Les cimenteries devront réduire leurs émissions de gaz à effet de serre (GES) de gré ou de force, prévient le gouvernement Legault, qui dévoilera ce vendredi le troisième « plan de mise en œuvre » de ses objectifs de lutte contre les changements climatiques.

La Presse a obtenu d’une source ayant accès au plan les détails des mesures concernant le secteur industriel, qui est le deuxième générateur de GES en importance de la province.

Québec aidera financièrement les grandes entreprises industrielles à réduire leurs émissions, dont les cimenteries, mais ces dernières se verront aussi imposer une « obligation de résultat », explique cette source, qui n’était pas autorisée à parler publiquement du plan avant son annonce officielle.

« Si ce qui est proposé volontairement [par les cimenteries] n’est pas suffisamment conséquent ou important, c’est là qu’on pourra ajouter des contraintes à travers la réglementation », explique cette source.

Le gouvernement pourrait aussi inclure de nouvelles exigences à l’égard des cimenteries dans leur « autorisation ministérielle », un document qui encadre l’exploitation d’un établissement industriel, qui doit être renouvelé d’ici la fin du mandat du gouvernement caquiste.

« Le timing peut difficilement être meilleur », explique cette source.

Québec s’apprête aussi à « optimiser » le marché du carbone conjoint avec la Californie, notamment en accélérant plus rapidement que prévu la baisse des plafonds d’émissions imposés aux grands émetteurs de GES, une limite souvent jugée inefficace, parce que trop permissive.

Le ministre de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs, Benoit Charette, était d’ailleurs en Californie à la fin d’avril pour des discussions sur le sujet.

Des millions pour les « bioénergies »

Québec consacrera 175 millions de dollars supplémentaires aux grandes industries pour les « aider à recourir aux biocarburants plutôt qu’aux énergies fossiles », explique cette source, évoquant la biomasse ou le gaz naturel « renouvelable ».

L’aide à l’électrification, qui figurait dans le précédent plan de mise en œuvre, demeurera offerte.

Ce qui était performant dans le précédent plan est maintenu. Il y a beaucoup d’argent pour la conversion des systèmes énergétiques et la sobriété.

Source anonyme ayant accès au plan de mise en œuvre

Le gouvernement bonifie également d’autres programmes qui aident les industries à réduire leurs émissions, comme le « Défi GES ».

Ce programme est une espèce de « concours » invitant les entreprises à soumettre un projet de réduction de ses émissions et au terme duquel les propositions les plus efficaces obtiennent une aide financière.

« Ça nous aide beaucoup au niveau de notre bilan », affirme cette source.

À elles seules, les mesures destinées au secteur industriel devraient permettre une réduction des émissions de GES de 5,1 millions de tonnes par année d’ici 2030, calcule Québec.

Plan encore incomplet

Ce troisième plan de mise en œuvre du Plan pour une économie verte (PEV), qui couvre la période 2023-2028, bénéficie d’un budget de 9 milliards de dollars, une bonification de 1,4 milliard annoncée dans le budget du ministre des Finances Eric Girard, en mars.

Aucun autre secteur de dépenses n’a obtenu une hausse aussi importante, souligne-t-on à Québec.

Le plan n’identifie toutefois pas encore la totalité des moyens nécessaires pour atteindre la cible de réduction des émissions de GES du Québec, qui est de 37,5 % sous leur niveau de 1990 d’ici 2030.

Le premier plan de mise en œuvre n’identifiait que 42 % des moyens d’atteindre cet objectif, un taux qui montait de 9 points de pourcentage dans le deuxième plan, l’an dernier, pour atteindre 51 % des mesures identifiées.

Le troisième plan permettra un bond « comparable », selon notre source, qui n’a pas voulu être plus précise avant l’annonce de ce vendredi.

« Avec des bonds semblables, on peut de façon très crédible dire qu’on va atteindre notre cible en 2030, dit-elle. On sera peut-être un des seuls États dans le monde à être en mesure d’atteindre ses cibles. »

En savoir plus
  • 1,4 million
    Émissions de gaz à effet de serre (en tonnes) en 2021 de la cimenterie de Port-Daniel–Gascons, en Gaspésie, le plus gros émetteur de GES du Québec
    Source : ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs du Québec
  • 77 millions
    Émissions de gaz à effet de serre (en tonnes) du Québec en 2021
    Source : ministère de l’Environnement et du Changement climatique du Canada