Jugeant leurs demandes satisfaites, les étudiants du campement propalestinien de l’Université du Québec à Montréal (UQAM) plieront bagage. Pendant ce temps, la situation s’envenime à l’Université McGill après un mois d’occupation.

Les manifestants entendent lever le campement d’ici le 6 juin.

Après près de trois semaines d’occupation, le conseil d’administration de l’UQAM a adopté mercredi une résolution répondant à leurs principales demandes.

Appelant à un « cessez-le-feu immédiat », il s’est engagé à ne détenir aucun actif dans des fonds ou des compagnies « qui profite de l’armement », et à divulguer chaque année la liste de ses investissements.

Il veillera également à ce qu’aucune de ses ententes universitaires, actuelles et futures, n’entre en conflit avec les principes de paix et de droit humanitaire international.

À l’heure actuelle, l’université n’entretient aucun lien institutionnel avec des établissements d’enseignement israéliens.

La résolution ne fait pas mention d’un « boycottage universitaire » comme le réclamaient les manifestants, mais ces derniers estiment que sa mise en œuvre aura un effet similaire.

Finalement, l’université a promis « de faciliter l’accueil d’universitaires palestiniennes et palestiniens, dont des personnes étudiantes, et [de] prévoir un budget à cette fin ».

Les manifestants ont confirmé jeudi leur départ devant les médias. Selon eux, le contenu de la résolution répond « favorablement aux conditions minimales de réalisation de [leurs] demandes ».

PHOTO CHRISTINNE MUSCHI, LA PRESSE CANADIENNE

Conférence de presse des porte-parole du campement propalestinien de l’UQAM, jeudi à Montréal

Ils plieront bagage au cours des prochains jours, pourvu qu’un plan de mise en application de la résolution soit adopté par la Commission des études, qui doit se rencontrer le 4 juin.

Les manifestants avaient toutefois bon espoir que cette condition soit respectée.

Par notre occupation et notre courage, on a prouvé que c’est possible d’établir un rapport de force et d’obtenir des gains significatifs.

Leila Khaled, porte-parole du campement propalestinien de l’UQAM

« Nous espérons que cette résolution établira un précédent pour l’ensemble des universités canadiennes et nous les pressons d’emboîter le pas », a-t-elle poursuivi.

Dans une déclaration publique, le recteur de l’université, Stéphane Pallage, s’est dit « fier que le dialogue ait pu être maintenu » avec les manifestants depuis le début de l’occupation.

« Dès aujourd’hui et dans les prochains jours, nous établirons ensemble les prochaines étapes devant mener au démantèlement complet du campement », a-t-il indiqué.

Le campement avait été établi à la mi-mai dans la cour intérieure du Complexe des sciences Pierre-Dansereau, deux semaines après l’apparition d’un premier campement propalestinien à l’Université McGill.

L’impasse se poursuit à McGill

Pendant ce temps, la situation s’envenime à l’université anglophone. Le recteur Deep Saini s’est adressé à la communauté étudiante dans un courriel transmis jeudi.

« Nous assistons avec consternation à la souffrance et à la violence qui affligent actuellement le Moyen-Orient », a-t-il commencé.

Cela dit, malgré l’ampleur et la gravité de la situation, il est faux de croire que tous les moyens sont bons lorsque vient le temps d’exprimer ses opinions.

Deep Saini, recteur de l’Université McGill, dans un courriel adressé à la communauté étudiante

L’université soutient avoir présenté « en toute bonne foi » une offre aux manifestants, sans succès. « Lors de la dernière rencontre, ces personnes ont quitté la table », a déploré M. Saini.

L’offre présentée aux manifestants de McGill

  • Étudier la possibilité de désinvestir dans des entreprises dont les revenus proviennent en grande partie du marché des armes.
  • Nouer de nouveaux liens avec des universités et des chercheurs de la bande de Gaza et de Cisjordanie.
  • Publier la liste des entreprises dans lesquelles l’université possède des avoirs en actions inférieurs à 500 000 $, dans la mesure où la divulgation de cette information est permise.

Rappelons que les étudiants réclament de leur administration qu’elle coupe tout lien – financier et universitaire – avec Israël, ce que refuse l’administration.

PHOTO RYAN REMIORZ, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Campement propalestinien de l’Université McGill

« Les appels au désinvestissement motivés par des questions géopolitiques – surtout lorsque les opinions au sein de notre communauté sont tranchées et polarisées – sont source de discorde et n’ont rien de rassembleur », a justifié Deep Saini.

Le recteur s’est aussi fermement opposé à un boycottage universitaire. « L’université a pour mission de faire progresser le savoir, et non de le restreindre », a-t-il plaidé.

Selon le recteur, des personnes masquées issues du campement « ont suivi et harcelé un membre de la haute direction ».

Les bureaux d’une équipe de la direction auraient aussi été ciblés. « On y a, en effet, dressé une table comportant des aliments avariés accompagnés d’une affiche sur laquelle figuraient les noms de chaque membre de l’équipe et des empreintes de mains peintes en rouge, évoquant le sang. Une affiche portant la mention “Voici la nourriture que vous méritez” complétait le tableau », a évoqué le recteur.

« Loin d’être pacifiques, ces gestes ont pour but de menacer, de contraindre et de faire naître la peur. C’est complètement inacceptable. Nous avons rapporté chacun de ces incidents à la police en lui demandant d’agir. »

L’histoire jusqu’ici

  • 12 mai :
    Un campement propalestinien s’installe à l’Université du Québec à Montréal.
  • 23 mai :
    La direction se tourne vers les tribunaux pour tenter de faire démanteler des parties du campement.
  • 27 mai :
    Le juge autorise en partie la requête de l’université. Les manifestants pourront rester, mais ils devront dégager un espace de deux mètres tout le long des bâtiments, de manière à créer un corridor de circulation.
  • 29 mai :
    Le conseil d’administration de l’université adopte une résolution répondant aux demandes des étudiants.
  • 30 mai :
    Les manifestants annoncent qu’ils lèveront le campement d’ici le 6 juin.