(Montréal) Un cocktail d’anticorps développé par l’entreprise québécoise Immune Biosolutions aurait démontré son efficacité à apaiser les symptômes respiratoires causés par la COVID-19 lors de la phase aiguë de la maladie.

Le médicament nommé IBIO123 a franchi les deux premières phases d’essais cliniques et les résultats obtenus par l’entreprise établie à Sherbrooke font l’objet d’un article scientifique publié lundi dans la revue The Lancet Infectious Diseases.

Pour le chef de la direction d’Immune Biosolutions, Luc Paquet, cette publication dans une prestigieuse revue médicale constitue une précieuse reconnaissance scientifique pour son équipe.

En plus de s’avérer efficace pour empêcher le virus de causer des dommages dans les poumons, le médicament serait aussi le tout premier traitement d’immunothérapie par inhalation contre la COVID-19.

On administre l’IBIO123 par nébulisateur. C’est-à-dire que le patient respire pendant quelques minutes une sorte de vapeur contenant le médicament. Ainsi, les anticorps sont dirigés directement vers les poumons, où ils s’attaquent au foyer d’infection.

« Personne au monde, jusqu’à présent, n’avait essayé de donner des anticorps par inhalation, autant pour la COVID que pour d’autres maladies respiratoires », affirme le chef des affaires médicales chez Immune Biosolutions, le Dr Bruno Maranda. « On pensait que ce n’était pas possible, mais en fait les anticorps peuvent être compatibles avec ce mode d’administration-là », assure-t-il.

Le Dr Maranda est coauteur principal de l’article intitulé « Safety and efficacy of inhaled IBIO123 for mild-to-moderate COVID-19 : a randomised, double-blind, dose-ascending, placebo-controlled, phase 1/2 trial ».

D’après les résultats dévoilés, les essais cliniques à double insu ont été menés auprès de 162 patients adultes souffrant de symptômes légers ou modérés de la COVID-19. Au jour 8 de la maladie, 41 % des personnes traitées jouissaient d’une résolution de leurs symptômes respiratoires contre 17 % des personnes ayant reçu un placebo. Parmi les patients à haut risque, le taux de succès s’élève à 35 % avec l’IBIO123 par rapport à 10 % avec le placebo.

Les études ont été menées sur des patients infectés par le variant Omicron, mais le médicament demeurerait efficace contre tous les variants et sous-variants du SRAS CoV-2 connus jusqu’ici.

Trois fronts

Ce nouveau médicament a été conçu à partir d’anticorps monoclonaux récoltés auprès de patients ayant combattu la COVID-19. Immune Biosolutions a étudié ces anticorps et est parvenue à les répliquer. L’entreprise a ensuite choisi de créer un cocktail d’anticorps permettant d’attaquer le virus sur trois fronts.

La combinaison choisie par l’équipe scientifique d’Immune Biosolutions a aussi la particularité de viser une partie du virus n’ayant pratiquement pas été affectée par les mutations et qui semble peu susceptible de l’être. Selon les explications fournies par le Dr Maranda, la stratégie employée a été de cibler la partie S2 du spicule du virus.

« C’est comme si l’on créait une torsion dans le spicule et il n’est plus capable de faire sa fonction biologique de se lier et de rentrer dans les cellules [humaines] », décrit le généticien.

Phase 3

Dans la foulée des investissements massifs pour lutter contre la pandémie, Immune Biosolutions a bénéficié d’un soutien financier de 4,5 millions du gouvernement du Québec et de 13,44 millions du gouvernement du Canada. Des investisseurs privés ont aussi injecté près de 5 millions dans l’aventure.

Pour la suite des choses, l’entreprise affirme être en négociations avec d’éventuels partenaires en vue d’une étude de phase 3. Le défi consiste à trouver les ressources nécessaires pour une production à grande échelle permettant de mieux évaluer l’ensemble des effets et des risques liés au traitement sur un plus grand bassin de patients.

Les centres de recherche du Centre hospitalier universitaire de Montréal (CHUM) et du CHU Sainte-Justine ont collaboré aux travaux.

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