Quatre ans après l’apparition des premiers cas de ce que l’on a ensuite nommé la COVID-19, les infections continuent de se répandre et d’entraîner de nouveaux cas de la forme longue de la maladie. Toutefois, le mystère qui entoure encore ce mal persistant limite la capacité d’intervention des professionnels de la santé.

D’après de récentes données dévoilées par l’Enquête canadienne sur la santé et les anticorps contre la COVID-19 (ECSAC), environ un adulte canadien sur neuf, soit 11,7 % de la population, affirme avoir souffert de symptômes à long terme à la suite d’une infection au virus du SRAS-CoV-2.

La définition de la COVID longue parle de symptômes toujours présents plus de trois mois après l’infection et qu’on ne peut pas attribuer à une autre cause.

Toujours selon l’enquête menée par Statistique Canada et l’Agence de la santé publique du Canada, les deux tiers des personnes souffrant de COVID longue et ayant cherché à obtenir des soins disent ne pas avoir reçu de services adéquats pour traiter leurs symptômes.

Chaque province a adopté sa propre offre de service pour prendre en charge ces patients. Au Québec, le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) a déployé un réseau de cliniques spécialisées dans l’ensemble des régions. Or, on y observe un accès et un niveau de soins qui varie d’un endroit à l’autre, reconnaît le directeur de la clinique spécialisée pour les affections post-COVID-19 du CIUSSS de l’Estrie-CHUS, le Dr Alain Piché.

Il rapporte que plusieurs de ses patients doivent se battre pour être référés à sa clinique parce que leur médecin de famille ne les croit pas ou ne croit pas à l’existence de la COVID longue alors que des preuves scientifiques « démontrent qu’il s’agit d’un mal bien réel », précise le professeur au département de microbiologie et d’infectiologie de la faculté de médecine de l’Université de Sherbrooke.

Mais si l’on est en mesure de confirmer que la maladie existe, on s’explique encore bien mal son mécanisme. Diverses hypothèses sont étudiées par les scientifiques, dont « la persistance virale, une inflammation à bas bruit, des troubles vasculaires, des troubles de microcaillots ou la production d’auto-anticorps », énumère le Dr Piché. Il pourrait même s’agir d’une combinaison de plusieurs de ces mécanismes.

Certaines pistes laissent croire que l’hypothèse d’une persistance de l’infection, c’est-à-dire que le virus se cache dans une région du corps – possiblement dans le tube digestif ou dans le système nerveux central –, pourrait être à privilégier. Des études sont en cours avec des patients traités au médicament antiviral Paxlovid afin de vérifier s’il s’avère efficace. Ce même traitement est utilisé à titre préventif lors d’infection à la COVID-19 chez les patients considérés à risque.

D’autres médicaments sont aussi mis à l’essai dans le but de valider les autres hypothèses, soit des traitements qui ciblent l’inflammation, la vascularisation ou la production d’auto-anticorps.

Apprivoiser sa condition

La liste de symptômes ressentis par les patients est longue et diversifiée. On parle de troubles neurologiques, de douleurs, de fatigue chronique, d’essoufflement, d’engourdissements. Comme plusieurs de ces symptômes sont « subjectifs » et difficilement mesurables par les divers tests médicaux disponibles, cela ajoute à la détresse des patients.

Pour le Dr Alain Piché, le premier geste à poser auprès d’un nouveau patient reste de l’écouter et de le croire. « Déjà, les patients vont se sentir mieux », affirme-t-il.

Si les symptômes varient, le portrait d’ensemble est tout de même « assez typique », note le microbiologiste-infectiologue.

Il faut tout de même s’assurer d’éliminer les autres possibilités avant de prononcer un diagnostic clair. Les signes de la COVID longue ressemblent parfois à s’y méprendre à ceux d’autres syndromes post-infection comme l’encéphalomyélite myalgique qui peut être associée à une infection à la mononucléose ou encore comme la maladie de Lyme.

Puis, si l’on ne dispose pas encore de médication précise, on parvient à améliorer le quotidien des patients par la réadaptation. Le Dr Piché explique que bon nombre de patients souffrent de malaises post-effort. Il faut donc leur apprendre à fractionner leurs efforts pour apaiser leurs maux.

Une manière de s’adapter à sa condition qui permettrait à bien des gens de mieux vivre avec leur COVID longue en attendant de pouvoir s’en débarrasser.

D’autres patients plus chanceux vont voir leurs symptômes disparaître au bout de six mois ou un an sans trop que l’on puisse l’expliquer. Ce qui ajoute une couche de plus au mystère de la COVID longue.

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