Des élèves de Montréal devront prendre leur mal en patience avant de retrouver leurs écoles de quartier. Une école vétuste sera fermée au moins 10 ans, une autre sera finalement rénovée et prête à rouvrir… en 2032, si tout va bien.

L’Académie de Roberval a perdu le lustre de ses belles années. Au passage de La Presse la semaine dernière, les fenêtres de l’école secondaire du quartier Villeray étaient placardées, des déchets jonchaient le terrain, un sans-abri dormait devant l’une des portes d’entrée.

Ce bâtiment désigné « d’intérêt patrimonial et architectural […] de valeur exceptionnelle » par la Ville de Montréal est fermé et vidé de ses élèves depuis la fin de 2017, pour cause de moisissures. Depuis, les délais pour sa rénovation n’en finissent plus de s’allonger.

Dès 2019, des parents dénonçaient à La Presse la lenteur des travaux. L’automne dernier, le journal Métro rapportait que les élèves retrouveraient leur école à la rentrée 2025. Ça ira finalement à 2027, lit-on dans de récents documents du centre de services scolaire de Montréal (CSSDM).

Les travaux ont-ils seulement commencé ? Non. Le CSSDM répond qu’il s’agit d’un projet « prioritaire », mais qu’il faut davantage d’argent « en lien avec la surchauffe du marché de la construction ».

« Ainsi, plans et devis sont prêts à 100 % pour l’appel d’offres de la phase 1 des travaux. Dès l’aboutissement des démarches concernant le complément de financement requis, le CSSDM sera prêt à procéder au lancement de l’appel d’offres de construction », a répondu son porte-parole, Quentin Parisis.

En attendant, les élèves de cette école sont relogés dans une section de l’école secondaire Georges-Vanier, non loin de là.

PHOTO JOSIE DESMARAIS, LA PRESSE

L’Académie Roberval est désignée « d’intérêt patrimonial et architectural […] de valeur exceptionnelle » par la Ville de Montréal.

Des impacts pour les élèves

Les déplacements d’élèves : c’est le sujet principal des plaintes des parents, dit d’entrée de jeu Sylvain Martel, porte-parole du Regroupement des comités de parents autonomes du Québec (RCPAQ).

Ces « jeux de dominos » ont souvent des impacts sur le transport scolaire, les horaires, le temps de déplacement pour les enfants, relève-t-il.

On a beau faire du rattrapage, on sait dans quel état est le parc immobilier [des écoles]. Des tuyaux qui pètent et des murs de briques qui tombent, ça ne va pas arrêter parce qu’on répare trois ou quatre écoles.

Sylvain Martel, porte-parole du Regroupement des comités de parents autonomes du Québec

Selon le plus récent Plan québécois des infrastructures, 62 % des écoles primaires et 65 % des écoles secondaires sont en mauvais ou très mauvais état (indice de D ou E).

Au CSSDM, on indique que pour l’année scolaire à venir, c’est environ 4 % des 75 000 élèves qui seront relogés, soit environ 3000 élèves.

Sylvain Martel cite notamment la « saga » de l’école Sophie-Barat. Une partie de cette école a été fermée en catastrophe à quelques jours de la rentrée scolaire 2020 parce qu’il y avait menace d’effondrement.

PHOTO ROBERT SKINNER, ARCHIVES LA PRESSE

L’école Sophie-Barat, en juin 2021

Les élèves des première et deuxième années du secondaire régulier ont été déplacés dans une école du quartier Saint-Michel.

« Je pense qu’on arrive bientôt à un point où il y a des enfants qui vont avoir connu seulement l’école à moitié fermée », dit M. Martel.

Cette école, la plus vieille que possède le CSSDM, est à rénover complètement. Pour accueillir les élèves qui devront la quitter, on est en train de construire une école neuve, qui ouvrira théoriquement en 2026-2027. Suivront au minimum cinq ans de rénovation du bâtiment du quartier Ahuntsic, ce qui devrait mener à la réouverture de l’école en 2032.

Exaspéré, le syndicat d’enseignants de cette école a écrit l’hiver dernier au premier ministre François Legault, mais aussi au ministre de l’Éducation, Bernard Drainville, pour dénoncer une « situation extrêmement difficile qui dure depuis plusieurs années ».

Pas juste à Montréal

Les travaux qui s’étirent et les déménagements ne sont pas le seul fait de Montréal. À Laval, des élèves devront s’armer de patience avant d’intégrer leur nouvelle école secondaire, qui devait être terminée pour la prochaine rentrée scolaire.

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

La construction de cette école de Laval devait être terminée pour la rentrée scolaire – ce ne sera finalement pas le cas.

En avril dernier, la Société québécoise des infrastructures (SQI), qui gère le projet de 230 millions, a informé le centre de services scolaire de Laval « qu’en raison de différents obstacles hors de son contrôle et survenus dans le cadre des travaux en cours », l’ouverture de l’école devait être repoussée d’un an, lit-on dans un communiqué qui a été publié au printemps.

Des retards dans les travaux qui ont « toutes sortes d’implications », dit Sylvain Martel.

« Des élèves devaient rentrer dans cette nouvelle école où il n’est pas prévu qu’on porte l’uniforme, mais se retrouvent maintenant pour un an dans une école qui requiert un uniforme. Les parents devront l’acheter pour une seule année », explique M. Martel.

Une dépense de plusieurs centaines de dollars pour une seule année. « C’est à Laval-des-Rapides, qui n’est pas le quartier le plus aisé de Laval », souligne le porte-parole du RCPAQ.