Les groupes de maternelle 4 ans, qui peuvent compter jusqu’à 17 enfants, sont trop grands, particulièrement quand il s’agit de milieux défavorisés, déplorent des enseignantes et des directions d’école consultées par le ministère de l’Éducation.

Dans un rapport sur ces classes publié récemment par le Ministère, on lit que la question du nombre d’enfants par classe est un « élément majeur » soulevé dans des groupes de discussion.

« Plusieurs ont souligné que le ratio de la maternelle 4 ans devrait être le même que celui des centres de la petite enfance (CPE), c’est-à-dire 10 enfants par classe. D’autres estiment qu’un ratio idéal pourrait varier entre 10 et 14 enfants », écrit le Ministère.

Les témoignages cités vont dans ce sens.

À 17 élèves, nous éteignons les feux. Nous n’avons pas le temps de bien faire les choses en professionnels.

Un ou une répondante d’un groupe de discussion du ministère de l’Éducation

« Des fois, on rentre dans des classes de 17 enfants avec d’énormes besoins, puis on se dit : “Ayoye !” Tu sais, en CPE, ils sont 10 […]. C’est quand même drôle que, pour la même tranche d’âge, le même gouvernement [mette] deux ratios différents », relève un autre.

Le ministère de l’Éducation écrit dans ce rapport qu’il ne sait pas combien on compte d’enseignantes de maternelle 4 ans dans la province.

« En supposant que chaque classe comptait une enseignante ou un enseignant, il est possible d’estimer que 58,4 % (814/1394) du personnel enseignant de la maternelle 4 ans a répondu au sondage », lit-on.

La création de 2600 de ces classes en quatre ans était une promesse phare de la Coalition avenir Québec quand elle a été élue, en 2018. La livraison de ces classes a finalement été repoussée à 2029-2030, advenant que la CAQ récolte un troisième mandat.

Manque d’aide pour les enfants à besoins particuliers

L’implantation des maternelles 4 ans vise surtout à agir tôt dans le parcours des enfants pour améliorer leur réussite éducative.

Or, près de 60 % des enseignantes ont jugé qu’elles manquaient de ressources pour accompagner les enfants ayant des besoins particuliers.

Elles déplorent le manque de psychologues, de psychoéducatrices, d’orthopédagogues, d’orthophonistes, d’ergothérapeutes.

« Dans plusieurs milieux, les demandes pour ces services doivent être adressées au réseau de la santé et des services sociaux dans le cadre du programme Agir tôt. Or, selon le personnel enseignant, des demandes de services demeurent souvent sans réponse ou entraînent de longs délais d’attente », lit-on.

En conséquence, des enseignantes se sentent « impuissantes ». « D’autres déplorent que l’on puisse “vendre” aux parents l’idée que la maternelle 4 ans offrira des services aux enfants qui en ont besoin, alors que cela ne correspond pas à la réalité du terrain », écrit Québec.

Parmi les enseignantes de maternelle 4 ans consultées par Québec, quatre sur dix jugent que le temps de la « ressource additionnelle », une personne qui leur vient en aide en classe, est insuffisant.

« La plupart du temps, il y a des élèves qui ont de grands besoins [propreté, difficultés de langage, difficultés motrices, s’habiller seul, comportements violents, etc.]. Par les années passées, j’avais 16 ou 17 élèves avec une ressource à temps partiel et c’était extrêmement éprouvant et difficile », dit l’une d’elles.

« Lorsqu’il est dit que nous avons un soutien d’une personne additionnelle, il faudrait que ce soit réel. Je sais qu’il y a un manque de personnel partout, mais au départ, j’étais supposée avoir 15 heures par semaine et, finalement, il est très rare que la personne soit là (souvent, je ne la vois pas de la semaine) », écrit une autre.

Des écoles mal adaptées

Les écoles primaires, qui accueillent de plus en plus les petits de 4 ans, ne sont pas toutes aménagées adéquatement pour les recevoir, constate-t-on également dans ce rapport.

Parmi les problèmes figurent « les casiers et lavabos trop hauts, chaises et tables ne correspondant pas à la taille des enfants, toilettes parfois éloignées de la salle de classe, locaux trop petits pour l’aménagement des aires de jeux ».

Près de 40 % des enseignantes estiment disposer « d’un nombre insuffisant de livres dans leur classe ». Une même proportion dit manquer de matériel pour les jeux extérieurs et plus de 60 % constatent que la cour d’école n’est pas aménagée pour les enfants de 4 ans.

« Il s’agit d’un enjeu important, puisque le Programme-cycle de l’éducation préscolaire préconise les jeux extérieurs », écrit le Ministère.