Le chef de l'ADQ, Gérard Deltell, n'exige pas la démission de M. Charest, ni des élections. Il demande plutôt aux députés libéraux de faire pression à l'interne sur leur chef pour le convaincre «d'écouter la population» et déclencher une commission d'enquête publique.

«J'en appelle au sens de l'honneur des députés libéraux. Allez frapper à la porte de votre chef et dites-lui: M. Charest, assez, c'est assez.»

M. Deltell refuse de dire que sa demande est irréaliste. Il pense que plusieurs députés libéraux sont eux-mêmes embarrassés par le contenu du rapport Duchesneau. «Pensez-vous que ces gens-là sont heureux de voir ça?», demande-t-il.

En novembre 2010, M. Deltell s'était adressé par écrit aux députés libéraux élus pour la première fois en 2008. «Avant d'être membre du parti gouvernemental, vous êtes d'abord et avant tout député. Comme député libéral, vous êtes d'abord député, ensuite libéral. Vous n'êtes pas obligé d'endosser toutes les décisions du gouvernement. Votre obligation, elle est envers vos concitoyens », écrivait-il.

Il ne parlait pas des ministres, qui doivent récolter 100 000 $ pour leur parti.

Déçu

Jean Charest a «déçu» M. Deltell ce matin. «(Il) a parlé comme chef du Parti libéral du Québec plutôt que comme chef de tous les Québécois». Il se désole que M. Charest n'ait pas lu le rapport.

Selon le chef adéquiste, M. Charest a placé «ses intérêts partisans devant les intérêts supérieurs de la nation». Il ne comprend pas pourquoi M. Charest parle encore « d'allégations». « Le premier ministre argumente en disant: c'est des allégations, il n'y a pas de preuves. Mais ce sont des preuves, qui sont documentées et expliquées. Qu'est ce que ça lui prend de plus au premier ministre?».

«Ce document contient des preuves les unes par-dessus les autres. Ce n'est pas un quidam qui l'a écrit, c'est Jacques Duchesneau qui a été mandaté par le gouvernement», ajoute-t-il.

L'ADQ rappelle que le rapport contient des propos «extrêmement lourds de conséquences». Le système de corruption et de collusion dont parle l'Unité anticorruption (UAC) est «un système qui émane du gouvernement, d'un mandat que le gouvernement a donné»,soutient sa leader parlementaire, Sylvie Roy.

Même si les enquêtes policières permettaient d'accuser des individus, le système de corruption et collusion resterait en place. D'où la nécessité d'une enquête publique, argue M. Deltell. « C'est bien beau de mettre les bandits en prison, mais ça ne s'attaque pas à la racine du problème. Seule une enquête publique va le faire.»

Pas de halte aux chantiers

Contrairement à Québec solidaire, l'ADQ n'estime pas qu'il faudrait ralentir ou interrompre les travaux en infrastructures en attendant que la lumière soit faite sur l'industrie de la construction. «Si on gèle tout au Québec, on n'est pas plus avancé. Ce qu'il faut, c'est de l'action, (...) une commission d'enquête.»

Dans son rapport, l'UAC expliquait que le ministère des Transports a été vidé de ses ressources. Il manque de personnel qualifié pour surveiller les chantiers, y écrit-on. L'ADQ prône quant à elle une réduction de la taille de l'État. Il y a quelques mois, M. Deltell indiquait qu'il fallait couper environ 13 000 postes de fonctionnaires. Il n'avait pas précisé où il effectuerait ces coupes.

Il reconnaît que le ministère des Transports manque de ressources pour contrôler les chantiers. L'ADQ se défend en disant qu'on pourrait diminuer la taille du ministère tout en améliorant sa surveillance des chantiers. «Il y a certainement du ménage à faire au ministère des Transports, (sans) enlever l'expertise», a affirmé Mme Roy. «Ce qu'on demande, c'est de se concentrer sur les missions essentielles de l'État, et c'en est une», a ajouté M. Deltell.