Malgré leur popularité, les services de transport adapté se sont « considérablement dégradés » dans les dernières années, affectant la qualité de vie de sa clientèle qui en dépend pour se déplacer et sortir de l’isolement. C’est ce que dénonce un regroupement d’usagers, qui réclame la création d’un programme de recrutement de chauffeurs.

Ce qu’il faut savoir

L’offre de service en transport adapté s’est grandement détériorée dans les dernières années, dénonce un regroupement d’usagers.

L’organisme met en cause l’adoption de la Loi concernant le transport rémunéré de personnes par automobile, qui a déréglementé l’industrie du taxi.

Un programme de recrutement de chauffeurs est réclamé.

« Les usagers sont au bout du rouleau », lâche Rosanne Couture, directrice générale de l’Alliance des regroupements des usagers du transport adapté du Québec (ARUTAQ).

À la source de leur mécontentement : le nombre insuffisant de chauffeurs et de véhicules pour répondre à la demande de déplacements des usagers, qui augmente d’année en année.

Lundi, des mobilisations sont prévues un peu partout à travers la province pour dénoncer « le manque d’intérêt » et « l’inaction » du gouvernement en matière de transport adapté.

L’urgence est d’autant plus grande que le nombre d’usagers est en constante augmentation avec le vieillissement de la population. Dans plusieurs régions, le manque de chauffeurs cause régulièrement des interruptions de service, soutient Mme Couture. Ailleurs, les horaires de service ont été réduits le soir et la fin de semaine.

« Pour les usagers, c’est l’impossibilité d’aller voir de la famille, d’aller voir des spectacles », déplore-t-elle.

D’après l’organisme, la situation s’est détériorée après l’adoption en 2019 de la Loi concernant le transport rémunéré de personnes par automobile, qui a déréglementé l’industrie du taxi. À l’époque, les chauffeurs de taxi assuraient plus de 70 % des déplacements en transport adapté. Mais dans les dernières années, nombre d’entre eux ont quitté la pratique, ce qui a une incidence sur l’offre de service en transport adapté.

Aujourd’hui, le regroupement estime avoir perdu la moitié de ses chauffeurs. « On dit : c’est assez. On demande réparation parce qu’un préjudice a été causé », tonne Mme Couture.

Dans une sortie publique lundi, l’ARUTAQ formule ainsi quatre recommandations au gouvernement :

  • la création d’un programme gouvernemental de recrutement de chauffeurs ;
  • la création d’un programme gouvernemental rémunéré de formation obligatoire et de qualification de ces nouveaux chauffeurs ;
  • la création d’un programme d’aide financière spécifique en transport adapté pour la mise en service de véhicules universellement accessibles ; 
  • un rehaussement nécessaire du programme d’aide gouvernementale au transport adapté. 

Des mauvaises expériences plus fréquentes

Le manque de main-d’œuvre n’est pas le seul problème. « On voit une grosse diminution de qualité dans les services offerts par les chauffeurs de transport adapté », déplore Annie Des Rosiers, directrice générale de l’Association lavalloise pour le transport adapté.

Ces dernières années, les usagers rapportent plus de mauvaises expériences lors de leurs déplacements. Par exemple, les chauffeurs sont tenus d’aider les usagers à entrer dans le véhicule et à en sortir. Or, ils n’ont pas toujours les bonnes techniques.

« Ça peut être dangereux de blesser quelqu’un », prévient Mme Des Rosiers. Il arrive aussi qu’ils doivent travailler auprès d’une clientèle aux prises avec une déficience intellectuelle.

Les chauffeurs n’ont pas toujours une bonne approche avec une personne qui se désorganise.

Annie Des Rosiers, directrice générale de l’Association lavalloise pour le transport adapté

Selon Rosanne Couture, la formation pour les chauffeurs en transport adapté est actuellement « inadéquate ». « Il y a des usagers qui sont [déposés quelque part et qui sont] oubliés ! C’est incroyable, tout ce qui se passe ! », s’exclame-t-elle.

Une enveloppe bienvenue

Autre source de frustration : les critères d’admission, qui n’ont pas été revus depuis longtemps. Actuellement, un usager atteint d’un handicap cognitif n’a pas systématiquement le droit d’être accompagné en transport adapté.

La raison évoquée ? La personne ne peut pas avoir recours à un accompagnateur si elle peut utiliser les transports en commun en compagnie d’une autre personne.

Un non-sens, selon Mme Des Rosiers. « Les critères ne sont plus pertinents », estime-t-elle.

Rosanne Couture salue l’enveloppe de 285 millions de dollars accordée au transport adapté dans le récent budget de Québec. Or, l’argent seul ne réglera pas tout, nuance-t-elle.

« Nos recommandations ont le potentiel d’améliorer de façon notable le quotidien de nos usagers », croit Rosanne Couture.

Qu’est-ce que le transport adapté ?

Le transport adapté est un service de déplacement porte à porte offert aux personnes handicapées. Pour y être admissible, il faut être en mesure de faire la preuve de limitations sur le plan de la mobilité, par exemple l’incapacité de marcher 400 mètres ou de s’orienter dans le temps et l’espace. Encadré par le gouvernement, le service est assuré par les organismes publics de transport en commun et les municipalités.