones rurales, les toits en tôle ondulée peuvent transformer une salle de classe en véritable four et l’électricité destinée à alimenter les ventilateurs vient parfois à manquer.

Au Bangladesh et ailleurs, les élèves marchent souvent sur de longues distances pour se rendre à l’école et en revenir, risquant ainsi une insolation.  

La fermeture des établissements scolaires peut avoir de graves répercussions « en particulier pour les enfants des communautés pauvres et vulnérables qui n’ont pas accès à des ressources comme les ordinateurs, internet et les livres » ou à un domicile suffisamment protégé de la chaleur, a déclaré Salwa Aleryani, spécialiste de la santé pour l’UNICEF en Asie de l’Est et dans le Pacifique.  

Parfois laissés sans surveillance par leurs parents qui n’ont pas les moyens de rester avec eux, ils ont plus de chances d’être victimes de trafic ou contraints de travailler ou de se marier, estime Mme Sengupta.

Le changement climatique menace également la scolarisation de manière indirecte.  

Des recherches conduites par l’UNICEF en Birmanie ont montré que les pénuries de récoltes causées par la hausse des températures et l’imprévisibilité des précipitations conduisent des familles à déscolariser leurs enfants pour qu’ils les aident, ou faute de moyens pour payer les frais de scolarité.

Certains pays riches de la région ont pris des mesures pour veiller à ce que l’éducation ne soit pas affectée par le changement climatique.

Au Japon, moins de la moitié des écoles publiques étaient climatisées en 2018, mais ce chiffre est passé à plus de 95 % en 2022.

Les pays en développement ont besoin d’aides afin d’investir dans la modernisation des infrastructures, souligne M. Sengupta. Mais la seule véritable solution à la crise est de s’attaquer à la cause première : le changement climatique.